Entretien à New York: paix et développement au menu
En marge de l’Assemblée générale des Nations unies, Denis Sassou Nguesso a accordé une longue interview à un média américain. Dans la suite du Waldorf Astoria, le chef de l’État congolais a salué la volonté affichée par le président Donald Trump d’associer résolution des conflits et essor économique.
« Si la paix avance, la croissance suivra pour tous », a-t-il rappelé, voyant dans cette doctrine un écho à sa propre trajectoire politique, marquée depuis les accords de Brazzaville de 1988 par la médiation régionale. L’allusion de M. Trump aux “sept conflits” en voie d’apaisement a trouvé un auditoire attentif.
Le dirigeant congolais se dit prêt à poursuivre ce dialogue bilatéral : « Je serais très heureux d’échanger davantage avec le Président Trump ». Pour Brazzaville, amplifier cette convergence peut offrir des retombées concrètes en investissements et en partenariats technologiques.
Les atouts du Congo mis en avant
Interrogé sur les perspectives économiques, Denis Sassou Nguesso a dressé l’inventaire des richesses nationales : pétrole offshore, gaz, gisements de fer, cuivre, zinc, potasse, or, mais aussi milliers d’hectares de terres arables arrosées par un réseau hydrographique dense et un ensoleillement constant.
Des majors comme Chevron exploitent déjà le brut congolais, mais le président estime que le potentiel reste largement sous-utilisé. Il invite les entreprises américaines à « mieux connaître l’Afrique » afin de diversifier l’activité vers l’agro-industrie, l’énergie solaire ou la transformation locale des minerais.
Pour conforter cet appel, Brazzaville met en avant sa stabilité macro-économique, son taux de change arrimé au franc CFA et un marché sous-régional de plus de 200 millions de consommateurs grâce à la CEMAC et à la zone de libre-échange continentale.
Forêt du Bassin du Congo, priorité climatique
Autre argument clef : le rôle planétaire du massif forestier congolais, parfois surnommé « poumon vert » de la planète. Selon certaines études, la région absorberait plus de carbone que l’Amazonie, d’où l’urgence décrétée par les 17 États du Bassin pour protéger cet écosystème.
Brazzaville pilote depuis cette année la Décennie des Nations unies pour la restauration des forêts et abrite le Fonds pour le Bassin du Congo, soutenu par la Banque mondiale. L’objectif : mobiliser davantage de bailleurs publics et privés afin de financer reboisement, recherche et surveillance satellitaire.
« Nous avons l’eau, la terre et la biodiversité, il nous faut maintenant des partenaires déterminés », insiste le chef de l’État, rappelant que la conservation peut générer de l’emploi rural, du tourisme durable et de nouveaux crédits carbone, autant de relais de croissance verte.
Coopérations internationales à élargir
Historiquement proche de la Russie et de la Chine depuis 1964, le Congo souhaite néanmoins renforcer le volet économique de sa relation avec Washington. Les sommets États-Unis-Afrique tenus sous Barack Obama puis Joe Biden ont créé des contacts que Brazzaville veut traduire en projets concrets.
Pour l’heure, aucune ruée américaine n’est observable, reconnaît le président, mais les signaux se multiplient : intérêt pour le gaz méthanier, pour le corridor ferroviaire Pointe-Noire-Brazzaville et pour la valorisation des terres rares utiles aux technologies de transition énergétique.
Sur le plan sécuritaire, Denis Sassou Nguesso préside le Comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye. Il considère ce dossier comme le « maillon faible » favorisant la circulation de groupes armés vers le Sahel. Un engagement américain serait, selon lui, décisif pour stabiliser la sous-région.
Jeunesse, migrations et opportunités locales
L’entretien a également abordé la pression migratoire vers l’Europe. Le président soutient la logique du plan Mattei proposé par Rome : créer sur place les conditions d’emploi qui retiennent les jeunes Africains. « Le potentiel est là, il suffit de le valoriser », martèle-t-il.
Avec une population majoritairement chrétienne, le Congo partage déjà des liens culturels forts avec les États-Unis. Des pasteurs américains remplissent régulièrement les stades de Brazzaville. Le chef de l’État y voit un terrain favorable pour développer en miroir des partenariats économiques et technologiques.
À l’horizon 2050, l’Afrique comptera deux milliards d’habitants, dont une majorité formée au numérique. Pour Denis Sassou Nguesso, ignorer cette vague démographique serait une erreur stratégique pour les grandes puissances. Brazzaville se pose en passerelle entre ce marché émergent et les investisseurs internationaux.
Concrètement, le gouvernement mise sur les zones économiques spéciales de Pointe-Noire et d’Oyo pour accueillir industries textile, pharmaceutique ou agroalimentaire. Les incitations fiscales y sont calibrées pour séduire capitaux étrangers tout en favorisant le transfert de compétences vers les cadres et ingénieurs locaux.
En clôture de l’échange, le président a réaffirmé son invitation officielle à Donald Trump, promettant un accueil « chaleureux » sur les rives de l’Alima. Entre dialogue diplomatique, ambitions écologiques et ouverture économique, Brazzaville entend multiplier les passerelles pour inscrire durablement le Congo sur la carte des investisseurs.