Prodivac, pierre angulaire d’une agriculture compétitive au Congo
Dans le tropisme urbain de Brazzaville, un rendez-vous discret, mais stratégique, s’est tenu le 26 juin : la validation de la stratégie de développement de compétences sectorielles du Projet de développement intégré des chaînes de valeur agricoles, plus connu sous l’acronyme Prodivac. Lancée en présence du directeur de cabinet du ministre de l’Agriculture, de l’Élevage et de la Pêche, Pascal Robin Ongoka, cette rencontre marque, selon ses propres mots, « une étape décisive vers la transformation structurelle de notre économie rurale ».
Le pari des compétences pour irriguer l’emploi urbain et rural
Au-delà de la signature protocolaire, le document validé ambitionne de résoudre un paradoxe bien connu des jeunes citadins : un marché de l’emploi exsangue alors que les terres arables demeurent sous-exploitées. La stratégie mise sur la formation pratique, la certification des savoir-faire et la mobilité professionnelle, afin de créer une main-d’œuvre qualifiée capable d’absorber les innovations agro-industrielles. « Former d’abord, mécaniser ensuite : tel est le sens de notre démarche », explique un expert du ministère, rappelant que l’agriculture emploie déjà près de 40 % de la population active, mais génère seulement 10 % du PIB national.
Concertation sociale et leadership partagé comme gage de crédibilité
Fait notable, l’élaboration du plan a mobilisé les représentants des organisations d’employeurs, des syndicats de travailleurs, des agences onusiennes et du comité de pilotage du Prodivac. Ces acteurs se sont prononcés sur les indicateurs de performance, la gouvernance des centres de formation et les passerelles entre filières courte et longue. Les débats, parfois vifs sur la question des stages rémunérés, ont abouti à des compromis que les participants qualifient de « responsables et prospectifs ». L’inclusion de la plateforme collaborative, instaurée dès 2021, confère au processus un ancrage social rarement observé dans les projets sectoriels.
Alignement avec la Vision 2025 et l’Agenda 2063 de l’Union africaine
La stratégie validée s’inscrit dans la Vision 2025 du gouvernement, qui promeut une diversification économique axée sur la sécurité alimentaire et l’exportation de produits à forte valeur ajoutée. Elle épouse également l’Agenda 2063 de l’Union africaine, notamment son aspiration à une croissance inclusive portée par la jeunesse. Les modules de formation intègrent ainsi des notions de résilience climatique, de gestion de la fertilité des sols et de transformation numérique, autant d’exigences contemporaines qu’entendent maîtriser les futurs techniciens et entrepreneurs agricoles.
La Banque africaine de développement, levier financier et technique
Financé à hauteur de 65 millions de dollars par la Banque africaine de développement, le Prodivac bénéficie d’un dispositif de suivi-évaluation rigoureux. La BAD, via sa représentante résidente, a salué « l’esprit de co-construction qui caractérise le Congo » et confirmé la disponibilité d’une enveloppe additionnelle destinée aux filières manioc, riz et aviculture, sous réserve d’atteinte des indicateurs intermédiaires. Ce partenariat apporte non seulement des ressources, mais également une expertise opérationnelle issue d’autres programmes réussis en Afrique de l’Ouest.
Perspectives pour la jeunesse brazzavilloise et pour la souveraineté alimentaire
À court terme, le ministère table sur la formation de 7 000 jeunes et femmes, dont près de la moitié issus des quartiers périphériques de Brazzaville. À moyen terme, l’objectif est de porter la part de l’agro-industrie à 20 % du PIB et de réduire de 30 % les importations de denrées de base. Les entrepreneurs interrogés estiment que la stratégie pourrait créer un écosystème vertueux, capable d’attirer des capitaux privés et de retenir les talents congolais. Si le défi logistique reste important, la validation du document offre désormais une boussole et, surtout, un langage commun aux acteurs publics et privés.