Chronologie de la contestation
A l’aube du 16 août 2025, les projecteurs se braquent sur la Fédération congolaise de handball, où l’Assemblée générale élective pourrait être suspendue in extremis. La Chambre de conciliation et d’arbitrage du sport doit entendre une requête urgente déposée par le candidat évincé Avicenne Nzikou.
Cinq jours auparavant, le même camp avait déjà sollicité la CCAS contre le Comité national olympique et sportif congolais, cherchant à faire exécuter une sentence du 13 octobre 2024. Le juge avait alors invité le requérant à « mieux se pourvoir », ouvrant une brèche procédurale.
La requête de dernière minute
Le 15 août, l’avocat Me Eric Ibouanga a ravivé le dossier en contestant la légalité de la Commission électorale indépendante mise en place par la FECOHAND. Selon lui, cette structure contreviendrait encore à la décision d’octobre 2024, faisant planer un doute sur la régularité du corps électoral.
La CCAS, invoquant le principe du contradictoire, a fixé l’audience à l’aube même du scrutin. « Le juge n’a pas d’heure pour statuer en urgence », rappelle Me Ibouanga, persuadé que la suspension provisoire protégerait toutes les parties d’un irréparable vice de procédure.
Silence du CNOSC
Convoqué par le juge, le CNOSC ne s’est pas présenté, a indiqué le conseil de Nzikou. Ce silence institutionnel alimente les spéculations sur une volonté de laisser l’assemblée se tenir malgré les recours, alors que la FECOHAND souhaite clore un cycle électoral déjà prolongé.
Pour l’heure, aucune communication officielle du Comité olympique n’est venue éclairer la position de l’organe faîtier du sport congolais. Certains juristes y voient une simple stratégie procédurale permettant au CNOSC de préserver sa neutralité jusqu’à la décision, tout en évitant d’influencer publiquement le débat.
Enjeux sportifs et financiers
Au-delà de la bataille judiciaire, les clubs craignent un ralentissement du calendrier national. Plusieurs équipes préparent la Coupe d’Afrique des clubs champions et redoutent l’absence d’une gouvernance stable pour valider les licences, négocier les sponsors et sécuriser les budgets de déplacement.
Le trésorier d’un club de Brazzaville confie, sous anonymat, que chaque report entraîne des pertes quotidiennes. « Nos athlètes sont en congé forcé, les partenaires privés hésitent », explique-t-il, rappelant que la discipline séduit déjà moins d’annonceurs que le football ou le basket.
Le point de vue des candidats
Le président sortant, dont la candidature a été validée, soutient que la CEI a respecté les textes. « Nous avons tenu compte des recommandations du CNOSC et de l’IHF », affirme son directeur de campagne, persuadé que la continuité institutionnelle garantit la participation du Congo aux tournois internationaux.
Face à lui, le camp Nzikou revendique une égalité de traitement. « Notre liste a été écartée pour des motifs purement administratifs alors que d’autres ont bénéficié de délais supplémentaires », avance la candidate vice-présidente, promettant de respecter la décision de la CCAS tout en défendant « la démocratie sportive ».
Scénarios possibles pour le scrutin
Si la CCAS ordonne la suspension, la FECOHAND devra soit reporter le scrutin, soit réouvrir la phase de candidatures. Certains analystes estiment qu’une nouvelle fenêtre électorale en septembre permettrait d’apaiser les tensions, quitte à prolonger la transition administrative d’un mois supplémentaire.
Si, au contraire, le juge rejette la demande, l’assemblée pourra se tenir dans la foulée, sous réserve de l’arrivée des délégués de Pointe-Noire et de l’intérieur. Une issue rapide offrirait une visibilité bienvenue aux sponsors, mais accentuerait le sentiment d’injustice dans le camp débouté.
Le regard des experts
Pour le sociologue du sport Aimé Malonga, la judiciarisation croissante traduit « la maturation des acteurs ». Il rappelle que d’autres fédérations ont connu des épisodes similaires avant de stabiliser leurs statuts. « Le droit n’est pas l’ennemi du terrain, il le sécurise », insiste-t-il.
Un arbitre international basé à Kinshasa nuance cependant: « Un conflit trop long finit toujours par pénaliser l’image du handball. Les joueurs veulent jouer, pas attendre des audiences ». Il suggère une médiation interne pour éviter que le feuilleton ne s’étire au-delà du raisonnable.
L’attente des supporters
Dans les quartiers sud de Brazzaville, les supporters interrogés se disent surtout attachés à la relance rapide du championnat. Beaucoup soulignent la bonne dynamique des Diables Rouges lors des derniers Jeux Africains et craignent que l’incertitude fédérale ne freine l’élan des sélections nationales.
À quelques heures d’un possible verdict, athlètes, dirigeants et supporters partagent donc la même prière: voir le handball congolais sortir grandi d’un procès qu’il n’a pas choisi. Qu’il y ait report ou maintien, l’enjeu dépasse une élection: il touche à la crédibilité du sport.
Calendrier international en jeu
La Confédération africaine de handball doit publier prochainement la liste des fédérations en ordre de gouvernance pour les qualifications aux Jeux de 2026. Le Congo espère évidemment figurer parmi les dossiers validés.
Une éventuelle vacance institutionnelle priverait les sélections d’engagements internationaux, avertit un cadre du ministère des Sports, convaincu que « la stabilité administrative reste la première victoire d’un athlète ».