Une session inaugurale sous le sceau de la renaissance
Brazzaville, centre ville, fin d’après-midi : les légers craquements du parquet du gymnase Eboué résonnent encore dans les esprits des délégués, sortis tout juste de la session inaugurale du Conseil fédéral de la Fédération congolaise de basketball. Au-delà de l’aspect protocolaire, la date du 28 juin s’inscrit désormais comme un jalon fondateur dans l’histoire récente de la balle orange nationale. Venus de toutes les ligues départementales, dirigeants, techniciens et anciens internationaux ont partagé la conviction d’un moment charnière. « Nous n’avons plus le luxe de l’attentisme », a résumé le président Fabrice Makaya Mateve, d’un ton mesuré mais ferme, rappelant sa volonté de bâtir une gouvernance de consensus sans renoncer à l’exigence de résultats.
Le plan quadriennal 2025-2028 : dessein d’une croissance durable
Face au parterre de ligues, le bureau exécutif a déroulé les grandes lignes d’un plan quadriennal pensé comme un accélérateur de performance. Objectif affiché : replacer les sélections nationales dans le Top 10 africain et qualifier, au moins une fois, un club congolais pour la Basketball Africa League durant le cycle. Le budget prévisionnel, présenté par la commission financière, table sur une montée progressive des ressources, adossée au sponsoring privé et à une rationalisation des dépenses logistiques. Pour Jean-Bruno Ngomas, économiste du sport consulté par nos soins, « la clé réside dans la soutenabilité : créer de la valeur autour du produit basket pour retenir supporters et partenaires, tout en évitant la fuite des talents ».
Cette trajectoire, jugée ambitieuse mais réaliste, s’appuie sur la rénovation des infrastructures régionales, l’extension du championnat élite à dix équipes et la redéfinition du calendrier afin de limiter les chevauchements avec les compétitions scolaires. L’enjeu est double : offrir un volume de matches suffisant aux athlètes et susciter l’engouement du public au fil de la saison, sans briser l’équilibre entre sport et formation académique.
Former pour durer : la transmission au cœur du projet fédéral
S’il est un consensus qui traverse l’ensemble des acteurs, c’est bien l’urgence d’un investissement massif dans la formation. La session de Brazzaville a validé l’actualisation d’un contrat-cadre avec le ministère des Sports visant à certifier chaque centre d’entraînement départemental. Le directeur technique national, Charles-Élie Lokoka, évoque « un cahier des charges harmonisé, depuis la qualité du parquet jusqu’à la compétence des entraîneurs, afin que l’enfant de Pointe-Noire bénéficie du même encadrement qu’à Brazzaville ».
Outre la filière des jeunes, le plan prévoit un programme de bourses pour les entraîneurs et les arbitres, financé conjointement par la Solidarité olympique et un pool d’entreprises locales. La priorité ira aux stages de niveau 1 et 2 de la FIBA, organisés sur place pour limiter les coûts, avec l’intervention ponctuelle de techniciens venus du Sénégal et de la Tunisie, deux nations dont la réussite sert de boussole. L’idée, insiste le président Makaya Mateve, est de « construire des compétences ancrées au pays, plutôt que de dépendre systématiquement de l’expertise extérieure ».
La dimension académique n’est pas oubliée. En partenariat avec l’Université Marien-Ngouabi, un cursus en management sportif devrait voir le jour dès la rentrée prochaine. Les cours, prévus hors temps d’entraînement, offriront aux jeunes athlètes un socle de reconversion professionnelle, réduisant les risques de décrochage après la carrière.
Réformer les textes pour structurer la concurrence
Au-delà du jeu, la qualité d’un championnat se mesure aussi à la clarté de ses règles. Les membres du Conseil fédéral ont adopté plusieurs amendements aux règlements généraux, parmi lesquels la limitation à deux joueurs étrangers alignés simultanément sur le terrain. Cette mesure, saluée par la plupart des techniciens locaux, vise à préserver les temps de jeu pour les jeunes Congolais tout en maintenant un niveau d’opposition stimulant. « Le but n’est pas de fermer la porte aux talents extérieurs, mais de garantir un transfert de savoir-faire plutôt qu’un remplacement pur et simple », analyse Mireille Bissol, ancienne internationale et aujourd’hui consultante pour Radio-Cité.
Autre avancée notable : l’introduction d’un contrôle de gestion financier pour les clubs de première division. Chaque formation devra présenter un budget équilibré avant le coup d’envoi de la saison, condition sine qua non pour obtenir la licence fédérale. Cette disposition s’inspire des standards appliqués dans certaines ligues européennes et répond à l’exigence de transparence, régulièrement rappelée par le Comité national olympique. Enfin, un barème de points de formation incitera les clubs à aligner des joueurs issus de leur propre centre, mécanisme qui pourrait, à terme, infléchir la logique de court terme souvent décriée.
Entre ambition nationale et rayonnement continental
La conclusion des travaux, prononcée par le directeur des activités sportives Gin Clor Samba Samba, s’est voulue résolument tournée vers l’action. En rappelant la devise « discipline, solidarité, performance », il a exhorté les ligues à transformer les intentions en réalisations palpables sur le terrain. Le représentant du Comité national olympique a quant à lui souligné la convergence des orientations fédérales avec les objectifs gouvernementaux de promotion de la jeunesse et de cohésion sociale par le sport.
À l’échelle continentale, le basketball congolais bénéficie d’un contexte porteur. L’essor de la BAL, soutenue par la NBA, ouvre des perspectives inédites en matière d’exposition médiatique et de retombées économiques. Pour y accéder, la Fécoket doit franchir un seuil de compétitivité que seule une réforme en profondeur peut permettre d’atteindre. Les décisions annoncées ne constituent qu’un premier pas, mais elles établissent un cap clair pour les quatre années à venir.
Au sortir de la réunion, un jeune entraîneur de la ligue de la Likouala confiait son optimisme, non sans prudence : « Le projet est solide sur le papier. La différence se fera dans notre capacité à suivre le rythme, à faire bloc et à ne pas céder aux vieilles habitudes ». Le chronomètre est enclenché. Le public, quant à lui, attend désormais que la promesse du rebond se traduise par des victoires, des salles pleines et, pourquoi pas, un drapeau congolais hissé sur le podium africain.
