Une première session stratégique à Brazzaville
Dans la salle de conférence de la Cité ministérielle, la Commission nationale des droits de l’homme a ouvert, le 22 septembre, sa toute première session ordinaire, point de départ d’un ambitieux chantier : définir un plan stratégique 2025-2028 capable de donner un visage concret aux principes qu’elle défend.
Pendant cinq jours, commissaires, experts et partenaires se relaient pour articuler des objectifs mesurables, fixer des indicateurs de suivi et programmer les actions prioritaires qui guideront l’institution face aux défis émergents, du numérique aux changements climatiques, sans perdre de vue les problématiques classiques d’accès à la justice.
Le président de la Commission, Casimir Ndomba, a d’emblée invité les participants à conjuguer ouverture, écoute et rigueur, estimant que « chaque recommandation doit refléter l’intérêt général et la responsabilité partagée ». Son appel trace le ton d’une session qu’il veut résolument tournée vers l’action.
Un règlement intérieur pour plus de transparence
La feuille de route doit également entériner un nouveau règlement intérieur détaillant les procédures internes, les mécanismes de gestion financière et la cartographie des sous-commissions thématiques. L’objectif assumé est la transparence, gage de confiance auprès des citoyens aussi bien que des bailleurs.
En parallèle, les commissaires planchent sur des modalités de consultation élargies afin de garantir que les réalités de chaque département, de Pointe-Noire à Ouesso, soient effectivement intégrées. « La proximité est la clé pour passer des principes aux actes », confie un membre du bureau.
Au-delà des textes, la session s’attache à préciser les ressources humaines nécessaires. Des profils nouveaux, notamment en analyse de données ou en communication digitale, pourraient renforcer les équipes actuelles et accroître la réactivité des alertes, un enjeu souligné lors de la première journée.
Synergie renforcée avec la société civile
Pour maximiser l’impact, M. Ndomba a réaffirmé la volonté de travailler main dans la main avec les organisations de la société civile. Il prône un dialogue permanent, « ni subordination ni concurrence », afin d’additionner les expertises et construire des recommandations fondées sur le terrain.
Les représentants d’associations, présents en qualité d’observateurs, saluent la démarche. Selon Élise Mabiala, du Réseau pour les droits de la femme, la Commission « envoie un signal d’ouverture qui renforce la crédibilité des futures décisions ».
Le soutien appuyé des Nations unies
L’autre grand partenaire, le Système des Nations unies, suit attentivement les travaux. Son Coordonnateur résident, Abdourahamane Diallo, a mis en exergue la réforme législative en cours destinée à arrimer l’institution aux Principes de Paris, cadre international d’indépendance et d’efficacité pour les instances de droits humains.
« L’alignement sur ces principes renforcera la crédibilité de la Commission et ouvrira l’accès à de nouvelles sources de financement », a-t-il expliqué avant de réaffirmer le concours technique des agences onusiennes, notamment pour la formation des futurs enquêteurs et la modernisation du système d’archivage.
Sur le plan budgétaire, les discussions portent aussi sur l’optimisation des ressources internes de l’État. Plusieurs scénarios d’appui logistique, depuis les véhicules jusqu’aux solutions d’hébergement des missions de terrain, sont analysés pour garantir que chaque franc public se traduise en résultats mesurables.
Un organe clef pour la promotion des droits
La création de sous-commissions spécialisées fait consensus. Santé, éducation, détention, environnement ou égalité de genre disposeront chacune d’une cellule d’investigation rapide capable de documenter les cas et d’émettre des alertes structurées vers les autorités compétentes, tout en informant le grand public via des rapports simplifiés.
En coulisses, plusieurs intervenants soulignent l’importance d’adopter un langage de données ouvert. L’idée est de rendre disponible, sur un portail unique, des statistiques anonymisées et des infographies accessibles aux médias, aux chercheurs et aux ONG, afin de nourrir le débat avec des faits vérifiés.
Un calendrier prévisionnel est déjà sur la table. Dès janvier, un atelier de validation associera société civile et administrations, suivi d’une mise en œuvre progressive dès le second trimestre. Chaque semestre, un rapport public dressera le bilan d’avancement et ajustera les priorités le cas échéant.
Pour Christophe Okoumba, enseignant-chercheur en sciences politiques à l’Université Marien-Ngouabi, « la planification triennale est une innovation qui permettra de passer d’un mode réactif à une approche préventive ». Il estime toutefois que le succès dépendra d’une communication constante avec les populations concernées.
Le gouvernement, par la voix du ministre de la Justice, salue une démarche jugée « structurante » pour le secteur. Il rappelle que la Constitution de 2015 confère à la Commission une place centrale et que son renforcement contribuera à consolider l’État de droit voulu par les autorités.
À l’issue de la session, un communiqué final précisera les axes retenus et les moyens de suivi. Pour le président Ndomba, l’enjeu est clair : « Faire de la Commission une référence nationale, crédible et accessible, afin que chaque citoyen sache que ses droits comptent ».