Brazzaville célèbre la 41e fête du basket
La chaleur étouffante d’un jeudi soir n’a pas empêché les tribunes du gymnase Maxime-Matsima d’afficher complet. Du parquet aux gradins, le 41e championnat national de basket-ball a rappelé à Brazzaville que le sport peut encore rassembler toutes les générations autour d’un même ballon orange.
Terminé le 24 août, le tournoi a couronné Inter Club chez les hommes et Anges Noirs chez les dames. Deux sacres qui confirment la montée en gamme des clubs de la capitale, décidés à raviver la flamme d’une discipline longtemps privée de grands frissons.
Inter Club domine la finale masculine
Inter Club, emmené par le meneur Millet Makoundou, a fait parler sa rigueur défensive pour l’emporter 66-56 contre l’AS Otoho. «Nous avions étudié chaque système adverse», explique l’entraîneur Anicet Mafoua, satisfait d’une stratégie qui a limité les pivots d’Oyo à moins de dix rebonds offensifs.
Le collectif brazzavillois n’a cédé qu’un quart-temps, dosant vitesse et transition rapide. Otoho, champion sortant, a tenté de s’appuyer sur le shoot extérieur de Davy Loubaki, sans jamais inverser la tendance. «Le titre revient logiquement à l’équipe la plus régulière», reconnaît le capitaine nordiste.
Anges Noirs s’offre la couronne féminine
Chez les dames, Anges Noirs a bâti son succès sur une défense de zone étouffante. Menées après cinq minutes, les joueuses de Mado Loussakou ont étouffé Inter Club, incapable de trouver la mire derrière la ligne des trois points. Score final: 41-31 et une vague noire-et-jaune en liesse.
La capitaine Grâce Ndinga souligne la solidarité du groupe: «Nous savions que notre chance résidait dans la discipline tactique. Chaque balle sauvée était célébrée comme un panier marqué.» Un état d’esprit qui a séduit le public, debout pour applaudir la remise du trophée.
Les juniors d’Otoho confirment le renouveau
Derrière le succès médiatique, les juniors ont également capté l’attention. L’AS Otoho, déjà finaliste chez les grands, a infligé un 64-36 à Black Lion. L’écart, impressionnant, témoigne d’un vivier encore trop discret. Le coach Igor Ebina parle d’une génération «hyper connectée au basket moderne».
Plusieurs observateurs voient dans ce score l’illustration des efforts consentis par la Fédération congolaise de basket-ball pour l’accompagnement des jeunes talents. Des stages régionaux ont essaimé de Pointe-Noire à Owando, avec des séances vidéo et une initiation poussée aux fondamentaux, longtemps talon d’Achille local.
Un soutien politique et numérique décisif
Le ministre des Sports, Hugues Ngouélondélé, a salué ces avancées lors de la cérémonie de clôture. «Le basket renaît parce qu’il bénéficie aujourd’hui d’une synergie entre État, fédération et sponsors», a-t-il déclaré, évoquant le prochain chantier: rénover les infrastructures provinciales pour élargir la base de licenciés.
Présent à ses côtés, le ministre des Postes et Télécommunications, Léon Juste Ibombo, a insisté sur l’importance de la diffusion numérique des matches. L’objectif, selon lui, est d’offrir aux Congolais de la diaspora «une fenêtre régulière sur le championnat» et de séduire des partenaires publicitaires.
Objectif partagé par la Fédération, laquelle a récemment signé un accord pilote avec une plateforme de streaming locale. Dès la saison prochaine, trois affiches par journée devraient être visibles en direct, avec commentaires bilingues. Une visibilité inédite qui pourrait stimuler ventes de maillots et créations d’emplois annexes.
Professionnalisation et ambitions régionales
Les clubs, de leur côté, travaillent à professionnaliser les staffs. Inter Club a recruté une préparatrice physique formée à l’Institut national de la jeunesse et des sports. Anges Noirs a annoncé l’arrivée d’un analyste vidéo. Deux signaux qui traduisent la volonté d’aligner normes et ambitions régionales.
La Confédération africaine de basket-ball tiendra son prochain congrès à Cotonou. Les dirigeants congolais comptent y soumettre un dossier pour accueillir en 2025 un tournoi qualificatif de la Basketball Africa League. Une étape jugée «cruciale pour tester nos capacités logistiques», confie un cadre fédéral.
Le public, premier moteur du rebond national
Au-delà des défis, l’ambiance du gymnase Maxime-Matsima a rappelé l’attachement populaire au jeu. Entre deux temps-morts, un groupe de supporters entonnait «Poto-Poto viva», tandis que les plus jeunes se pressaient pour un autographe. Ces scènes simples nourrissent le récit sportif national.
Le Centre national de médecine du sport avait déployé une cellule de prévention, distribuant eau minérale et conseils sur la chaleur. Aucun incident majeur n’a été déploré, confortant l’idée que des compétitions mieux encadrées peuvent devenir des vitrines sanitaires autant que ludiques.
Perspectives d’une discipline en mutation
Pour beaucoup d’analystes, la 41e édition signe le basculement progressif vers un basket-ball congolais plus professionnel. Reste à transformer l’essai en multipliant les échanges internationaux, à commencer par des camps communs avec des clubs gabonais et camerounais, déjà évoqués entre présidents.
En attendant, Inter Club et Anges Noirs savourent leur couronnement. Les trophées passeront bientôt de main en main dans les arrondissements, promesse d’images inspirantes pour la jeunesse. Il suffira d’un arceau de fortune pour que les rêves grandissent, portés par le rebond contagieux de la balle orange.
Sur le parquet congolais, la saison s’achève, mais l’histoire, elle, ne fait que commencer.