Une mobilisation continentale inédite
Dans la grande salle du Palais du peuple de Kinshasa, plus de cinq cents jeunes africains ont répondu présent le 12 août, journée internationale consacrée par l’ONU à la jeunesse. Ils participaient à la table-ronde montée par le Forum international de la jeunesse pour le développement de l’Afrique, le Fijada.
Sous le thème « Créer un avenir durable : l’engagement des jeunes pour la planète », vingt-cinq délégations nationales ont partagé diagnostics et pistes d’action. La rencontre, saluée par le coordonnateur résident des Nations unies, a souligné que l’Afrique comptera près d’un milliard de moins de 25 ans en 2050, un atout démographique à valoriser.
Jonathan Lumbeya Masuta, président du Fijada, note que « l’urgence écologique oblige notre génération à ne plus rester spectatrice ». Ses propos ont résonné devant les représentants d’ONG, d’universités et d’entreprises vertes, témoignant d’une approche inclusive et pragmatique.
Les travaux, menés du 10 au 14 août, ont abouti à un rapport de 42 pages listant 18 recommandations, de l’agroforesterie urbaine à la finance verte. Ce document sert désormais de feuille de route à chaque pays membre, dont le Congo-Brazzaville.
De Kinshasa à Brazzaville, un relais symbolique
Samedi 23 août, la délégation conduite par Jonathan Masuta traverse le fleuve Congo pour restituer ces conclusions à Brazzaville. La cérémonie, prévue à l’Hôtel Saphir à 17 heures, bénéficie du parrainage de l’ancien député José Cyr Ebina et d’un appui logistique du ministère en charge de l’économie numérique.
L’étape brazzavilloise marque aussi l’installation officielle du bureau national du Fijada. Daniel Biangoud, délégué congolais à Kinshasa, en assumera la coordination. Son mandat consiste à fédérer les organisations locales de jeunesse autour du Plan national de développement 2022-2026, qui consacre un volet important aux énergies propres.
La présence annoncée du ministre Léon-Juste Ibombo et du député Exaucé Ibam Ngambili confirme la volonté des autorités d’accompagner la dynamique citoyenne. Les organisateurs saluent « un dialogue intergénérationnel constructif » rendu possible par un climat institutionnel stable.
Pamela Audrey Derom, vice-présidente de l’Union panafricaine de la jeunesse pour l’Afrique centrale, interviendra en visioconférence depuis Bangui. Son allocution doit rappeler que la coopération sous-régionale est indispensable pour mutualiser savoirs et ressources face aux chocs climatiques.
Les enseignements clés du rapport Fijada
Premier axe : l’agriculture durable. Le rapport encourage les capitales africaines à promouvoir des fermes verticales et des jardins communautaires afin de réduire l’empreinte carbone des circuits alimentaires. À Brazzaville, plusieurs quartiers pilotes, de Makélékélé à Talangaï, ont déjà réservé des parcelles.
Deuxième axe : la formation. Les participants recommandent l’intégration d’un module « économie verte » dans les programmes secondaires et universitaires. L’université Marien-Ngouabi pourrait lancer un master spécialisé, en partenariat avec l’Agence française de développement, citée comme soutien potentiel.
Troisième axe : la finance d’impact. Le rapport propose la création de fonds de garantie régionaux destinés aux start-up écologiques fondées par des jeunes. La BEAC étudie un mécanisme similaire, aligné sur les principes de la Facilité africaine pour les énergies renouvelables.
Enfin, la dimension culturelle reste centrale : la musique urbaine, la bande dessinée et le cinéma court peuvent amplifier les messages climatiques. Des artistes congolais, tels que le rappeur Tidiane Mario, se sont engagés à produire des contenus dédiés avant fin 2025.
Attentes et responsabilité des acteurs nationaux
Les organisateurs invitent les collectivités locales à soutenir la plantation d’un million d’arbres d’ici 2030, ambition qui s’inscrit dans la stratégie nationale Développement Durable et Forêts. La mairie de Brazzaville prévoit déjà de transformer certaines emprises vacantes en micro-parcs.
Les entreprises ne sont pas en reste. « Les solutions viennent aussi du secteur privé », rappelle Cédric Ngolou, consultant climat. La société pétrolière nationale a récemment annoncé un programme d’électrification solaire de stations-service, geste salué par le Fijada comme un signal positif.
Côté société civile, les associations s’engagent à produire un baromètre annuel évaluant l’avancement des recommandations. Cet outil de suivi sera rendu public chaque août, créant une émulation vertueuse et transparente.
Le Fijada mise également sur la diplomatie verte. La future COP 30, prévue en 2026, est perçue comme une tribune où le Congo pourrait valoriser son massif forestier et les initiatives portées par sa jeunesse.
Perspectives régionales pour 2026
Avec l’implantation du bureau de Brazzaville, le Fijada dispose désormais de dix-sept antennes en Afrique. L’objectif est de constituer, d’ici 2026, un réseau de vingt-cinq points focaux capables de dialoguer directement avec l’Union africaine sur les questions de transition écologique.
Des programmes d’échanges sont envisagés : stages croisés entre agripreneurs congolais et nigérians, hackathons climatiques réunissant développeurs de Kinshasa et de Kigali, ou encore universités d’été itinérantes sur les rives du fleuve Congo.
Une campagne de communication baptisée « Notre Fleuve, Notre Avenir » sera lancée en mars, juste avant la saison des pluies. Vidéos, podcasts et opérations de nettoyage de berges doivent sensibiliser habitants et pêcheurs tout en créant des emplois temporaires pour les jeunes.
Jonathan Masuta conclut : « La jeunesse congolaise a déjà démontré sa créativité et son attachement à la terre de ses ancêtres. Nous voulons maintenant transformer cette énergie en projets mesurables, alignés sur la vision de développement durable portée par nos gouvernements ».