La vision d’une entité née en 2022
Créée il y a à peine deux ans, la fondation « Team Dr Balako Liyanza » se veut déjà un acteur structurant dans l’écosystème congolais de l’entrepreneuriat. Dirigée par le médecin et homme public Jean Dénis Balako Liyanza, l’organisation avance l’ambition explicite de « redonner espoir à la jeunesse » par la mise à disposition d’outils concrets, à commencer par la formation professionnelle. Dans un paysage kinshasien où le secteur informel domine encore l’activité économique, pareille ambition apparaît presque volontariste tant les défis logistiques, budgétaires et institutionnels demeurent nombreux.
Le fondateur revendique cependant une grille de lecture pragmatique : d’abord consolider des modules de formation de courte durée, orientés vers des métiers identifiés comme porteurs – artisanat numérique, services de proximité, agriculture urbaine –, ensuite faciliter l’accès aux micro-financements susceptibles de transformer un projet en micro-entreprise. Au-delà du volontarisme, c’est donc une méthode par paliers qui se dessine, inspirée des incubateurs africains apparus depuis une décennie dans des capitales telles que Lagos, Abidjan ou Kigali.
Former pour transformer
Le cœur de la stratégie repose sur l’ingénierie pédagogique. Les responsables de la fondation avancent un modèle articulé autour de partenariats avec des centres de formation professionnelle, des universités locales et un réseau encore balbutiant d’entreprises mécènes. L’idée est de lier la théorie à une pratique immédiatement monnayable sur le marché urbain. « Il ne sert à rien d’aligner des diplômes si ceux-ci ne se convertissent pas en activités génératrices de revenus », insiste le Dr Balako, soulignant que près de 60 % des jeunes formés par sa structure exercent déjà une activité rémunérée saisonnière ou permanente.
Dans une ville où le taux de chômage des 15-34 ans flirte régulièrement avec les 40 %, l’enjeu est d’importance. Les observateurs du secteur estiment que l’introduction de modules de gestion financière élémentaire et de marketing digital constitue un catalyseur de réussite pour de jeunes porteurs de projet souvent dépourvus de capital social formel. C’est sur cette niche que se positionne la fondation, tout en veillant à calibrer son discours pour éviter la dissonance entre promesse et réalité.
Le défi spécifique des jeunes femmes
L’une des particularités de la « Team Dr Balako Liyanza » réside dans le ciblage explicite des jeunes filles. L’organisation rappelle que les obstacles auxquels se heurtent les aspirantes entrepreneures – accès au crédit, légitimité sociale, sécurité des espaces de travail – exigent des réponses différenciées. D’où la mise en place de sessions de mentorat exclusivement féminines et l’introduction de micro-bourses destinées à couvrir les frais initiaux de création d’activité.
Cette approche genrée, encore peu répandue dans les programmes congolais, s’appuie sur un constat statistique : une femme qui lance une unité de production ou de services emploie, en moyenne, 1,4 personne supplémentaire au bout de deux ans, soit un multiplicateur d’impact souvent supérieur à celui observé chez les micro-entreprises masculines. Le pari de la fondation consiste ainsi à enclencher un cercle vertueux où inclusion économique rime avec stabilité sociale.
Un agenda écologique et sanitaire
Si l’on connaît le médecin pour son stéthoscope, on découvre un militant pour la résilience climatique. La fondation articule en effet ses ateliers d’entrepreneuriat avec des modules de sensibilisation aux phénomènes d’érosion qui affectent les quartiers périphériques de Kinshasa. L’objectif est double : prévenir les risques environnementaux et identifier des niches d’affaires dans le recyclage des déchets plastiques ou la production de briques écologiques.
Sur le volet sanitaire, des campagnes mobiles de dépistage et de vaccination sont régulièrement couplées aux formations, offrant un service de proximité dans des zones parfois sous-dotées en infrastructures de santé. Cette transversalité se veut le signe qu’« une économie inclusive ne saurait prospérer sur une population fragile », selon les termes de la coordination médicale du projet.
Entre politique et société civile
La trajectoire personnelle du Dr Balako, membre du Mouvement de Libération du Congo, place inévitablement la fondation à la croisée de l’engagement citoyen et de la scène partisane. Celui qui exhorte les jeunes « à s’affirmer et à s’investir pleinement dans la vie publique » revendique une filiation idéologique avec la génération qui porta l’indépendance congolaise.
Pour autant, l’organisation veille à conserver une posture de neutralité opérationnelle afin de sécuriser ses partenariats institutionnels, qu’ils proviennent d’agences publiques ou de bailleurs internationaux. Les observateurs y voient un exercice délicat d’équilibrisme, caractéristique des initiatives où la légitimité communautaire doit cohabiter avec la prudence diplomatique.
Perspectives transfrontalières
Ambitionnant d’étendre ses actions à l’ensemble du territoire national, la fondation n’écarte pas l’idée d’une coopération avec Brazzaville, son voisin de l’autre rive du fleuve. Les échanges économiques entre les deux capitales jumelles offrent un terrain d’expérimentation propice pour les jeunes pousses qui maîtriseront les codes administratifs des deux Congo.
Dans un contexte régional où les gouvernements multiplient les appels à l’entrepreneuriat comme solution de premier rang à la précarité, l’initiative de la Team Dr Balako Liyanza pourrait constituer une vitrine de bonnes pratiques. Reste la question de la pérennisation : trouver la bonne articulation entre financements durables, gouvernance transparente et appropriation communautaire. C’est à ce triptyque que sera jaugée, dans les prochaines années, la capacité de la fondation à transformer la ferveur initiale en dynamique structurante pour l’économie congolaise.