La vigilance parlementaire au service de l’attractivité économique
À l’hémicycle du Palais des Congrès, la Commission économie, finances et contrôle de l’exécution du budget a choisi d’inscrire la question des conventions d’établissement au rang de ses priorités stratégiques. Sous l’impulsion du premier vice-président Thierry Hobié, les députés entendent démontrer que l’Assemblée nationale n’est pas seulement une chambre d’enregistrement, mais un acteur direct de la dynamique économique. « Notre mandat inclut le suivi concret des engagements contractés entre l’État et le secteur privé », résume le député Paul Matombé, joint par nos soins. Cette campagne de sensibilisation, amorcée le 1ᵉʳ juillet, se veut la traduction opérationnelle de cette vigilance.
Le dispositif juridique des conventions d’établissement décrypté
Instituées par la Charte des investissements, les conventions d’établissement constituent un instrument privilégié d’attraction du capital dans un environnement régional marqué par une concurrence exacerbée. Elles confèrent aux entreprises étrangères ou locales un cadre juridique stable, assorti d’avantages fiscalo-douaniers, en contrepartie d’obligations clairement énoncées, au premier rang desquelles la création d’emplois nationaux et le transfert de compétences. Comme le rappelle Ludovic Itoua, directeur général des Impôts, « l’équation est simple : l’État consent un soutien, l’entreprise livre des résultats mesurables ».
Ce pacte à double entrée reflète le souci du gouvernement d’équilibrer impératifs de compétitivité et exigences de développement endogène. En sécurisant les investissements, le Congo-Brazzaville consolide son attractivité, tout en s’assurant que les retombées profitent au tissu économique local.
Fiscalité incitative et retour social : un équilibre recherché
Les exonérations temporaires de droits de douane sur les importations d’équipements ou les aménagements de TVA sont autant de leviers destinés à réduire le coût d’entrée sur le marché congolais. Néanmoins, ces facilités ne sauraient occulter l’exigence de résultats. Les parlementaires insistent sur la clause sociale, point de convergence entre la vision présidentielle de croissance inclusive et l’aspiration légitime des jeunes diplômés à trouver un emploi qualifié. Chaque convention stipule désormais des objectifs chiffrés de recrutement, assortis de calendriers précis.
Selon l’Agence congolaise pour l’emploi, les conventions d’établissement actuellement en cours pourraient générer plus de 7 000 postes directs sur cinq ans, principalement dans l’agro-industrie, la transformation du bois et les services logistiques. Cette prévision, réaliste de l’avis des analystes, illustre le potentiel d’un dispositif bien calibré.
La mécanique de contrôle : impôts, douanes et ACPE en première ligne
La phase de terrain s’organise autour d’équipes mixtes associant inspecteurs des impôts, officiers des douanes et experts de l’ACPE, sous la supervision de la Commission parlementaire. Il s’agit de visiter les sites des sociétés bénéficiaires, de confronter les déclarations aux réalisations, de vérifier la régularité des carnets d’importation d’équipements et la matérialité des recrutements annoncés. « Nous ne cherchons pas à sanctionner, mais à garantir la sincérité des engagements », insiste Thierry Hobié, conscient que la crédibilité de l’outil dépend de la pédagogie autant que du contrôle.
Les premières descentes ont ciblé une dizaine d’entreprises installées dans la périphérie nord de Brazzaville et dans la zone économique spéciale de Maloukou-Tréchot. Les retours préliminaires révèlent un taux d’exécution globalement satisfaisant, même si des ajustements sont recommandés, notamment en matière de formation continue des nouvelles recrues.
Les attentes de la jeunesse brazzavilloise face au défi de l’emploi
Dans les rues du Plateau des 15 Ans, les débats sur les conventions d’établissement ne paraissent pas, à première vue, capter l’attention des passants. Pourtant, derrière ce lexique technique, se joue le destin professionnel d’une génération fortement urbanisée. Félicité Bongo, étudiante en économie à Marien-Ngouabi, exprime un point de vue nuancé : « Nous saluons les investissements, mais nous voulons des postes correspondant à nos compétences. L’État doit veiller à la qualité des emplois créés. »
Les autorités ne l’ignorent pas. L’inclusion d’une clause de formation et d’un taux minimal d’encadrement supérieur d’origine congolaise répond précisément à cette préoccupation. À moyen terme, cette orientation pourrait réduire la dépendance vis-à-vis de la main-d’œuvre expatriée et dynamiser l’écosystème national du savoir.
Perspectives de gouvernance économique responsable
La campagne d’audit lancée par la représentation nationale illustre la maturité croissante des institutions congolaises dans la gestion partenariale du développement. En s’appuyant sur des données empiriques, le Parlement entend formuler, le moment venu, des recommandations susceptibles de renforcer la transparence et l’efficacité des conventions à venir.
De l’avis convergent des experts rencontrés, cette démarche proactive pourrait servir de modèle dans la sous-région, où la quête d’investissements se heurte souvent à la faiblesse du suivi institutionnel. En articulant avantage compétitif et responsabilité sociale, le Congo-Brazzaville réaffirme ainsi sa volonté d’inscrire la croissance dans la durée, au bénéfice d’une population avide d’opportunités. Les prochains mois diront si le pari de la co-responsabilité, scellé par ces conventions, se traduit en emplois pérennes et en transfert effectif de compétences.