Sensibilisation électorale à Ouesso
Depuis début septembre, les rues de Ouesso s’animent. Entre marchés et carrefours, des bénévoles de la dynamique citoyenne « le Patriarche » saluent, expliquent et distribuent de fins dépliants verts.
Leur message est simple : l’opération nationale de révision des listes électorales se poursuit, et chaque citoyen majeur est invité à vérifier ou à inscrire son nom pour l’élection présidentielle programmée en mars 2026.
Dans la Sangha, la capitale départementale sert de laboratoire. « Plus nous irons vers la population, plus le fichier deviendra fiable », commente Joël Bissingué, superviseur local, conscient que la crédibilité du scrutin commence par la qualité de l’enrôlement.
Le coordonnateur général, Digne Elvis Tsalissan Okombi, a donné le coup d’envoi depuis Brazzaville. À Ouesso, ses émissaires prolongent l’impulsion en arpentant les ruelles sablonneuses, amplificateur sonore en bandoulière, pour rappeler que l’avenir politique débute souvent devant un simple guichet.
Du porte-à-porte à la rue
La deuxième phase, lancée cette semaine, s’appuie sur la proximité. Les animateurs frappent aux portes, demandent quelques minutes, puis montrent la marche à suivre : pièce d’identité, formulaire, double vérification auprès de l’antenne préfectorale.
Sur les grands boulevards, d’autres équipes brandissent des pancartes colorées indiquant l’emplacement des centres d’enrôlement. Les passants s’arrêtent, posent parfois des questions techniques, souvent pratiques : horaires, justificatifs, possibilité d’assistance pour les personnes âgées.
La stratégie reste fondée sur l’écoute. « Nous ne venons pas ordonner, nous venons expliquer », insiste Mireille Mambou, animatrice, convaincue que la confiance se gagne d’abord par le dialogue courtois.
Redonner goût au vote
Les dernières consultations nationales ont mis en lumière un enjeu récurrent : la participation. Dans certaines zones urbaines, moins d’un électeur sur deux avait fait le déplacement, laissant planer un doute sur la représentativité des résultats.
Cette fois, la dynamique « le Patriarche » veut inverser la tendance. « Nous ne parlons pas uniquement de chiffres, nous parlons d’engagement citoyen », souligne Digne Elvis Tsalissan Okombi, persuadé que chaque vote exprimé renforce la cohésion nationale.
Les sociologues locaux rappellent que la démographie est jeune : sur dix habitants, sept ont moins de trente ans. Leur mobilisation pourrait peser lourd dans le choix du futur chef de l’État.
Une feuille de route en trois étapes
La première étape, achevée fin août, avait consisté à installer des banderoles et panneaux explicatifs dans les douze départements. L’objectif était de préparer les esprits avant la descente sur le terrain, tout en offrant un repère visuel constant.
La deuxième, actuellement en cours, privilégie la pédagogie de proximité. Elle sera suivie, annonce le comité, d’un volet « mégaphone ». Des triporteurs motorisés sillonneront cours et avenues, diffusant rappels sonores en langues nationales et en français.
Cette méthode graduelle suit les recommandations de la Commission électorale, qui privilégie un enrôlement continu. « Un citoyen bien informé ne vient pas au dernier moment », rappelle un agent posté près du marché central.
Pédagogie et transparence
Pour convaincre les sceptiques, les équipes exhibent une fiche d’inscription plastifiée, détaillent les champs à remplir et garantissent la confidentialité d’un fichier crypté, hébergé sur des serveurs sécurisés.
Au bureau d’enregistrement de Nzalangoye, Clément Ndinga, 24 ans, est ressorti satisfait : « On m’a montré mon nom dès la saisie. Je viendrai avec mon frère. C’est simple, il faut juste la carte nationale d’identité. »
Les formateurs insistent : toute réclamation peut être déposée immédiatement. Un registre spécial est tenu par chaque centre et transmis chaque vendredi. Cette traçabilité vise à limiter les contestations futures et à renforcer la stabilité du processus démocratique.
Vers mars 2026
Les projections démographiques prévoient environ deux millions d’inscrits à l’échelle nationale. Si l’objectif est atteint, le taux de participation pourrait dépasser 70 %, seuil jamais franchi depuis plus d’une décennie selon plusieurs analystes.
À Ouesso, l’enthousiasme se mesure déjà aux files d’attente observées devant le centre du lycée technique. Les responsables notent une affluence matinale croissante, signe, disent-ils, que la campagne de proximité commence à porter ses fruits.
Le défi sera de maintenir la dynamique jusqu’au 31 décembre, date limite des inscriptions. Ensuite, l’administration vérifiera les doublons avant de publier une liste provisoire.
Voix de terrain
Sur le parvis de l’église Saint-Joseph, Jeanne-Marie Boukadia vend ses légumes. Entre deux clients, elle confie avoir longtemps négligé les formations citoyennes. « Cette fois, j’irai m’inscrire. Mes enfants me poussent à voter pour notre avenir. »
Plus loin, Arnaud Ossiala, mototaximan, explique qu’il s’est déjà enregistré : « Si nous voulons de meilleures routes, il faut être nombreux aux urnes. Je transporte tous les jours les agents du Patriarche, ils font un bon travail. »
Ces témoignages nourrissent l’optimisme des organisateurs. À mesure que les carnets se remplissent, la ville retrouve une effervescence civique, signe annonciateur d’un scrutin apaisé et représentatif.