La nationalisation de SOMAIR : Un changement stratégique
Le 19 juin 2025, le Conseil des ministres du Niger a acté la nationalisation de la Société des Mines de l’Air (SOMAIR), une décision symbolique et stratégique. Détenue majoritairement par la société française Orano, ex-Areva, cette nationalisation intervient en réponse à une série de tensions économiques et diplomatiques avec cet acteur incontournable du secteur de l’uranium.
Les motivations derrière la nationalisation
Selon le gouvernement nigérien, cette nationalisation vise une gestion plus efficiente et une distribution équitable des richesses minières, dans un contexte où des griefs antérieurs portés contre Orano pèsent lourdement. Les autorités accusent Orano de négligences et d’un déséquilibre criant dans la commercialisation des productions d’uranium. Ainsi, de 1971 à 2024, Orano aurait bénéficié de la quasi-totalité des revenus, au détriment de SOPAMIN, le partenaire nigérien.
Conséquences du coup d’État de 2023
L’évolution politique du Niger, marquée par le coup d’État militaire du 26 juillet 2023, a exacerbé les tensions internationales, notamment avec la France. Ce changement de régime a provoqué une série de réactions diplomatiques, dont la condamnation ferme par le président français Emmanuel Macron, et une détérioration des relations avec l’Union européenne. La junte au pouvoir a profité de l’occasion pour renforcer son emprise sur l’économie du pays, en gelant les avoirs étrangers et en suspendant des contrats miniers stratégiques.
La réponse d’Orano et les implications juridiques
Orano, se trouvant dans une position vulnérable, a engagé plusieurs procédures d’arbitrage devant le Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements (CIRDI). L’entreprise française fait valoir que ses droits d’exploitation ont été bafoués et que sa situation financière se détériore en raison de la mainmise de l’État nigérien sur SOMAIR. En parallèle, des tensions se font jour sur le terrain juridique, où des accusations de détentions arbitraires et de sabotage opérationnel exacerbent le climat de défiance.
Le contexte régional : Une nationalisation généralisée
Le Niger s’inscrit dans une vague de nationalisations dans la région sahélienne. À l’instar du Mali et du Burkina Faso, le Niger, désormais membre de l’Alliance des États du Sahel (AES), cherche à capitaliser sur ses ressources naturelles face à l’instabilité politique. Cette dynamique répond à une logique d’affirmation de la souveraineté économique et de renégociation des termes des partenariats miniers, avec pour ambition principale, l’autosuffisance et le développement local.
Enjeux économiques à long terme
Au-delà des enjeux politiques immédiats, cette nationalisation interroge sur la capacité du Niger à gérer son industrie extractive sans l’assistance technique et le soutien financier d’acteurs extérieurs aguerris. Alors que le pays emboîte le pas à ses voisins pour réaffirmer son contrôle, le défi sera d’attirer de nouveaux partenaires capables de combler le vide laissé par Orano, tout en assurant la pérennité des activités minières et le développement durable de la région.