Un instrument financier stratégique au cœur du tissu économique
Le ballet des véhicules dans la capitale congolaise rappelle chaque jour le rôle structurant du réseau routier dans la dynamique économique nationale. Créé pour assurer le financement pérenne de l’entretien et de la modernisation des routes, le Fonds routier est devenu, en l’espace de deux décennies, l’un des leviers les plus scrutés par les milieux d’affaires comme par les ménages. À l’heure où le gouvernement déroule la phase opérationnelle du Plan national de développement 2022-2026, la performance de cet organe conditionne l’attractivité logistique de tout le pays. « La route précède le développement », rappellent souvent les économistes de la sous-région, et la formule n’a jamais paru aussi pertinente.
La contrainte budgétaire et l’impératif de modernisation
Réunis le 26 juin autour du ministre de l’Assainissement urbain, du Développement local et de l’Entretien routier, les décideurs ont ausculté, chiffres en main, la soutenabilité financière du dispositif. Entre la progression du trafic, l’inflation du coût des intrants bitumineux et la nécessité de maintenir des axes secondaires souvent négligés, l’équation budgétaire se complexifie. Juste Désiré Mondelé a rappelé que « la gouvernance du Fonds doit conjuguer rigueur comptable et créativité », soulignant que chaque franc cfa mobilisé doit être traçable, depuis la collecte des droits de passage et de pesage jusqu’à la réception technique des travaux.
Dans une conjoncture internationale marquée par la volatilité des cours du pétrole – principal vecteur de recettes fiscales pour le Trésor – la recherche de financements innovants s’impose. Les experts présents ont ainsi évoqué le recours contrôlé aux marchés de capitaux régionaux, la dynamisation de la taxe poids lourds et une coopération accrue avec la Banque de développement des États de l’Afrique centrale. L’objectif est clair : élargir la base financière sans alourdir excessivement la charge fiscale des ménages.
Cantonnage de juillet : une opération test
Le calendrier est serré. Dès les premiers jours de juillet, les équipes d’entretien devront lancer une vaste campagne de cantonnage manuel et mécanisé. Cette opération, prévue sur plus de mille kilomètres de voiries urbaines et interurbaines, servira de baromètre à la nouvelle doctrine de maintenance préventive. Le directeur général du Fonds routier, Elenga Obat Nzenguet, précise que « les interventions cibleront prioritairement les accotements et les dispositifs de drainage, là où la dégradation progresse le plus vite à la saison des pluies ».
L’enjeu dépasse la simple réhabilitation ponctuelle : il s’agit d’installer durablement une culture de l’entretien régulier, moins coûteuse que les reconstructions cycliques. Des protocoles inspirés des normes de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale seront appliqués, incluant la géolocalisation des tronçons traités et la remontée en temps réel des données vers un tableau de bord centralisé.
Partenariat public-privé et innovation technologique
Consciente de la montée en puissance des corridors de transit internationaux, l’administration veut mobiliser le savoir-faire privé. La société Congo Pesage, déjà active dans le contrôle de charge à l’essieu, a exposé un dispositif de pesage dynamique censé fluidifier le trafic aux postes frontaliers. L’idée est double : préserver le revêtement des routes et accroître les recettes affectées à leur entretien.
Parallèlement, la numérisation de la chaîne de paiement se précise. Un prototype de plateforme mobile, développé par une start-up brazzavilloise, permettra aux transporteurs de régler les redevances via monnaie électronique, limitant les manipulations de liquidités. Selon un conseiller de la présidence, cette innovation « répond aux exigences de transparence prônées par la Commission de la CEMAC ».
Vers une culture de la performance et de la reddition des comptes
S’il est une constante revenue à chaque prise de parole, c’est l’exigence de résultats mesurables. Le ministre Mondelé a insisté sur la mise en place d’indicateurs de performance publics : longueur de routes entretenues, réduction du temps de parcours, niveau de satisfaction des usagers. Les rapports d’audit seront rendus accessibles à la Cour des comptes et au Parlement, afin de consolider la confiance de l’opinion.
La discussion s’est terminée sur une note d’optimisme raisonné. Les participants ont salué l’engagement personnel du chef de l’État, considéré comme un gage de continuité politique pour les projets structurants. En coulisses, des voix rappellent qu’une route bien entretenue ne se voit jamais vraiment ; elle se ressent dans la fluidité du trafic, le prix du panier de la ménagère et la compétitivité des entreprises. À la veille de la saison des pluies, le défi est immense, mais l’alignement des volontés publiques et privées laisse entrevoir des chaussées plus résilientes, au service d’une croissance inclusive.