Une reconduction sous le sceau de la stabilité
À l’ombre des grands arbres du quartier Ouenzé, dans le nord de Brazzaville, la nouvelle est tombée comme une évidence : Victor Magloire Nganguia conserve la présidence de la section football de Saint Michel de Ouenzé. L’assemblée générale convoquée le 30 juillet par le président général de l’institution, le ministre Juste Désiré Mondelé, a choisi la continuité au terme d’une saison dense où le club a certes manqué la montée, mais a consolidé ses fondations sportives et financières.
Dans un environnement footballistique congolais souvent marqué par des changements de dirigeants à un rythme saisonnier, cette reconduction symbolise une volonté de sérénité. « Nous avons privilégié la solidité d’un projet sur les postures d’un soir », glisse un membre du comité des sages, rappelant que l’identité de Saint Michel s’est toujours nourrie d’une influence catholique portée sur la durée et le travail bien fait.
Un bureau exécutif rajeuni et responsabilisé
La confiance renouvelée à Victor Magloire Nganguia s’accompagne d’un profond rééquilibrage interne. Les nominations de Serge Mondélé Mbouma et d’Alexis Ngatsé aux postes de vice-présidents illustrent un pari générationnel : ces quadragénaires ont grandi avec les exploits de Saint Michel dans les années 1990 et entendent reconnecter le club avec cette culture de la gagne.
Au secrétariat général, Dieudonné Bakolo et Bienvenu Pinot Ngatsé héritent d’un impératif de modernisation administrative. Les dirigeants veulent numériser la billetterie et fiabiliser la base de données des supporters, signe d’un aggiornamento exigeant dans un championnat où la transparence financière est devenue un critère majeur pour la Fédération congolaise de football association. Freddy Jourdain Letembet Zhald, nouveau trésorier, sait qu’il sera jugé sur sa capacité à sécuriser les partenariats privés sans diluer l’identité populaire du club.
Objectifs sportifs : retour en élite et conquête de la Coupe
Le discours du président général, mesuré mais ferme, fixe le cap : accession en première division et victoire en Coupe du Congo. Le technicien Kevin Ngimpio, promu entraîneur principal, en est conscient ; il devra transformer la frustration de la dernière campagne, achevée en quart de finale, en moteur de performance. « Notre marge de progression est réelle, encore faut-il l’exploiter avec un collectif discipliné », explique-t-il. Son adjoint Sidoine Beaullia, réputé pour son travail de terrain auprès des jeunes du quartier, s’est vu confier la mission de fluidifier le passage entre l’académie et l’équipe fanion.
Sur le papier, l’ambition paraît élevée, mais elle se fonde sur un constat : les statistiques de la ligue prouvent que les clubs promus ces quatre dernières saisons se maintiennent en moyenne à 58 % lorsqu’ils disposent d’un staff technique stable. Saint Michel veut capitaliser sur ce paramètre tout en s’appuyant sur la ferveur de Ouenzé, où chaque rencontre attire jusqu’à quatre mille spectateurs, un record dans l’antichambre de l’élite.
Les défis structurels d’un club urbain ambitieux
La stabilité obtenue dans les urnes internes ne gomme pas les réalités économiques. La rénovation partielle du stade Alphonse-Massamba-Débat limite encore la disponibilité des créneaux d’entraînement, et les sessions doivent parfois migrer vers des terrains périphériques, suscitant des frais logistiques non négligeables. Dady Tavarez Loubayi, intendant promu, indique que « le parc automobile du club sera renouvelé d’ici à octobre afin de réduire les temps de déplacement et ménager les joueurs ».
Sur le plan médical, le préparateur physique Daudet Koumou plaide pour un protocole de récupération plus strict, après une saison marquée par neuf blessures musculaires, un chiffre supérieur de 15 % à la moyenne de la division. L’acquisition d’un caisson de cryothérapie, en discussion avec un partenaire sud-africain, témoigne d’une volonté d’investir dans la performance, un champ jusqu’ici réservé aux clubs de l’élite.
Regards croisés d’experts sur le modèle Saint Michel
Jean-Baptiste Mabiala, analyste sportif à Radio Congo, souligne que « la démarche de Saint Michel tranche avec l’attentisme observé ailleurs ; elle repose sur la formation et une gouvernance identifiée, valeurs que la Fédération souhaite promouvoir ». Pour l’universitaire Clarisse Ngoma, spécialiste de sociologie du sport, la dimension citoyenne n’est pas à négliger : « Dans un quartier à forte densité démographique, le club joue un rôle de régulation sociale, canalisant les énergies juvéniles vers la pratique physique plutôt que vers l’oisiveté. »
Les partenaires économiques saluent également le positionnement. Un cadre de la Banque Postale du Congo, sous couvert d’anonymat, confirme que l’institution discute d’un naming partiel des installations d’entraînement en échange d’un programme d’inclusion financière des supporters. Ce type d’alliances inédites pourrait renforcer l’attractivité du championnat national, alignant ainsi le projet Saint Michel sur la feuille de route de professionnalisation soutenue par les autorités sportives.
Cap sur la saison : le calendrier de la montée
La préparation d’avant-saison débutera le 15 août avec un stage fermé à Kintélé, site choisi pour la qualité de ses infrastructures héritées des Jeux africains. Une série de matches amicaux contre l’AS Otohô et Diables Noirs doit permettre d’éprouver les recrues annoncées, dont trois attaquants identifiés au Cameroun et en République démocratique du Congo.
Pour témoigner de la détermination générale, Victor Magloire Nganguia conclut sur ces mots : « Nous devons faire honneur à Ouenzé et rappeler que l’histoire de ce club est faite de conquêtes, pas d’attentes. » Les supporters, eux, se préparent déjà à draper les artères de la capitale de jaune et de noir, convaincus que la reconduction de leur président est le premier pas vers un retour parmi les géants du football congolais.