Un chantier d’assainissement ambitieux
Vendredi 8 août 2025, Odziba s’est réveillée sous le signe des travaux publics. Sous un soleil doux, pelles et brouettes se sont alignées pour le lancement officiel du projet HIMO, Travaux d’assainissement à haute intensité de main-d’œuvre, porté par l’ONG Niosi avec l’appui logistique du PAM.
Aux côtés des équipes techniques, le préfet du Djoué-Léfini, Léonidas Carel Mottom Mamoni, a salué un « acte concret de la volonté gouvernementale d’améliorer les conditions de vie ». Sa présence, tout comme celle du responsable associatif Benjamin Kiabambou, a donné le ton d’un partenariat résolument local.
Les premiers coups de balai concernent Odziba, Ngabé et les hameaux voisins de Mpoumako, Inoni falaise et Inoni plateau. Ces localités, bordées de grandes plaines verdoyantes, espèrent assainir ruelles, marchés et zones de collecte des déchets, tout en initiant la population aux bonnes pratiques environnementales.
Une réponse aux défis climatiques
Financé par la Banque mondiale à travers la sous-composante 6 du projet Pro-climat, HIMO inscrit l’assainissement comme outil majeur d’adaptation. Le programme intervient alors que les dernières alertes météorologiques annoncent des crues plus fréquentes et une recrudescence de maladies hydriques dans la région.
Pour le préfet, « le développement durable n’est pas une vision abstraite. Il commence ici, avec des actions concrètes, visibles et porteuses d’espoir ». Ces formules résonnent dans des villages où chaque saison des pluies transforme parfois les cours d’école en mares boueuses.
En réduisant les dépôts sauvages et en curant les caniveaux, le projet vise aussi à diminuer les émissions de méthane, gaz puissant mais souvent oublié. Le Pro-climat s’aligne ainsi sur les engagements climatiques du Congo, récemment salués lors des négociations africaines sur la biodiversité.
L’emploi local au cœur de la stratégie
Contrairement aux grands chantiers mécanisés, l’approche HIMO privilégie la pelle plutôt que la pelleteuse. Chaque opération nécessite de la sueur locale, créant des centaines d’emplois temporaires. Dans Odziba, les premiers recrutements ont attiré bûcherons reconvertis, étudiants en vacances et mères de famille à la recherche d’un revenu stable.
La méthode a déjà fait ses preuves en Afrique de l’Est, où le chômage a baissé de 15 % sur certains sites. Pour le chercheur Fabrice Milandou, spécialiste de l’économie verte, « chaque franc gagné est aussitôt réinjecté dans l’économie de proximité ».
Au-delà des gains immédiats, les travailleurs acquièrent des compétences valorisables. Baliser un bassin de retenue, trier les déchets organiques, planter des haies anti-érosion : autant de gestes qui pourront structurer d’autres projets communautaires, du maraîchage aux espaces ludiques pour enfants.
L’engagement des jeunes et des femmes
Une attention particulière est portée aux groupes vulnérables. Les quotas fixés par Niosi réservent 40 % des postes aux femmes et 30 % aux moins de 25 ans. L’objectif est de transformer l’assainissement en passerelle vers des métiers durables.
Dans le marché d’Odziba, Clarisse Ngatsé, 22 ans, explique qu’elle « n’avait jamais tenu une pioche avant ». Deux semaines de formation suffisent pour qu’elle supervise aujourd’hui un groupe de six riverains. Son nouveau contrat lui assure un revenu régulier et des cours du soir financés par le programme.
Selon Benjamin Kiabambou, le projet génère « un sentiment d’utilité sociale qui dépasse le simple salaire ». Les bénévoles du club environnemental du lycée d’Odziba participent aux campagnes de sensibilisation, rappelant que tenir sa rue propre est aussi un acte civique.
Une coordination multipartite
Si l’ONG Niosi assure la maîtrise d’ouvrage, chaque étape est validée par la mairie d’Odziba et la préfecture. Cette double vérification évite les doublons avec d’autres programmes, notamment ceux de la Direction générale de l’hydraulique rurale, active sur l’accès à l’eau potable.
Le PAM apporte son expertise logistique, fort de décennies de distribution alimentaire dans des zones enclavées. Il garantit que les travailleurs perçoivent régulièrement leurs vivres contre service, modèle inspiré du Cash-for-Work mais adapté aux réalités rurales congolaises.
En arrière-plan, la Banque mondiale suit des indicateurs précis : tonnes de déchets évacués, kilomètres de caniveaux curés, mais aussi taux de satisfaction des bénéficiaires. Ces données nourriront la prochaine revue à mi-parcours du Pro-climat et pourront inspirer d’autres départements.
Perspectives pour le Pool et au-delà
Le succès attendu à Odziba servira de laboratoire pour le département du Pool, d’ores et déjà inscrit dans le calendrier de déploiement. Les communautés de Kindamba et Vindza ont manifesté leur intérêt, motivées par la perspective de créer des couloirs écotouristiques le long des rivières.
À plus long terme, les partenaires envisagent de lier assainissement et économie circulaire. Les déchets organiques pourraient alimenter des unités de compostage, tandis que le plastique récupéré servirait de matière première à des ateliers de pavés écologiques installés sur place.
Pour l’heure, la priorité reste de maintenir l’élan citoyen. Les campagnes de sensibilisation se poursuivront après la fin des travaux afin d’éviter un effet rebond. Car, comme le rappelle le préfet, « un caniveau nettoyé aujourd’hui doit le rester demain, sinon l’effort se dilue ».
