Un tournoi enraciné dans le quotidien brazzavillois
Au cœur du cinquième arrondissement de Brazzaville, Ouenzé, le tournoi « Ouenzé Lisanga » s’est imposé, au fil de quinze éditions, comme un rendez-vous attendu des vacances scolaires. Né de la volonté du député Juste Désiré Mondelé de conjuguer sport et cohésion locale, l’événement mobilise chaque été les artères populaires, où les terrains de fortune se transforment en véritables stades. L’objectif initial – offrir un cadre structuré aux amateurs de football de rue – répond aux orientations nationales de promotion de la jeunesse et des loisirs en période estivale, rappelées à plusieurs reprises par les autorités sportives congolaises.
Durant trois semaines, seize équipes issues exclusivement de Ouenzé ont croisé le fer sur trois sites emblématiques du quartier. Le format court, pensé pour maintenir une intensité maximale, permet d’alimenter un engouement continu dans la population riveraine, qui suit les rencontres comme on suit un feuilleton. Des marchands ambulants aux retraités attablés, chacun trouve dans ce tournoi un motif de rassemblement, réactualisant l’esprit de solidarité que cultive depuis toujours le poumon populaire de Brazzaville.
La demi-finale, un condensé d’émotions sportives
La journée du 7 août a consacré les deux formations les plus résilientes de l’édition. Dans un premier acte serré, AS Elongwa Posso a trouvé l’ouverture face à Mounganga grâce à la vista de son capitaine, libérant les clameurs d’une tribune improvisée mais bouillonnante. « Nous avions travaillé nos phases arrêtées à l’entraînement et cela a payé », confiait à chaud l’entraîneur de la formation, conscient que la moindre erreur aurait coûté son billet pour la finale.
Le second duel a offert un suspense théâtral où Frangama et FC Maroc se sont neutralisés jusqu’aux tirs au but. La tension palpable s’est muée en euphorie lorsque le gardien de FC Maroc a détourné la dernière tentative adverse, scellant un 4-3 mémorable. « Ces jeunes me rappellent le parfum des après-midi poussiéreux qui ont forgé notre génération », a commenté l’ancien Diable Rouge Chaleur Mouyabi, présent en bord de terrain pour encourager la relève.
Une fabrique de cohésion sociale soutenue par les pouvoirs publics
Au-delà de la performance pure, « Ouenzé Lisanga » s’inscrit dans une dynamique de politique publique en faveur de l’épanouissement citoyen. Les services municipaux ont facilité la sécurisation des espaces de jeu, tandis que la direction départementale des Sports a mis à disposition un encadrement médical minimal mais indispensable. Cette synergie illustre la place que le gouvernement entend réserver à la jeunesse dans la consolidation du vivre-ensemble et dans la prévention des déviances dont les vacances peuvent parfois être le terreau.
Le député organisateur souligne que le tournoi s’articule avec la stratégie nationale de professionnalisation du football de base. En parrainant l’événement, il espère voir naître des vocations capables d’alimenter un jour la Ligue 1 locale, voire la sélection nationale. Les sponsors de proximité, commerces et petites entreprises du quartier, renforcent ce maillage institutionnel, donnant au public le sentiment que chaque faction de la société contribue à l’élévation du sport roi.
Enjeu pour les jeunes talents, horizon pour le football congolais
La finale du 12 août, qui opposera AS Elongwa Posso à FC Maroc, promet une confrontation de styles : la rigueur défensive et l’organisation collective pour les premiers, la créativité en transition rapide pour les seconds. Plus que le trophée, c’est la visibilité offerte qui nourrit l’appétit des joueurs. Des recruteurs de clubs de la capitale ont d’ores et déjà annoncé leur présence, conscients que la pépinière de Ouenzé demeure fertile.
Dans un contexte continental où la valeur marchande des talents africains ne cesse de croître, pareilles compétitions constituent une vitrine stratégique. Le ministère des Sports, qui encourage la multiplication des tournois de quartier, y voit un incubateur naturel susceptible de soutenir à moyen terme la renaissance des championnats nationaux. À l’échelle individuelle, chaque contrôle, chaque tacle et chaque jubilation rappelle aux gradins qu’une trajectoire d’ascension sociale est encore possible par le foot, pour peu que les opportunités ne se raréfient pas.
Ainsi, et sans perdre sa spontanéité originelle, « Ouenzé Lisanga » se révèle bien plus qu’une distraction saisonnière : il est un laboratoire où se forge chaque été l’espoir d’un football congolais conquérant, enraciné dans sa base populaire mais tourné vers un horizon professionnel désormais tangible.