Une Congolaise hissée parmi l’élite mondiale
Sous les lumières des tours futuristes de Marina Bay, Singapour a servi, le 20 août, de scène mondiale au Gilms International Entrepreneur Excellence Awards, un rendez-vous où se côtoient investisseurs, chercheurs et créateurs d’impact économique venant des cinq continents.
Dans cette agora de l’innovation, la Congolaise Mélodie Boueya, 33 ans, a reçu deux distinctions : le docteur honoris causa du Gilms Global Leadership Institute for Management et le très convoité Prestige Business Leader Awards 2025.
De Brazzaville à Singapour, son parcours illustre une trajectoire ascendante portée par l’audace entrepreneuriale et un sens aigu du mentoring, traits que ses proches décrivent comme « contagieux » pour toute une jeunesse en quête de repères fiables.
Malgré le faste du décor, la récipiendaire a choisi un message sobre : « Le leadership n’est pas un privilège individuel, c’est une responsabilité collective », a-t-elle lancé, en invitant les Africains à tisser davantage de passerelles vers l’Asie et l’Amérique.
Un doctorat honoris causa vecteur de sens
Attribuer un doctorat honoris causa revient, dans l’univers académique, à reconnaître une vision avant même de saluer des travaux scientifiques formels. Le Gilms Institute a voulu distinguer la faculté de Boueya à transformer des idées en programmes éducatifs concrets, notamment pour les porteurs de projets d’Afrique centrale.
Selon le jury, la World Winner Academy, plateforme qu’elle a fondée en 2019, affiche déjà plus de 2 000 jeunes formés aux fondamentaux du leadership, avec un taux de création d’entreprise revendiqué de 37 % après six mois d’accompagnement.
Les universités partenaires, de Kigali à Kuala Lumpur, soulignent que l’approche hybride mêlant études de cas africains et séances de design thinking confère à ces sessions une pertinence internationale, tout en enracinant les apprenants dans leur culture d’origine.
Pour l’intéressée, cette décoration académique consacre surtout « la reconnaissance du potentiel africain ». Elle affirme avoir dédié le diplôme « aux mentors invisibles », citant son coach pakistanais Tuhir Hussain, figure réputée dans la formation exécutive.
Le Prestige Business Leader Awards 2025 booste la visibilité
À peine sortie de scène, Boueya a vu son nom s’afficher une seconde fois, cette fois pour un trophée tourné vers l’avenir : le Prestige Business Leader Awards 2025, qui met à l’honneur des dirigeants anticipant les besoins sociétaux des cinq prochaines années.
Le comité de sélection a relevé la capacité de la Congolaise à articuler rentabilité et impact social, un équilibre prisé par les investisseurs responsables. Ses programmes de microfinancement destinés aux coopératives agricoles féminines ont été particulièrement commentés.
Sur scène, elle a insisté sur l’importance de la diplomatie économique : « Chaque contrat transfrontalier que nous signons renforce l’image d’un Congo créatif et ouvert », a-t-elle déclaré, sous les applaudissements d’un public majoritairement asiatique.
Une ambition nourrie par la jeunesse congolaise
Née dans le quartier Makelekele, Mélodie Boueya rappelle fréquemment ses premiers ateliers organisés dans une salle paroissiale sans projecteur. Cette humilité revendiquée s’avère, paradoxalement, le moteur de discours galvanisants auprès des lycéens brazzavillois.
Depuis trois ans, elle anime chaque trimestre des rencontres baptisées « Coffee and Goals », où des patrons de PME locales viennent partager les coulisses de leurs échecs avant d’aborder leurs succès, histoire de désacraliser l’entrepreneuriat pour un public qui redoute encore la faillite.
Le ministère des Petites et moyennes entreprises, partenaire logistique de l’événement, salue l’approche « franche et pragmatique » de la coach. Un fonctionnaire présent lors d’une session estime que « ce type d’échanges prépare les futurs candidats aux guichets de financement publics ».
Pour Boueya, l’enjeu dépasse cependant les frontières nationales. Elle plaide pour un Erasmus africain de l’entrepreneuriat, permettant à un étudiant de Pointe-Noire de passer un semestre à Nairobi ou Accra afin de consolider un réseau panafricain désormais indispensable.
Des passerelles Brazzaville-Singapour vers un futur durable
La présence de plusieurs cadres de l’Agence singapourienne pour la coopération internationale a ouvert des pistes concrètes : incubateurs partagés, bourses croisées et stages en fintech. Des négociations devraient aboutir d’ici à la prochaine édition du forum, prévu à Dubaï.
Pour Brazzaville, ces ponts internationaux s’alignent sur la stratégie gouvernementale de diversification économique, qui mise sur le numérique et les services à forte valeur ajoutée pour compléter les recettes traditionnelles des hydrocarbures.
En attendant, la lauréate prévoit de retourner dans la capitale congolaise dès septembre pour présenter, à l’Université Marien-Ngouabi, un module pilote sur l’entrepreneuriat durable. « La cérémonie est bouclée, le vrai travail commence », glisse-t-elle dans un sourire conscient de la route à parcourir.
Des sociétés congolaises de télécommunication, présentes en qualité de sponsors, ont évoqué la possibilité d’héberger la prochaine édition locale des « Coffee and Goals » dans leurs centres de formation afin de rapprocher davantage l’écosystème startup des infrastructures techniques de pointe.
Si cette coopération se concrétise, la capitale pourrait consolider son statut de hub régional, capable d’attirer investisseurs et talents étrangers. Les analystes y voient un pas décisif pour préparer la jeunesse congolaise à concurrencer, dans la prochaine décennie, les écosystèmes de Nairobi ou Lagos sur le continent africain émergent.