Visite belge : un signal fort pour l’économie congolaise
Après la visite très remarquée du vice-Premier ministre belge Maxime Prévot à Oyo, Brazzaville s’apprête à accueillir, en octobre, une délégation d’une dizaine de dirigeants d’entreprises du royaume. L’annonce, faite par le chargé d’affaires Alexandre Gianasso, dessine un agenda concret.
Cette mission vise à détecter des opportunités dans l’énergie, la logistique, la santé, le transport et le numérique, secteurs identifiés comme leviers de croissance par le gouvernement congolais. Les opérateurs belges arriveront à Brazzaville puis à Pointe-Noire pour multiplier les rencontres institutionnelles et privées.
Pour M. Gianasso, Bruxelles et Brazzaville jouissent d’une “excellente collaboration politique au plan bilatéral comme multilatéral”. Il estime que l’heure est venue de transformer ce capital diplomatique en courant d’affaires régulier, avec “une richesse partagée” à la clé.
Un partenariat historique en pleine relance
Les liens entre la Belgique et le Congo-Brazzaville ne datent pas d’hier. Depuis l’établissement de relations diplomatiques en 1960, Bruxelles a souvent accompagné Brazzaville dans les chantiers d’infrastructures et de formation, tandis que le port d’Anvers reste une porte d’entrée pour les exportations congolaises.
Ces dernières années, le Congo a consolidé sa stabilité macroéconomique, un élément salué par les bailleurs internationaux. Les observateurs estiment que la future Zone économique spéciale de Pointe-Noire pourrait attirer les fonds européens cherchant à diversifier leurs chaînes d’approvisionnement en Afrique centrale.
La Belgique demeure le troisième exportateur et le neuvième importateur du Congo. Ces chiffres, rappelés par M. Gianasso, traduisent une relation déjà dense, mais encore en deçà du potentiel, notamment pour les industries vertes que Bruxelles promeut dans ses programmes de transition.
À Oyo, le président Denis Sassou Nguesso et le vice-Premier ministre belge ont évoqué la protection des forêts du bassin du Congo, considérée comme un “patrimoine mondial”. Cette convergence climat renforce la crédibilité du Congo auprès d’un secteur financier européen de plus en plus exigeant.
Les secteurs à fort potentiel stratégique
Dans l’énergie, la priorité sera la production solaire décentralisée pour l’arrière-pays, un marché estimé à plusieurs dizaines de mégawatts. Des sociétés belges spécialisées dans les mini-grids comptent proposer des partenariats public-privé calqués sur les projets déjà déroulés au Rwanda.
Le transport et la logistique intéressent également les visiteurs. Le chantier du Port Autonome de Pointe-Noire, déjà hub régional pour les conteneurs, exige de nouvelles solutions digitales. Les firmes flamandes, réputées pour le « port intelligent » d’Anvers, veulent partager leur expertise avec les équipes locales.
Dans la santé, les discussions portent sur la fourniture d’équipements d’imagerie médicale et sur la formation biomédicale. Selon le ministère de la Santé, le pays cherche à réduire de 30 % les évacuations sanitaires extérieures d’ici 2026, objectif jugé réaliste par plusieurs analystes.
Le numérique, enfin, ouvre la porte à des investissements dans les centres de données et les services cloud. Le régulateur congolais a récemment assoupli l’accès aux fréquences 5G. Des start-up belges de cybersécurité entendent renforcer la résilience des administrations dans un contexte de digitalisation accélérée.
Ces priorités répondent à la feuille de route du Plan national de développement 2022-2026, qui privilégie la diversification économique et la transition verte. Les entrepreneurs belges s’appuieront sur ce cadre pour négocier des incitations fiscales et des garanties de rapatriement des dividendes.
Retombées attendues pour la jeunesse et les villes
À Brazzaville, les étudiants en commerce de l’Université Marien-Ngouabi voient dans cette mission « une fenêtre sur l’emploi ». Par téléphone, Aline Obili, masterante en logistique, souligne que « l’arrivée d’opérateurs spécialisés créera de nouvelles compétences et dynamisera les stages en entreprises ».
Les autorités municipales misent sur l’effet d’entraînement pour la PME locale. Selon le maire de Pointe-Noire, Jean François Kando, « chaque dollar investi par un groupe étranger génère jusqu’à 70 % de sous-traitance nationale », principalement dans la maintenance et la fourniture de services.
L’Institut national des statistiques prévoit que si trois projets belges se concrétisent, près de 1 500 emplois directs pourront être créés d’ici deux ans. La jeunesse urbaine, touchée par un taux de chômage de 19 %, attend donc avec attention les signatures d’octobre.
Perspectives et prochaines étapes
Avant leur arrivée, les entreprises belges participeront, en ligne, à un forum organisé par l’Agence de promotion des investissements. Cet événement virtuel permettra aux start-up congolaises de présenter leurs prototypes et d’établir un premier contact avant les rencontres physiques.
Selon une source au ministère de l’Économie, un mémorandum d’entente définissant le cadre fiscal pourrait être signé durant la visite. Le texte préciserait les garanties d’arbitrage, un aspect décisif pour les investisseurs, sans remettre en cause la souveraineté économique nationale.
À l’issue du séjour, un rapport conjoint dressera la liste des projets jugés mûrs. La partie congolaise espère concrétiser rapidement ceux alignés sur les priorités nationales. Pour l’heure, la dynamique semble lancée, et le calendrier d’octobre sera scruté de près.