Un temple sportif en péril
Sous les tribunes du stade municipal de Madingou, l’herbe folle gagne sur le béton, les vestiaires portent encore les traces d’anciennes rencontres, et la piste d’athlétisme se confond avec la latérite.
Symbole du dynamisme sportif de la Bouenza dans les années 2000, l’enceinte souffre aujourd’hui d’un déficit d’entretien régulier, conséquence d’une utilisation intense et de moyens limités consacrés à la maintenance.
L’alerte du préfet Marcel Nganongo
En visite de terrain le 6 septembre, le préfet du département, Marcel Nganongo, n’a pas caché son inquiétude devant ce qu’il qualifie de « stade en souffrance », appelant à une réaction collective et immédiate.
« Nous sommes tous responsables », a-t-il lancé, rappelant que chaque dégradation reflète un manque d’attention. Pour lui, l’état du site ne doit plus être perçu comme une fatalité, mais comme un défi à relever ensemble.
Le représentant de l’État souligne la ligne fixée par le président Sassou Nguesso : des infrastructures sportives de proximité, modernes et propres, capables de fédérer la jeunesse et de soutenir les ambitions nationales en matière de performance.
La feuille de route pour l’assainissement
Première étape : dégager les détritus accumulés autour de la pelouse, replacer les grillages et sécuriser les zones réservées au public. Les opérations, prévues chaque premier samedi du mois, impliqueront services techniques, clubs et bénévoles.
Des équipes mixtes vont dresser un inventaire précis : état des sièges, étanchéité des toitures, fonctionnement des projecteurs, disponibilité de l’eau courante. Un rapport sera transmis au ministère des Sports pour hiérarchiser les urgences.
La préfecture mise aussi sur des partenariats public-privé. Plusieurs entreprises locales auraient déjà manifesté leur volonté de fournir peinture, matériel de plomberie ou engins de terrassement, à travers des contrats de sponsoring.
Citoyens, associations et entreprises mobilisés
À Madingou, les associations de supporters des Diables Noirs et du FC Bouenza ont annoncé des journées de volontariat pour repeindre les gradins et dégager les abords encombrés par la végétation.
Le lycée technique voisin promet de mobiliser ses filières bâtiment et électricité afin de permettre aux élèves de mettre en pratique leurs apprentissages au service d’un chantier utile à la communauté.
Pour le chef d’entreprise Alain Mabiala, impliqué dans la zone industrielle de Mouyondzi, « soutenir le stade, c’est investir dans le capital-jeunesse ; demain, ces mêmes jeunes seront nos techniciens et cadres ».
Relancer la dynamique sportive locale
Depuis deux saisons, faute de conditions sanitaires optimales, plusieurs rencontres de championnat départemental ont été délocalisées vers Nkayi ou Dolisie, avec un surcoût logistique pour les clubs et une perte d’engouement chez les supporters.
La remise en état du stade de Madingou permettra de renouer avec les derbys historiques, source de cohésion sociale. Les écoles de football du district comptent déjà plus de 800 licenciés, impatients de fouler une pelouse rénovée.
Au-delà du football, les fédérations d’athlétisme et de handball projettent d’y organiser des stages décentralisés, offrant aux jeunes talents de la Bouenza une visibilité accrue sur les sélections nationales.
Le cadre national de propreté
L’opération « ville, village et habitation propres », actée par la circulaire n° 0012 du 6 octobre 2018, sert de socle réglementaire. Elle encourage administrations, entreprises et citoyens à dédier quelques heures mensuelles à l’embellissement des lieux publics.
Selon le ministère de la Décentralisation, plus de 60 % des mairies appliquent déjà la mesure, avec une amélioration notable de la salubrité dans les centres urbains. Madingou veut s’inscrire dans cette dynamique ascendante.
Des experts saluent l’initiative
Pour l’urbaniste Mireille Diawara, l’assainissement d’une infrastructure sportive ne se résume pas à balayer les allées : « C’est l’occasion de repenser l’accessibilité, la gestion des eaux pluviales, l’intégration d’espaces verts. »
Le sociologue sportif Jean-Paul Bemba rappelle que « les stades sont des lieux de mémoire collective ; les maintenir en bon état renforce le sentiment d’appartenance et peut contribuer à prévenir certaines dérives sociales chez les jeunes ».
Une opportunité pour l’économie locale
Chaque match organisé à domicile redistribue de l’activité : petits commerces, transporteurs, restaurants et artisans bénéficient d’un afflux de clients. Selon la Chambre de commerce de la Bouenza, un match de gala peut générer jusqu’à 10 millions de francs CFA de retombées immédiates.
En réhabilitant le stade, la préfecture espère attirer des compétitions régionales, voire des tournois scolaires inter-départements, créant des occasions supplémentaires pour l’hôtellerie et les producteurs agricoles locaux.
Cap sur une gestion durable
Le projet d’assainissement inclut un volet maintenance préventive : création d’un comité de suivi, planification trimestrielle des petites réparations, et formation des gardiens à la gestion quotidienne d’un équipement moderne.
Une partie des recettes de billetterie sera désormais fléchée vers un fonds permanent d’entretien, garantissant l’achat régulier de fournitures indispensables, sans attendre des budgets exceptionnels.
Un partenariat envisagé avec la Société nationale d’électricité prévoit aussi l’installation progressive de lampes LED basse consommation, afin de réduire la facture énergétique et d’autoriser des rencontres en nocturne dans de meilleures conditions de sécurité.
Enfin, la plantation d’arbres autour de la clôture doit renforcer l’ombre pour les spectateurs et contribuer à capter les poussières soulevées par le vent, apportant une touche esthétique à l’enceinte.
« Nous voulons transformer le stade en vitrine de notre département », conclut Marcel Nganongo. Si le calendrier est respecté, les premiers matches officiels devraient se jouer de nouveau à Madingou dès le début de la prochaine saison sportive.