La capitale réveille ses mollets
À l’aube brumeuse du 26 juillet, le bitume du rond-point de la République a résonné d’un pas régulier et résolu : plus d’une cinquantaine de membres de l’Association Lheyet-Gaboka pour le développement, flanqués de sympathisants vêtus aux couleurs de la structure, ont entrepris de parcourir la ville. Dans une cité où l’agenda urbain se mesure souvent à la densité du trafic routier, l’irruption de cette colonne pédestre a attiré un regard amusé mais bienveillant des habitants qui, pour beaucoup, redécouvrent les vertus simples du mouvement. « Nous voulons rappeler que le corps est notre première infrastructure », a soufflé, mi-sourire mi-sueur, Axel Ariel Dinghat Mouenokanga, le président national de l’ALGD.
Un itinéraire aux accents patrimoniaux
Le tracé choisi n’a rien laissé au hasard : du quartier Bacongo jusqu’à Ouenzé, la marche a relié des lieux fortement chargés de symboles. Du Jardin des droits de l’homme au boulevard Denis-Sassou-Nguesso, les participants ont ainsi inscrit leur démarche dans un paysage civique, ponctué par l’état-major des Forces armées congolaises et la mairie centrale. « Chaque carrefour rappelle un pan de notre histoire commune », a analysé Martin Ibaïbé, vice-président de l’association, voyant dans le choix de ce parcours un subtil exercice de pédagogie urbaine. En chemin, les marcheurs ont salué la façade néoclassique du Trésor public, longeant la place “Plus jamais ça”, avant de conclure leur périple rue Enyellé, au siège de l’ALGD, non loin du mythique club Étoile du Congo.
Le sport, colonne vertébrale de la santé publique
Si la convivialité a, de toute évidence, nourri l’événement, l’objectif sanitaire demeure en toile de fond. Selon les données du ministère de la Santé, près d’un adulte congolais sur trois présente un facteur de risque cardiovasculaire évitable. Face à cette statistique éloquente, l’ALGD mise sur une pédagogie par l’exemple : dix kilomètres d’effort modéré équivalent à environ 600 calories dépensées et, surtout, à un signal psychologique fort envoyé à une jeunesse parfois gagnée par la sédentarité numérique. « Nous refusons de laisser l’écran dicter notre posture », a insisté Axel Ariel Dinghat Mouenokanga, rappelant que l’Organisation mondiale de la santé recommande au moins 150 minutes d’activité physique hebdomadaire pour les adultes.
Convergence avec les ambitions nationales
En inscrivant sa marche dans le calendrier estival, l’ALGD rejoint de facto l’orientation donnée par le Plan national de développement sanitaire, lequel prône un renforcement de la prévention communautaire. Le boulevard Denis-Sassou-Nguesso, traversé par les marcheurs, a symboliquement fait écho aux programmes de modernisation urbaine portés par les autorités, où l’aménagement d’espaces publics propices à la pratique sportive figure en bonne place. Interrogé sur cette concordance, un responsable municipal présent en observateur a salué « une initiative qui complète l’action publique et démontre la maturité de la société civile ». Une façon de souligner qu’au Congo-Brazzaville l’engagement associatif n’est plus perçu comme marginal, mais comme un partenaire objectif de la dynamique gouvernementale.
Vers un agenda culturel et sportif élargi
La marche du 26 juillet s’inscrit dans une programmation plus vaste : tournoi de football déjà tenu, journée portes ouvertes annoncée en hommage à Maurice Lheyet Gaboka, figure tutélaire d’un développement endogène. À en croire les organisateurs, il ne s’agit pas de multiplier les événements pour la simple beauté du geste, mais de créer une « révolution douce » dans les habitudes de loisirs d’une jeunesse brazzavilloise avide de repères collectifs. En confiant la bande-son de la marche à une formation locale et en invitant des joueurs de l’équipe AJ Auxerre, l’ALGD a joué la carte de la transversalité : allier sport, culture et récit identitaire afin de stimuler un sentiment d’appartenance qui transcende les arrondissements. À l’heure où le pays consolide sa cohésion sociale, la métaphore du pas synchronisé résonne comme un message limpide : avancer ensemble reste le plus sûr moyen de couvrir la distance.