Un partenariat transcontinental au service de l’autonomie
Le foisonnement urbain de Brazzaville résonne depuis peu d’une ambition nouvelle : faire de l’autonomie économique des personnes vivant avec handicap un levier de croissance partagée. Porté par l’Union européenne et la Conférence épiscopale d’Italie, le programme « Une approche inclusive du handicap » épouse les contours de la diplomatie solidaire, associant l’ONG italienne Comunità Sviluppo e Promozione (CPS) et le Groupement des intellectuels et des ouvriers handicapés du Congo (Giohac).
Quarante apprenants, sélectionnés pour la diversité de leurs profils scolaires, ont été placés au cœur d’un dispositif que l’ambassadeur d’Italie, Enrico Nunziata, qualifie de « pont entre talents différenciés et compétitivité économique ». L’objectif est limpide : doter ces citoyens de compétences entrepreneuriales susceptibles de convertir la résilience individuelle en valeur ajoutée collective.
Des modules façonnés sur mesure pour chaque profil
La formation, dispensée par l’Agence nationale de valorisation des résultats de la recherche et de l’innovation (ANVRI), s’articule autour de sept modules allant du management à la gestion financière, sans éluder le marketing numérique ni les technologies de l’information. « Quatre-vingts pour cent des contenus sont iconographiques afin de garantir une compréhension optimale », précise Rivanelle Missolékélé Mpidy, chef de projet à l’ANVRI.
Le format, deux jours par semaine et trois séances d’une heure, s’adapte aux rythmes biologiques souvent contraints des bénéficiaires. Une évaluation triptyque – diagnostique, formative et sommative – balise le parcours pour ajuster la pédagogie au fil de l’eau et inscrire la progression dans des résultats mesurables.
L’écosystème local mobilisé autour de l’ANVRI
Au-delà des salles climatisées de la cité scientifique, le projet irrigue l’écosystème urbain. Artisans, incubateurs et microfinanceurs brazzavillois ont été conviés à des sessions d’échanges destinées à préparer l’après-formation : accès au crédit, réseautage et mentorat. Cette capillarité répond à un constat partagé par les acteurs du développement : l’inclusion ne saurait se réduire à un transfert de compétences si elle n’est pas adossée à un marché, à des chaînes d’approvisionnement et à une culture entrepreneuriale inclusive.
Dans les rues de Poto-Poto comme sur les rives du fleuve Congo, plusieurs diplômés des précédentes cohortes témoignent déjà d’un changement de paradigme. À l’image de cette couturière devenue référence jusqu’en France, les success stories locales consolident la narration d’une ville qui se veut laboratoire d’un capitalisme social africain.
Le rôle catalyseur de l’État et de ses partenaires
Le ministre des Affaires sociales, Irène Marie Cécile Mboukou-Kimbatsa, a rappelé l’alignement du programme sur le dispositif national de filets sociaux, abondé par l’État pour soutenir les micro-initiatives génératrices de revenus. « Il n’y a pas d’âge ni de condition pour apprendre, le handicap ne doit pas constituer un obstacle », a-t-elle martelé, invitant les bénéficiaires à saisir l’opportunité pour « gagner leur autonomie ».
Du côté de la Recherche scientifique, le ministre Rigobert Maboundou souligne la cohérence avec le Plan national de développement et le projet de société du chef de l’État, Denis Sassou Nguesso, qui consacre un chapitre à l’autonomisation des personnes différemment habiles. L’État congolais, à travers ces interventions convergentes, assume une fonction de catalyseur, agrégeant les financements extérieurs à une vision endogène de l’inclusion.
Regards croisés sur l’impact social attendu
Sociologues du travail, économistes du développement et associations de défense des droits des personnes handicapées s’accordent : la réussite de cette promotion pourrait induire un effet domino, d’autant que 120 autres apprenants sont actuellement en formation dans des métiers manuels. L’inclusion, rappelle la coordinatrice du projet Ermelinda Onda, « n’est pas une faveur mais un droit ». L’initiative vise par conséquent à démystifier le handicap sur le marché du travail, à déplacer le regard du stigmate vers la compétence.
À moyen terme, les organisateurs misent sur la création de micro-entreprises capables de générer des emplois additionnels, contribuant ainsi au dynamisme urbain et à la diversification économique prônée par les autorités. Au crépuscule de la formation, les barrières sociales pourraient céder la place à une cartographie élargie des opportunités où talents singuliers et innovation sociale convergent dans l’intérêt général de la nation.