Un premier trimestre sous de bons auspices
Réunis à Brazzaville le 14 juillet 2025, les membres du Comité national économique et financier ont dressé un tableau nuancé mais globalement encourageant de la conjoncture. La poursuite des investissements pétroliers conjuguée au dynamisme mesuré du secteur hors hydrocarbures a généré un surplus budgétaire et alimenté une expansion de la masse monétaire. Dans une économie encore marquée par la volatilité des marchés de l’or noir, la consolidation d’un excédent budgétaire suscite naturellement un regain de confiance, tout en invitant à une vigilance méthodique.
Inflation, le grain de sable à surveiller
Cette embellie macroéconomique ne masque pas la poussée des prix à la consommation. Estimée à 3,5 % en moyenne annuelle pour l’exercice en cours, l’inflation franchirait le seuil communautaire fixé par la CEMAC. La hausse des coûts des intrants importés et les intermittences dans l’approvisionnement électrique exercent une pression diffuse sur les ménages urbains. « Le défi consiste désormais à préserver le pouvoir d’achat sans brider la relance », souligne un cadre du ministère du Plan, insistant sur la nécessité d’actions coordonnées entre politique budgétaire et outil monétaire.
Crédit bancaire : des signes d’assainissement
Le système bancaire congolais confirme de timides signaux de normalisation. Au 31 mars 2025, l’encours des crédits bruts à la clientèle affiche une progression de 3,3 % pour atteindre 1 647 milliards de francs CFA. Parallèlement, les créances en souffrance reculent de 1,3 %, témoignant d’une gestion plus rigoureuse du risque. Selon un analyste de la BEAC, l’atténuation du portefeuille non performant « renforce la capacité des banques à soutenir les entreprises innovantes, condition essentielle à la diversification de l’économie ».
Marché des titres publics en mutation
Le marché des valeurs du Trésor enregistre une transformation discrète mais significative. Bien que les adjudications aient vu leurs besoins s’alléger de 22,37 % depuis le début de l’année, l’encours global s’établit à 2 528,14 milliards de francs CFA, en hausse annuelle de 6,90 %. À l’instar des autres États de la zone, Brazzaville privilégie des maturités plus longues, gage d’une gestion soutenable de la dette. La création d’un cadre permanent de concertation entre le Trésor public et ses spécialistes en valeurs du Trésor devrait, selon le CNEF, « favoriser la fluidité des émissions et renforcer la confiance des investisseurs régionaux ».
Réformes fiscales régionales en toile de fond
Lors de la séquence de Libreville en juin 2025, les Trésors publics de la CEMAC ont convergé vers une stratégie commune : élargir l’assiette fiscale, réduire les niches et digitaliser la collecte. Le ministre des Finances, Christian Yoka, insiste sur « l’urgence d’arrimer le dispositif national aux standards internationaux ». La mise en œuvre du compte unique du Trésor, pierre angulaire de la transparence budgétaire, s’accélère. À terme, la rationalisation des dépenses fiscales et la migration progressive du secteur informel vers le secteur formel devraient améliorer l’équité contributive et soutenir la résilience de l’État face aux chocs exogènes.
Entre optimisme et réalisme, quel cap pour 2025 ?
Les projections de la BEAC tablent sur un taux de croissance réel de 1,8 % en 2025, contre 1,5 % l’an passé. Ce différentiel modeste rappelle la lenteur inhérente aux transformations structurelles. Les décideurs misent sur une progression graduelle, soucieuse de maintenir la soutenabilité de la dette tout en finançant les infrastructures stratégiques. Dans les rues de Brazzaville, entrepreneurs et jeunes diplômés guettent les répercussions tangibles de ces indicateurs sur l’emploi et les revenus. La modération affichée par le CNEF apparaît ainsi moins rhétorique que pragmatique : il s’agit de préserver l’équilibre entre ambition et prudence, afin que la lueur d’espoir évoquée lors de la réunion se traduise en bénéfices palpables pour la population.