Une audience stratégique à Beijing
Le 2 septembre à Beijing, Denis Sassou Nguesso a reçu Xiao Lianping, président de Wing Wah. Dans un salon feutré du Grand Palais du Peuple, les deux hommes ont évoqué l’avenir des investissements chinois en République du Congo.
Pour le chef de l’État congolais, cette visite officielle vise à consolider une coopération déjà dense; pour l’industriel chinois, elle offre l’occasion de confirmer son intention d’élargir ses activités au-delà du seul secteur des hydrocarbures.
Climat d’affaires congolais jugé attractif
À l’issue de l’entretien, Xiao Lianping a salué « un bon environnement d’affaires », citant l’appui constant du gouvernement et l’accueil chaleureux de la population. Ses propos rejoignent les derniers indicateurs régionaux montrant une simplification des démarches administratives.
Les analystes de Brazzaville rappellent que le nouveau Code des investissements, adopté en 2022, accorde des exonérations fiscales aux entreprises réinvestissant leurs bénéfices localement, un dispositif jugé décisif pour attirer des groupes de la taille de Wing Wah.
Mireille Okemba, fondatrice d’une start-up logistique, observe que la présence de grands acteurs « crée un effet d’entraînement » sur les PME, tout en appelant à des programmes de formation accélérée pour que la jeunesse profite réellement de cette dynamique.
Responsabilité sociétale: des gestes concrets
Au-delà du pétrole, Wing Wah finance des projets de proximité, notamment la réfection d’écoles primaires à Makélékélé et la distribution de kits d’eau potable, initiatives décrites comme « essentielles » par plusieurs chefs de quartier rencontrés cette semaine.
La construction récente du siège de la Radiotélévision du Bassin du Congo, édifice ultra-moderne financé par la Chine, est souvent citée comme vitrine d’un partenariat culturel; le gouverneur de Brazzaville y voit « un investissement durable au service de l’information ».
À Pointe-Noire, Wing Wah a pris part à la réhabilitation de voiries secondaires. Daniel Nkodia, commerçant, note « un goudronnage que l’on attendait depuis des années », même s’il souhaite un entretien régulier pour préserver ces nouveaux acquis.
Production pétrolière et diversification
Sur le bloc offshore qu’il opère, le groupe extrait environ 6 500 barils par jour. Le ministère des Hydrocarbures considère cette production comme un signal de confiance adressé au marché, dans un contexte mondial marqué par la volatilité des cours.
Wing Wah vise 10 000 barils quotidiens d’ici 2025, tout en explorant les biocarburants et le gaz associé pour accompagner la transition énergétique nationale. Sa direction assure que les études de faisabilité sont « avancées » et devraient être rendues publiques début 2024.
L’économiste Clara Mabiala rappelle que le pétrole représente encore plus de 60 % des recettes d’exportation du Congo: « Chaque baril supplémentaire compte, mais la valeur ajoutée locale doit s’accroître pour réduire la vulnérabilité budgétaire », insiste-t-elle.
Pour répondre à cet enjeu, le gouvernement impose des quotas de contenu local. Wing Wah affirme employer 80 % de travailleurs nationaux sur ses sites et avoir noué des partenariats avec l’Université Marien-Ngouabi pour la formation d’ingénieurs.
Une coopération gagnant-gagnant
Depuis 2018, la diplomatie économique brazzavilloise promeut des partenariats « gagnant-gagnant », formule reprise par Denis Sassou Nguesso lors du Forum économique sino-africain. L’audience de Beijing a confirmé cette orientation stratégique.
Un accord-cadre signé en marge de la visite prévoit des programmes de transfert technologique axés sur la maintenance industrielle et la sécurité des installations, deux domaines jugés prioritaires par l’Agence congolaise de normalisation.
Des observateurs notent que la concurrence entre investisseurs chinois pousse à offrir de meilleures conditions à l’État congolais. Wing Wah, réputé pour sa rapidité d’exécution, souhaite se distinguer par des objectifs chiffrés et des délais courts.
Regards de la jeunesse urbaine
Dans les rues du Plateau des Quinze Ans, des étudiants interrogés évoquent leurs attentes: stages, bourses et premières expériences professionnelles. « Il faut que les multinationales pensent aussi à nous », plaide Justine Mabondo, étudiante en génie civil.
Le start-uppeur Cyrille Mvoula espère que l’arrivée de Wing Wah « ouvrira un marché pour nos solutions de géolocalisation des équipements pétroliers ». Selon lui, la digitalisation des opérations peut créer une chaîne de valeur locale inédite.
Perspectives économiques
La Banque des États de l’Afrique centrale estime qu’une hausse de la production et des investissements connexes pourrait soutenir la reprise post-pandémie et porter la croissance congolaise au-delà de 4 % à moyen terme, sous réserve d’une exécution rigoureuse.
Les prochains mois diront comment les promesses se traduiront en emplois durables et infrastructures solides, enjeu central pour la jeunesse de Brazzaville qui suit de près chaque mouvement d’un investisseur désormais très médiatisé.