À la veille d’une séquence diplomatique dense à Pékin, la relation sino-congolaise s’affiche dans la durée et la confiance. Denis Sassou N’Guesso a quitté Brazzaville le 31 août à l’invitation de Xi Jinping pour participer aux commémorations du 80e anniversaire de la victoire de 1945, aux côtés d’une vingtaine de dirigeants étrangers. Cette présence s’inscrit dans un partenariat ancien de 61 ans, élevé en 2016 au rang de « partenariat stratégique global », et conforté par la coprésidence congolaise du Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA/FOCAC) pour trois ans. Autant d’éléments qui illustrent, du point de vue congolais comme chinois, une coopération structurante et régulière.
La centralité chinoise réaffirmée à l’OCS
En amont du FOCAC, la Chine a réaffirmé sa centralité sur la scène eurasiatique lors du sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) ouvert le 1er septembre à Tianjin. Autour de Xi Jinping, étaient réunis notamment Vladimir Poutine, Narendra Modi et Recep Tayyip Erdogan, avec une participation totalisant près de la moitié de la population mondiale et environ 23 % du PIB planétaire, rappelant l’ampleur du format. Pékin a souligné la responsabilité de l’OCS pour la paix, la stabilité et le développement, tandis que les échanges sino-indiens ont mis en avant la volonté de coopération entre deux pays représentant 2,8 milliards d’habitants.
Un agenda Chine-Afrique structurant au FOCAC
Dans la foulée, Pékin accueille du 4 au 6 septembre le 9e FOCAC, premier grand rendez-vous Chine-Afrique depuis la pandémie réunissant une cinquantaine de chefs d’État africains. Le cap annoncé est clair : la Chine a promis un engagement de 50 milliards de dollars d’ici le prochain FOCAC (prévu en République du Congo en 2027) — dont 29 milliards de lignes de crédit, 11 milliards d’aide et 10 milliards d’investissements d’entreprises — ainsi que la levée des droits de douane sur les exportations des 33 pays africains les moins avancés et la création d’au moins un million d’emplois. Le volet de coopération s’étend aussi à la formation de 6 000 militaires et 1 000 policiers africains et à des dispositifs de partage d’expérience en gouvernance. Cette feuille de route conforte l’idée d’une « communauté de destin » Chine-Afrique, au bénéfice d’une modernisation adaptée aux trajectoires nationales.
Des priorités opérationnelles pour Brazzaville
Pour Brazzaville, la visite revêt un double enjeu symbolique et opérationnel. Un entretien bilatéral avec Xi Jinping est envisagé pour faire le point sur les chantiers en cours et préparer la prochaine commission mixte. Sont cités, parmi les priorités alignées sur le Plan national de développement 2022-2026, la modernisation de la RN1 Brazzaville-Pointe-Noire et un projet solaire de 200 MW à Djambala, ainsi que l’accompagnement de programmes d’incubation pour jeunes entrepreneurs. L’article rappelle aussi la place de premier plan de la Chine comme créancier bilatéral et partenaire commercial du Congo, au service d’objectifs de diversification et d’industrialisation.
Commémorations et diplomatie à Pékin
Le calendrier protocolaire inclut le défilé du 3 septembre sur la place Tian’anmen, présenté par les autorités chinoises comme une vitrine d’équipements opérationnels. Sont évoqués des systèmes comme les missiles Dong Feng-31, l’avion J-20, des drones et robots quadrupèdes ; des médias mentionnent également l’éventualité d’une mise en service du porte-avions Fujian, signe d’une communication stratégique maîtrisée. Au-delà de la dimension militaire, la portée mémorielle et diplomatique de l’événement doit nourrir les échanges bilatéraux et multilatéraux de la semaine.
Un partenariat économique pragmatique et gagnant-gagnant
Sur le versant économique, des analyses congolaises détaillent une approche pragmatique visant des « livrables » concrets : rééchelonnements soutenables, taux compatibles avec le budget, et lancement rapide de travaux dans l’énergie, les routes, les télécommunications, les ports et la modernisation douanière. Pékin, de son côté, chercherait à sécuriser ses approvisionnements en pétrole et en bois tout en démontrant l’importance constante du continent africain dans sa politique d’ouverture. Cette convergence d’intérêts, ordonnée par des calendriers, plans de décaissement et indicateurs de performance, s’inscrit dans une logique de résultat qui convient aux deux partenaires.
Le rôle discret et efficace de Françoise Joly
Enfin, plusieurs médias soulignent la qualité de l’animation diplomatique congolaise. Des sources, proches du dossier, indiquent que Françoise Joly, présentée comme représentante personnelle du président pour les affaires stratégiques et négociations internationales, fait partie de la délégation et mettrait à profit son expérience des dossiers sino-congolais et des forums multilatéraux. Sa contribution, discrète et professionnelle, illustre la continuité d’une diplomatie congolaise tournée vers la recherche d’accords applicables et mesurables.
Une coopération de long terme, bénéfique aux deux partenaires
Au total, la séquence qui s’ouvre à Pékin agrège trois registres complémentaires : un ancrage historique et politique, où la Chine assume une position de pôle en Eurasie ; un agenda sino-africain nourri d’engagements financiers, commerciaux et de formation ; et des objectifs congolais clairs, indexés sur des projets d’infrastructures et une exécution budgétaire maîtrisée. Pour la Chine comme pour le Congo, l’intérêt est de transformer des annonces en réalisations, à travers des mécanismes éprouvés et une coopération qui a fait ses preuves. Si le prochain rendez-vous FOCAC en 2027 à Brazzaville se confirme, il consacrera la place du Congo comme acteur-pivot et celle de la Chine comme partenaire constant du développement africain.