Une mobilisation inédite pour la salubrité
Dans la cour de la préfecture de Sibiti, pelles et gilets fluorescents changent de mains sous les applaudissements. Le ministre de l’Assainissement urbain, du Développement local et de l’Entretien routier, Juste Désiré Mondelé, vient de lancer le Trimestre de l’assainissement de la Lékoumou, prévu de septembre à novembre.
« Cette campagne marque un tournant décisif », déclare le ministre, rappelant les recommandations du premier forum national sur l’assainissement. Son objectif est clair : réduire durablement les dépôts sauvages, curer les caniveaux et instaurer une culture citoyenne de la propreté dans un département en pleine croissance urbaine.
Le préfet Jean Christophe Tchikaya salue « une initiative essentielle pour corriger les dérives nées de l’expansion rapide ». Devant la tribune, il assure que les habitants sont prêts à s’impliquer, convaincus qu’un environnement sain constitue la première défense contre les maladies hydriques et la dégradation du cadre de vie.
Des actions concrètes sur le terrain
Chaque semaine, marchés, rues, stades et l’aéroport local seront nettoyés. Les brigades de salubrité, formées pour l’occasion, patrouilleront dans les quartiers afin de détecter les points noirs et d’orienter les riverains vers des gestes simples : tri sélectif, compostage artisanal et évacuation réglementée des ordures.
Les écoles primaires recevront des kits pédagogiques illustrant le cycle de vie d’un déchet. Les églises diffuseront des messages de sensibilisation à la fin des offices. Une campagne radiophonique déroulera des conseils pratiques, tandis que des affiches multicolores rappelleront les numéros d’alerte en cas de décharge clandestine.
Le ministère distribuera également brouettes, pelles et sacs biodégradables. Selon Florian Aristide Likibi, vice-président du conseil municipal, ces équipements complètent l’opération « Sibiti ville propre », déjà célébrée chaque premier samedi du mois, et multiplient les occasions d’engagement collectif.
Un partenariat citoyen-gouvernement
Le succès du trimestre repose sur la participation volontaire. Les associations de jeunesse organiseront des défis interquartiers ; la meilleure rue recevra un prix symbolique. Les ONG locales, fortes de leur expérience dans la gestion communautaire des déchets, encadreront les nouveaux volontaires et partageront leurs méthodes.
Les autorités locales, dotées de moyens logistiques, programmeront le passage régulier de camions-bennes. Les chefs de quartier tiendront des registres permettant d’évaluer la quantité de déchets collectés et d’ajuster les tournées. Cette traçabilité vise à éviter le retour des dépôts sauvages une fois la campagne achevée.
Pour le sociologue urbain Désiréas Ndinga, interrogé sur place, « la clé réside dans la responsabilisation mutuelle : l’État crée le cadre, la communauté l’anime ; chacun voit immédiatement les bénéfices sanitaires et économiques d’une ville propre ».
Anticiper les défis sanitaires et climatiques
La saison des pluies approche et, avec elle, le risque de prolifération des moustiques dans les eaux stagnantes. En débarrassant les caniveaux et bas-fonds, la campagne réduit les nids potentiels de vecteurs de paludisme, première cause de consultation dans la région, selon la direction départementale de la santé.
L’Organisation mondiale de la Santé estime qu’un dollar investi dans l’assainissement urbain génère jusqu’à dix dollars d’économies en soins. Les autorités misent sur cet effet levier pour convaincre les derniers réticents, rappelant que la salubrité participe aussi de la lutte contre le changement climatique.
Réutiliser le plastique collecté sous forme de pavés écologiques figure parmi les projets étudiés. « Nous voulons transformer un problème en ressource », explique le chef du service environnemental de Sibiti, qui voit dans cette filière naissante une opportunité d’emplois verts pour les jeunes diplômés.
Lien stratégique route Komono-Mbila
En marge du lancement, Juste Désiré Mondelé a donné le premier coup de pelle aux travaux d’aménagement de la route Komono-Mbila, longue de 25 km. Cette bretelle est vitale pour relier les zones agricoles aux marchés et pour acheminer plus rapidement le matériel d’assainissement.
Les ingénieurs privilégient un revêtement latéritique stabilisé afin de contenir les coûts tout en garantissant la circulation des véhicules en toute saison. Les commerçants de Komono espèrent écouler plus facilement manioc et bananes plantain vers Sibiti, réduisant les pertes post-récolte estimées à 20 %.
Pour le préfet, l’assainissement et la route constituent « les deux faces d’une même pièce ». Un réseau routier praticable permet aux camions de déchets d’accéder aux sites de collecte, tandis qu’une ville propre convainc les investisseurs de s’implanter, complétant ainsi la chaîne du développement local.