Brazzaville mise sur l’ODD 4 : cap 2030
Dans un hémicycle que l’on dit parfois trop silencieux sur les questions sociales, la séance du 29 juillet dernier a résonné d’une ferveur pédagogique inédite. Porté par la houlette du président Isidore Mvouba, le séminaire de renforcement des capacités consacré à l’éducation, organisé avec le concours actif de l’Unesco, a emboîté le pas à l’Agenda 2030 des Nations unies. Objectif proclamé : arrimer sans délai le Congo au wagon de l’ODD 4, celui qui promet une éducation de qualité, inclusive et équitable.
Sous le regard bienveillant de la représentante résidente de l’organisation onusienne, Fatoumata Barry Marega, les parlementaires ont confronté chiffres, réalités de terrain et impératifs budgétaires. « Il reste cinq années pour traduire l’ambition en décisions courageuses », a-t-elle martelé, soulignant la fenêtre stratégique dont dispose la chambre basse pour jouer un rôle d’accélérateur réglementaire.
Une feuille de route parlementaire en gestation
À l’issue des travaux, une matrice d’actions graduées a vu le jour. Elle prévoit la constitution d’un groupe parlementaire ad hoc chargé du suivi et de l’évaluation continue de l’ODD 4. Les députés entendent, selon leur communiqué final, « mener un plaidoyer structuré pour l’adoption rapide de la nouvelle loi d’orientation scolaire ». Cette promesse, loin d’un simple effet d’annonce, se veut la clef de voûte d’un cadrage normatif davantage aligné sur les standards internationaux.
En filigrane, la future alliance parlementaire devra également veiller à l’intégration systématique des cibles 4.7 dans toute révision législative : éducation au développement durable, citoyenneté mondiale, santé et bien-être, sans omettre la lutte contre les violences basées sur le genre. « Notre jeunesse a besoin de repères et non de slogans », a rappelé le premier vice-président Léon Alfred Opimbat, redessinant ainsi le périmètre de responsabilité des élus.
Budget, législation et contrôle : les leviers d’action
La question budgétaire, nerf de la guerre éducative, a occupé le centre de la table. Les États généraux de l’éducation avaient déjà recommandé un plancher de 25 % des dépenses publiques consacré au secteur. Désormais, les députés promettent de faire de ce ratio non plus un souhait, mais un impératif inscrit dans la loi de programmation budgétaire en cours de validation. L’opération est d’envergure : il s’agira de conjuguer rigueur financière et équité territoriale pour désenclaver les écoles des zones rurales autant que moderniser les établissements urbains.
Outre le pouvoir d’allocation, l’Assemblée revendique son statut de contrôleur de l’action gouvernementale. Exiger des bilans réguliers, auditionner les ministres concernés, évaluer la traçabilité des fonds – autant de mécanismes déjà prévus par le règlement intérieur, mais qui gagnent en pertinence à la lumière des ODD. Abdourahamane Diallo, coordonnateur résident de l’ONU, a d’ailleurs encouragé les élus à « faire de chaque question orale un jalon vers un avenir résilient ».
Voix d’experts et appels à la mobilisation
L’Unesco, fort de son expertise, s’est engagée à poursuivre la formation semestrielle des parlementaires sur des problématiques ciblées : alphabétisation des filles, numérique éducatif, résilience face aux crises sanitaires. En parallèle, le Rapport mondial de suivi de l’éducation fera l’objet d’une synthèse annuelle transmise directement aux commissions concernées. « Nous voulons que la donnée statistique devienne le cœur de la décision », a insisté Fatoumata Barry Marega.
Sur le terrain, la dynamique s’annonce horizontale : les descentes parlementaires devront désormais comporter un volet de sensibilisation communautaire. De Mindouli à Impfondo, chaque député est appelé à devenir, dixit Léon Alfred Opimbat, « un ambassadeur des bonnes pratiques scolaires ». Une stratégie qui consonne avec le souhait du chef de l’État, régulièrement exprimé, de placer la jeunesse au centre du projet national de développement.
Quel impact pour la jeunesse congolaise ?
La nouvelle feuille de route ouvre des perspectives concrètes pour les apprenants. En premier lieu, l’adoption attendue de la loi d’orientation scolaire devrait clarifier l’architecture des cycles, encourager la diversification des filières techniques et sécuriser davantage les parcours des élèves vulnérables. Ensuite, l’accroissement programmé du budget laisse espérer une amélioration tangible des infrastructures : salles de classe ventilées, laboratoires fonctionnels et réseaux numériques interconnectés.
Plus symboliquement, l’initiative confirme la place stratégique de l’éducation dans le pacte social congolais. Elle réhabilite le Parlement comme forum de solutions, capable de dépasser l’approche déclarative pour épouser une logique de résultats. À cinq ans de l’échéance 2030, le chronomètre tourne, mais l’élan est bel et bien enclenché. Entre rigueur budgétaire et solidarité nationale, le Congo-Brazzaville s’affirme discret mais constant dans sa marche vers une école mieux préparée aux défis du siècle.