Un souffle latino-africain sur les rives du fleuve Congo
La récente audience accordée par l’ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela, Mme Laura Evangelia Suàrez, à l’équipe de Wild Safari Tours a ravivé l’intérêt des diplomates pour la future Nabemba Tourism Expo 2025. Sous les lambris d’un hôtel particulier de Poto-Poto, la cheffe de mission a plaidé pour l’implication directe de tour-opérateurs vénézuéliens. « Nos professionnels peuvent apporter un regard neuf sur la promotion des destinations émergentes », a-t-elle confié, soulignant la complémentarité entre la bande tropicale caribéenne et le Bassin du Congo.
Cette main tendue résonne avec la stratégie congolaise de diversification économique, qui place le tourisme au cœur de la nouvelle feuille de route gouvernementale. L’ouverture à un partenaire d’Amérique du Sud témoigne d’une volonté d’aller au-delà des circuits traditionnels et d’asseoir la diplomatie économique de Brazzaville sur les principes d’équilibre et de respect mutuel.
Nabemba 2025 : laboratoire d’une diplomatie touristique
Conçu comme un salon international, la Nabemba Tourism Expo veut capitaliser sur l’image d’un Congo voué à devenir hub régional. Son coordonnateur national, M. Emerancy Francel Ibalank, met en avant un thème fédérateur : « La valorisation des potentialités touristiques du Bassin du Congo et de la coopération Sud-Sud ». L’invitation faite au Venezuela s’inscrit dans une logique d’alliance transcontinentale où le partage de bonnes pratiques se substitue à des schémas de dépendance verticale.
Selon les projections du comité d’organisation, l’Expo attend plus de vingt-cinq délégations étrangères et ambitionne d’attirer six mille visiteurs professionnels. Pour y parvenir, il s’appuie sur une plateforme numérique d’échanges B2B où les agences de voyage vénézuéliennes pourront proposer des itinéraires combinés Amazonie-Congo, mariant forêts primaires, mosaïques culturelles et croisières fluviales.
Tourisme durable : convergences écologiques entre Orénoque et Congo
La discussion entre Mme Suàrez et Wild Safari Tours a insisté sur le volet environnemental. Le Venezuela, fort de son Parc national Canaima ou des archipels de Los Roques, dispose d’une expertise en gestion d’aires protégées tropicales. Le Congo, de son côté, fait valoir l’immensité de ses tourbières et la biodiversité du parc d’Odzala-Kokoua. Les organisateurs entendent donc greffer au salon des modules consacrés au climat, à la reforestation et à la lutte contre l’érosion.
En préparation, des journées de nettoyage des berges du Djoué et des ateliers sur l’empreinte carbone des circuits touristiques. « Nous voulons démontrer que tourisme et écologie peuvent cesser d’être antagonistes », a déclaré une source proche du ministère congolais de l’Environnement, qui voit dans cette coopération une opportunité de tester des standards internationaux adaptés aux réalités locales.
Former la génération Z aux nouveaux métiers de l’hospitalité
Brazzaville regorge d’écoles d’hôtellerie et de filières universitaires en quête de partenariats externes. L’Expo prévoit des master-classes conjointes animées par des chefs vénézuéliens, des responsables de parcs nationaux et des créateurs d’applications de réalité augmentée dédiées à la découverte patrimoniale. L’idée est de doter les jeunes Congolais d’outils pratiques, depuis la conception d’itinéraires écoresponsables jusqu’à la communication digitale multilingue.
Les autorités éducatives s’intéressent à un programme d’échanges semestriels qui permettrait à des étudiants de l’Institut national du tourisme d’effectuer un stage à Caracas, tandis que leurs homologues vénézuéliens seraient accueillis au village d’Ekom, sur la route des cataractes du Congo. Cette mobilité sud-sud, plus accessible financièrement, devrait renforcer l’employabilité des diplômés et densifier le tissu entrepreneurial local.
Au-delà du salon, un partenariat à long terme en gestation
Le dialogue amorcé se veut durable. Wild Safari Tours et l’ambassade du Venezuela planchent sur un accord-cadre prévoyant la création d’un Observatoire de la coopération touristique Sud-Sud, chargé de publier chaque année un baromètre des flux et des retombées. Des fonds pourraient être mobilisés auprès de la Banque de développement des États d’Amérique latine et de la Banque des États de l’Afrique centrale pour des projets ponctuels, tels que l’électrification solaire de lodges ou la promotion de circuits culturels afro-latinos.
Dans ce faisceau de perspectives, Brazzaville se positionne comme carrefour diplomatique et incubateur d’initiatives privées. « Le tourisme n’est plus seulement un secteur de loisirs ; il devient levier de rayonnement, d’innovation et de cohésion sociale », analyse un chercheur de l’Université Marien Ngouabi. L’Expo 2025 sera donc scrutée comme un test grandeur nature de la capacité du Congo à orchestrer des partenariats équilibrés, tout en préservant la souveraineté de ses écosystèmes et la vitalité de ses communautés.