Une marche bleue inédite à Brazzaville
Le 21 septembre 2025, un flot de tee-shirts bleu azur a traversé le centre de Brazzaville. Près de cinquante marcheurs ont quitté la place de la République, direction le Mémorial Pierre Savorgnan de Brazza, pour attirer l’attention sur l’autisme.
Tout au long du parcours, les passants ont croisé des pancartes affichant le slogan « Je ne suis pas bizarre, je suis autiste ». Les organisateurs voulaient traduire en gestes simples un message encore trop peu entendu : le trouble du spectre de l’autisme n’est ni une malédiction ni une fatalité.
Une mobilisation familiale et citoyenne
Derrière l’initiative, on retrouve l’Association Cedestone, présidée par Mme Cedella Madina Tathy. « Nous voulons rompre le silence et donner un visage à ces enfants qui, souvent, restent enfermés dans les maisons », a-t-elle expliqué à l’arrivée.
Sur le boulevard Alfred Raoul, des familles entières ont marché côte à côte. Pour beaucoup, c’était la première fois qu’elles affichaient publiquement leur soutien aux personnes autistes. La présence de Bélinda Ayessa, directrice du mémorial, a renforcé la dimension citoyenne de l’événement.
Autisme : comprendre pour mieux agir
L’autisme fait partie des troubles du neuro-développement. Il apparaît dès la petite enfance, se traduit par des difficultés de communication, des comportements répétitifs et une perception sensorielle particulière. Selon les spécialistes, un diagnostic précoce améliore nettement l’apprentissage et l’autonomie.
Au Congo, les données fiables manquent encore, mais les praticiens observent une augmentation des demandes de consultation. « Plus on informe, plus les familles osent franchir la porte d’un cabinet », constate un pédiatre bénévole auprès de Cedestone.
Des familles souvent isolées
Madame Angéla Kindou, trésorière de l’association et mère d’un garçon autiste, confie son quotidien : « À l’école, on m’a dit que mon fils était “yéza”. Il a fallu du temps pour comprendre qu’il avait simplement un autre mode de fonctionnement. »
Le mot “yéza”, qui renvoie à la sorcellerie, illustre la stigmatisation persistante. Des parents hésitent donc à demander de l’aide, de peur d’être pointés du doigt. Cette marche bleue visait aussi à briser le cercle de la honte et du silence.
Les priorités de Cedestone
Au siège de l’association, situé rue Mavouenza, un petit cabinet médical accueille chaque semaine des consultations de psychologie, d’orthophonie et de psychomotricité. « Nous ne sommes pas un hôpital, mais nous offrons une première écoute et des orientations », rappelle Mme Tathy.
L’objectif à court terme est de former les enseignants du primaire à repérer les signaux d’alerte. Cedestone ambitionne également d’ouvrir, à l’horizon 2027, une classe pilote adaptée, en partenariat avec le ministère de la Santé et l’Éducation nationale.
Vers une ville inclusive
Les participants ont terminé leur marche devant la flamme du souvenir du mémorial. Dans un bref discours, Bélinda Ayessa a salué « le courage des parents et la solidarité des riverains ». Elle a appelé les entreprises locales à soutenir des programmes d’inclusion.
Au-delà de l’événement, la couleur bleue laisse une empreinte symbolique. Des lampadaires du centre-ville resteront éclairés en bleu durant une semaine, rappelant le droit de chaque enfant à grandir sans étiquette. Pour les familles, l’essentiel est que l’élan ne retombe pas.