Le Sénat entérine un nouveau jalon de la diplomatie économique
Réunis en séance plénière dans l’hémicycle de la place de la République, les sénateurs ont voté, quasi à l’unanimité, la loi autorisant la ratification de la convention fiscale conclue entre la République du Congo et la République de Turquie. Le texte, amendé sur la forme mais conservé dans son essence, s’inscrit dans une dynamique déjà amorcée avec la France, la Chine ou encore le Rwanda. « C’est un acte de souveraineté assumée qui démontre la constance de notre ouverture au monde », a déclaré le président de la commission des finances, saluant la qualité de l’instrument juridique soumis par l’Exécutif.
Renforcer l’attractivité du territoire et sécuriser la recette publique
Prenant la parole au nom du gouvernement, le ministre de l’Économie, du Plan et de l’Intégration régionale, Ludovic Ngatsé, a mis en avant la fonction stratégique de la convention : « Elle écarte le spectre de la double imposition qui, souvent, dissuade les opérateurs internationaux et bride la compétitivité de nos entreprises nationales. » Concrètement, le dispositif encadre les revenus des personnes physiques, les bénéfices des sociétés, les dividendes, les intérêts et les revenus fonciers. En contrepartie, une clause de non-discrimination garantit aux investisseurs turcs le même traitement fiscal qu’aux contribuables congolais, tout en préservant la faculté de l’État à mobiliser des ressources pour ses politiques publiques.
Un appui décisif pour le PND 2022-2026 et les grands chantiers
Le ministre en charge de la Coopération internationale, Denis Christel Sassou Nguesso, a rappelé que le Plan national de développement 2022-2026 requiert plus de 6 500 milliards de francs CFA d’investissements, dont une part substantielle doit provenir de partenaires extérieurs. Selon lui, le texte ratifié constitue « un levier attendu pour diversifier nos sources de financement, fluidifier les flux de capitaux et consolider la mise en œuvre des projets structurants dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures et de l’agro-industrie ». L’accord avec Ankara vient ainsi conforter la stratégie de mobilisation de ressources qui combine emprunts, partenariats public-privé et apports en capitaux propres.
Des garanties de transparence et de coopération administrative
Au-delà de la suppression de la double imposition, la convention prévoit des mécanismes d’échange d’informations et d’assistance au recouvrement des créances fiscales. Un tel arsenal répond aux standards de l’OCDE en matière de lutte contre l’évasion et l’érosion des bases taxables. Les parlementaires se sont montrés attentifs à ces dispositions, conscients qu’une crédibilité fiscale solide demeure un signal positif envoyé aux marchés. « Le texte renforce nos capacités de contrôle, tout en respectant la confidentialité exigée par les investisseurs », a estimé un sénateur de la majorité, soulignant le caractère équilibré de l’instrument.
Secteur privé congolais : des attentes mesurées mais réelles
Du côté des milieux d’affaires brazzavillois, l’engouement est teinté de pragmatisme. Plusieurs entrepreneurs saluent la possibilité d’optimiser leurs structures de coûts et d’accéder plus facilement au marché turc, réputé pour son expertise dans la construction, la logistique et les énergies renouvelables. Un dirigeant d’une PME locale confie toutefois qu’« une convention, si solide soit-elle, ne remplacera pas la nécessité de procédures administratives simples et de délais de paiement maîtrisés ». Les autorités assurent travailler à l’amélioration continue du climat des affaires, comme en témoigne la récente simplification du Registre du commerce et du crédit mobilier.
Perspective régionale et portée symbolique de l’accord
En tissant cette toile fiscale multilatérale, le Congo se positionne progressivement comme une plate-forme régionale de services financiers. La convention avec Ankara pourrait également servir de modèle aux négociations menées dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine, où la question de la fiscalité internationale reste ouverte. « Nous voulons que Brazzaville devienne un hub pour les capitaux en Afrique centrale, sans pour autant renoncer à nos prérogatives régaliennes », assure une source au ministère des Finances.
Entrée en vigueur et prochains rendez-vous législatifs
La convention entrera en vigueur après l’échange des instruments de ratification, procédure essentiellement protocolaire qui devrait intervenir avant la fin de l’année. D’ici là, l’administration fiscale congolaisse attèle à élaborer les textes d’application destinés à guider les contribuables et à former les agents chargés du contrôle. Les observateurs noteront que le gouvernement poursuit en parallèle des pourparlers similaires avec d’autres partenaires du Moyen-Orient et d’Asie, démontrant ainsi la cohérence d’une stratégie orientée vers la diversification des partenariats et la sécurisation durable des recettes publiques.
Une économie nationale mieux arrimée aux standards internationaux
L’adhésion à des conventions fiscales bilatérales modernes constitue, pour Brazzaville, un gage de sérieux vis-à-vis des investisseurs institutionnels et des agences de notation. En se dotant d’outils conformes aux meilleures pratiques internationales, le Congo affirme son ambition de concilier ouverture économique et souveraineté budgétaire. Les prochaines évaluations d’impact, annoncées par le ministre Denis Christel Sassou Nguesso, permettront de quantifier l’effet de levier attendu sur la croissance et l’emploi, ouvrant la voie à d’éventuelles révisions ciblées du dispositif afin d’en maximiser la portée.