Un plébiscite sans suspense mais lourd de symboles
Le 6 juillet, dans la chaleur moite d’une salle de réunion prise d’assaut par plusieurs générations d’anciens enfants de troupe, le vote n’aura pas laissé place au doute : à main levée et à l’unanimité, le colonel-major Rémy Ayayos Ikounga a été reconduit à la présidence de l’Association des Anciens Enfants de Troupe (AAET) du Congo pour un mandat de deux ans. L’absence de candidature concurrente n’a en rien amoindri la portée symbolique de ce plébiscite. Il témoigne, aux yeux des membres, de la confiance acquise par l’officier dans la conduite d’une structure où la discipline militaire côtoie les attentes d’une société civile en pleine mutation.
« Je mesure l’honneur qui m’est fait et m’engage, avec l’appui du bureau exécutif, à maintenir le cap », a déclaré sobrement l’intéressé, rappelant un art consommé de la litote caractéristique de la culture militaire. Dans une capitale habituée aux recompositions institutionnelles rapides, cette stabilité associative est perçue comme un gage de continuité, voire de fiabilité dans le paysage organisationnel local.
Solidarité intergénérationnelle, fer de lance d’une nouvelle feuille de route
La ligne directrice du nouveau mandat est clairement annoncée : une solidarité renforcée entre promotions au-delà de la fraternité d’armes. Pour le président réélu, l’enjeu dépasse la simple convivialité. Il s’agit d’instaurer un mécanisme de soutien mutuel articulé autour de trois axes : l’accompagnement social des vétérans âgés, l’insertion professionnelle des plus jeunes et la mutualisation des compétences lors d’initiatives citoyennes. Cette articulation répond au besoin, souvent exprimé lors des assemblées, de traduire l’esprit de corps en actions tangibles à destination des quartiers de Brazzaville où nombre d’anciens résident.
« Notre parcours commun nous confère une responsabilité particulière vis-à-vis de la jeunesse urbaine en quête de repères », insiste un membre du bureau, rappelant que l’AAET ne souhaite pas rester une « chapelle fermée », mais se positionner en trait d’union entre générations, dans la droite ligne des orientations nationales qui placent la cohésion sociale au cœur du développement.
Gouvernance associative : entre rigueur budgétaire et transparence attendue
Si l’on en croit les rapports financiers adoptés sans réserve, l’AAET clôt son précédent exercice sur un excédent modeste mais significatif, fruit d’une gestion qualifiée d’« efficace et efficiente » par les commissaires aux comptes. La rigueur administrative s’est imposée comme une vertu cardinale, posant la question cruciale de la transparence, désormais élevée au rang d’exigence sociétale. En misant sur des procédures d’audit internes et des comptes-rendus périodiques, l’association entend consolider la confiance de ses membres et des partenaires institutionnels, notamment le ministère de la Défense qui observe avec intérêt cette dynamique vertueuse.
Au-delà de la comptabilité, la gouvernance s’enrichit d’une réflexion sur la participation féminine. Bien que les femmes ne représentent qu’une fraction des effectifs, leur présence croissante dans les rangs des forces armées pousse l’AAET à envisager des modes d’implication novateurs, en phase avec les objectifs nationaux d’égalité et de modernisation des pratiques.
Le cap des 80 ans de l’EMPGL : entre mémoire et projection vers l’avenir
Point de convergence des ambitions du nouveau mandat, la commémoration du 80e anniversaire de la création de l’École militaire préparatoire Général-Leclerc (EMPGL) s’annonce comme un moment phare. Prévue pour 2025, la célébration pourrait attirer un public au-delà du cercle militaire, tant l’établissement demeure un repère patrimonial pour la capitale. Expositions itinérantes, colloques historiques et cérémonies militaires devraient rythmer un programme en gestation, conçu pour mettre en valeur le rôle formateur de l’EMPGL dans l’édification de cadres congolais et africains.
Selon un membre du comité d’organisation, la dimension panafricaine de l’événement sera « incontournable », plusieurs États voisins ayant déjà manifesté leur intérêt pour associer leurs propres associations d’anciens enfants de troupe. Une opportunité pour Brazzaville de rayonner sur la scène régionale, tout en renforçant le sentiment d’appartenance à un espace commun de valeurs militaires et civiques.
Anciens enfants de troupe et citoyenneté : la force tranquille d’un engagement discret
Au-delà des célébrations, l’AAET revendique un rôle de trait d’union entre armée et société. Ses membres participent régulièrement à des campagnes de salubrité urbaine, des actions de sensibilisation à la sécurité routière ou encore des collectes de sang en partenariat avec le Centre national de transfusion sanguine. Autant d’initiatives qui trouvent un écho particulier auprès d’une jeunesse brazzavilloise en quête d’exemples positifs, loin des clichés sur la distance présumée entre institutions et population.
Les observateurs notent que cet engagement répond à la stratégie de rapprochement civilo-militaire encouragée par les autorités publiques. « Nous ne pouvons prétendre servir la Nation en uniforme sans écouter les attentes de ceux auprès de qui nous vivons », confie un officier en retraite actif dans l’association. Cette posture modérée, presque modeste, participe au capital sympathie dont bénéficie l’AAET dans la ville.
Un mandat à haut potentiel stratégique
La réélection de Rémy Ayayos Ikounga ne constitue pas seulement un prolongement, mais ouvre une fenêtre stratégique pour ancrer durablement l’AAET dans le tissu social brazzavillois. Entre renforcement de la solidarité interne, quête de transparence et ouverture panafricaine, l’association confirme sa volonté de conjuguer héritage militaire et modernité citoyenne. Dans un contexte national marqué par la promotion de la cohésion et de la responsabilité collective, cet agenda apparaît en phase avec les orientations publiques.
La jeunesse urbaine, friande d’exemples concrets d’engagement, pourrait bien trouver dans l’AAET un interlocuteur inattendu, mais crédible. Les deux années à venir diront si la feuille de route ambitieuse se traduira par des réalisations mesurables. Pour l’heure, la confiance réaffirmée au colonel-major Ayayos Ikounga résonne comme un signal de stabilité et d’espoir, celui d’une solidarité en uniforme qui transcende les générations et irrigue le vivre-ensemble brazzavillois.