Une déclaration surprise dans Moungali
Samedi 16 août, le centre culturel Zola, à Moungali, a brusquement changé d’atmosphère. Entre caméras et bourdonnement de micros, le journaliste Alexis Bongo a déposé son micro de présentateur pour celui de candidat, déclarant sa participation à l’élection présidentielle de mars 2026.
Cette annonce, avancée avec un ton posé, survient neuf ans après un premier essai interrompu. Devant des habitants curieux du 4ᵉ arrondissement, Bongo a reconnu une longue phase de réflexion personnelle, convaincu désormais que la conjoncture nationale requiert, selon lui, des profils nouveaux et rassembleurs.
« Le Congo cherche son septième président, me voici », a-t-il lancé, sourire en coin. La phrase, relayée instantanément sur les réseaux, a créé un buzz dans la soirée, rappelant que l’échéance 2026 suscite déjà une curiosité palpable bien au-delà des cercles partisans.
Du plateau télé au terrain politique
Figure familière des téléspectateurs de DRTV, Bongo a présenté pendant des années l’émission « Homéosthasie », laquelle explore santé publique, cohésion sociale et développement local. Cette exposition régulière à l’antenne lui a offert, reconnaît-il, un contact direct avec les préoccupations quotidiennes des Congolais de divers horizons urbains.
Passer du journalisme à la politique n’est pas inédit, mais l’intéressé insiste sur un « devoir d’action ». Selon lui, informer ne suffit plus. « Après avoir décrit les maux, je veux contribuer aux remèdes », a-t-il expliqué, citant ses reportages sur l’accès à l’eau potable alors.
Son équipe de campagne, encore en gestation, promet de conserver une dimension pédagogique inspirée de la télévision. De petites capsules vidéo, destinées aux smartphones, doivent illustrer chiffres budgétaires, projets d’infrastructure et objectifs en matière d’emploi pour rendre le discours plus tangible aux électeurs urbains.
Une vision baptisée « Congo nouveau »
Le document programmatique, encore partiel, s’articule autour de trois axes : gouvernance efficace, diversification économique et justice sociale. Bongo veut, par exemple, accélérer l’agro-industrie afin de réduire la dépendance pétrolière, tout en renforçant les mécanismes de transparence budgétaire déjà mis en place par l’exécutif ces dernières années.
Interrogé sur la continuité des grands chantiers publics, il se dit favorable à une « stabilité constructive ». Autrement dit, aucun projet lancé ne serait brusquement arrêté : les ajustements viendraient après audits techniques, dans l’intérêt d’une optimisation des dépenses et d’une meilleure qualité de service.
Sur le plan diplomatique, le candidat se revendique panafricaniste, déterminé à renforcer les alliances sous-régionales et la coopération Sud-Sud. « Le Congo peut devenir un carrefour de services numériques pour l’Afrique centrale », avance-t-il, évoquant la future dorsale à fibre optique et les incubateurs de start-ups locaux.
La question de la caution et des moyens
Officiellement indépendant, Bongo devra réunir 25 millions FCFA pour valider son dossier auprès de la Cour constitutionnelle. Il minimise l’obstacle financier, arguant que « le peuple est plus riche que cette somme ». Ses sympathisants envisagent un financement participatif transparent via plateformes mobiles et collectes publiques.
La dynamique reste prudente, préviennent des analystes politiques de l’Université Marien Ngouabi. Récolter de petits dons n’a jamais suffi à structurer une campagne présidentielle de terrain. L’équipe Bongo devra donc consolider partenariats, bureaux locaux et logistique, sans perdre l’image d’autonomie qu’elle cultive depuis ses débuts.
Jeunesse et mobilisation numérique
Bongo mise clairement sur la tranche 18-35 ans, qu’il qualifie de « génération éveillée ». Les volontaires jeunesse, déjà actifs sur TikTok et WhatsApp, préparent une tournée éducative dans les quinze départements. Ils ambitionnent d’y sonder priorités locales avant de rédiger un programme détaillé participatif avec experts et associations.
Selon la sociologue Gertrude Mabiala, cette stratégie interactive répond à l’évolution des usages urbains. « Les jeunes veulent co-élaborer, pas seulement applaudir », souligne-t-elle. La méthodologie rappellerait certaines campagnes américaines basées sur la data, mais adaptée au contexte congolais, moins numérisé en zones rurales pour le moment.
Un premier test grandeur nature est prévu lors des Jeux africains de la jeunesse, organisés à Brazzaville l’an prochain. Les bénévoles espèrent capter l’attention des délégations étrangères, démontrant la capacité d’engagement d’une jeunesse congolaise souvent citée comme moteur futur du développement.
Un paysage électoral en mutation
Depuis plusieurs mois, les déclarations de candidature se multiplient, signe d’un pluralisme qui s’installe. Le ministère de l’Intérieur rappelle que la période officielle de collecte des signatures n’est pas encore ouverte, encourageant pourtant les acteurs à informer le public sur leurs programmes pour favoriser un choix éclairé.
Dans ce contexte, l’entrée d’un journaliste reconnu apporte, selon certains observateurs, une « dimension pédagogique bienvenue ». D’autres y voient un indicateur du niveau d’ouverture du système politique congolais, où les profils issus de la société civile trouvent progressivement leur place à côté des partis établis traditionnels.
Rien ne dit encore si Alexis Bongo parviendra à franchir la dernière ligne droite de mars 2026. Mais cette candidature illustre l’animation démocratique souhaitée par de nombreux citoyens, et rappelle que la scène politique congolaise continue d’évoluer tout en préservant ses équilibres institutionnels actuels.