Une visite gouvernementale chargée de symboles
Sous un soleil matinal, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso a franchi, le 26 août, le seuil vitré de la nouvelle Agence Côte sauvage de Bsca Bank à Pointe-Noire. La scène, courte mais scrutée, résumait l’alliance entre action publique et initiative privée.
Pour de nombreux observateurs, cette visite n’était pas qu’un rituel protocolaire. Elle confirmait le rôle moteur dévolu au secteur bancaire dans le plan national de relance, appelé à diversifier l’économie et à soutenir la transition vers des services financiers plus accessibles.
Le chef du gouvernement a parcouru les différents îlots digitaux, interrogeant les techniciens sur le fonctionnement des terminaux sans contact et sur la redondance énergétique assurée par des panneaux solaires. Selon l’entourage, le but était de « prendre le pouls de l’innovation in situ ».
Bsca Bank, dix ans d’innovation au service des clients
Depuis son premier guichet ouvert à Brazzaville en 2015, la Banque sino-congolaise pour l’Afrique revendique une stratégie d’ancrage territorial. La façade bleutée de la Côte sauvage s’inscrit dans cette logique : desservir les zones littorales tout en captant l’essor démographique de Pointe-Noire.
Au-delà de l’architecture, l’agence étonne par ses espaces libre-service ouverts 24h/24. Les clients peuvent y déposer du cash, régler des factures d’eau ou de téléphonie, et consulter leur solde en quelques secondes. Des gestes simples, mais cruciaux dans un pays où le paiement digital gagne du terrain.
« Nous voulons être une banque citoyenne », explique Serge Mavoungou, directeur réseau. À ses yeux, la notion d’inclusion financière suppose de rapprocher la banque des travailleurs du port, des pêcheurs et des étudiants installés non loin des plages. Le choix du site n’est donc pas anodin.
Inclusion financière et impact local mesurable
En dix ans d’existence, Bsca Bank a grimpé dans le trio de tête pour les dépôts, selon des données de la Banque centrale. La croissance a été portée par des implantations à Oyo et par la montée en puissance des comptes épargne destinés aux PME.
Les économistes interrogés rattachent ces performances au climat de stabilité macroéconomique observé depuis l’accord conclu avec le FMI en 2022. Les réformes budgétaires, combinées à un programme d’assainissement bancaire, ont amélioré la confiance du public et favorisé la circulation de la monnaie au sein du pays.
Dans ce contexte, la présence du Premier ministre revêtait une valeur de signal. Elle traduisait l’intention des pouvoirs publics de pousser encore plus loin la bancarisation, actuellement estimée à 20 %. L’Agence Côte sauvage pourrait servir de laboratoire avant le déploiement d’agences modulaires à l’intérieur du pays.
Réformes macroéconomiques et stratégie verte
Bsca Bank affirme déjà travailler avec les associations de commerçantes du marché de la Liberté pour tester des terminaux mobiles adaptés aux petits volumes. L’objectif est d’éviter les pertes liées au transport d’espèces et de familiariser les vendeurs aux micro-crédits, capables de soutenir leur réassort saisonnier.
La direction de la banque souligne par ailleurs un engagement environnemental discret mais concret : l’agence est approvisionnée à 60 % par des panneaux solaires et utilise un système de refroidissement passif, réduisant la consommation d’électricité. Un argument qui séduit une clientèle jeune, attentive aux critères de durabilité.
Pour Victor Ngatsongo, analyste financier basé à Paris, « la prochaine frontière sera le crédit habitat, encore embryonnaire au Congo ». Selon lui, des partenariats entre banques et promoteurs locaux pourraient accélérer l’accession à la propriété et soutenir l’industrie des matériaux fabriqués sur place.
Perspectives régionales et montée en compétences
Le gouvernement, précise une note officielle, envisage de compléter l’arsenal réglementaire afin de rendre le cadastre plus lisible et de fluidifier les garanties. Les établissements comme Bsca Bank auraient alors un cadre sécurisé pour accorder des prêts à long terme, essentiels à la consolidation du tissu urbain.
À moyen terme, l’institution prévoit de doubler son réseau grâce à des conteneurs bancaires autonomes, capables d’être installés en moins de 48 heures dans les zones minières du nord. Les tests de résistance aux fortes chaleurs ont, selon l’équipe technique, donné des résultats « très encourageants ».
Interrogé sur les perspectives régionales, le directeur général, Ding Wei, rappelle que la Bsca appartient à un groupe bancaire continental dont la stratégie privilégie les corridors économiques entre Pointe-Noire, Libreville et Lagos. Les échanges portuaires croissants constituent, selon lui, « un socle solide pour financer la logistique ».
Riche de ces ambitions, la nouvelle agence de la Côte sauvage demeure, pour l’heure, un observatoire des attentes citoyennes et un baromètre de l’économie congolaise. Sa trajectoire illustrera, ou non, la capacité du secteur financier à soutenir un développement partagé, au-delà des chiffres et des vitrines.
Les spécialistes concordent : la consolidation du parc bancaire passera aussi par la formation de cadres locaux. Bsca Bank annonce un centre d’apprentissage à Mvoumvou, dédié aux métiers du risque et de la cybersécurité, deux piliers jugés déterminants pour la compétitivité internationale.