Diplomatie festive à Brazzaville
La salle de réception de l’ambassade de Chine à Brazzaville affichait complet le 29 septembre. Ministres congolais, conseillers présidentiels et diplomates étrangers ont partagé gâteaux et discours pour célébrer le 76e anniversaire de la République populaire de Chine, reflet d’une amitié désormais institutionnalisée.
Au premier rang se tenait Jean-Claude Gakosso, chef de la diplomatie congolaise, entouré de Jean-Jacques Bouya, Gilbert Mokoki et Honoré Sayi. Leur présence conjointe traduisait l’importance stratégique accordée à Pékin, qualifiée par le ministre des Affaires étrangères de « partenaire clé dans la diversification économique ».
La modernisation chinoise comme moteur d’inspiration
Prenant la parole, l’ambassadeur An Qing a dressé un panorama des quarante années de réformes menées par son pays. Elle a rappelé que 770 millions de ruraux chinois étaient sortis de la pauvreté, soit « 70 % de la réduction mondiale sur la période », selon ses chiffres.
Elle a souligné que, depuis le début de l’année, l’économie chinoise continuait de progresser malgré un environnement géopolitique volatil. « Notre croissance représente encore plus de 30 % de celle du monde », a-t-elle déclaré, y voyant la preuve qu’un développement basé sur l’innovation reste possible.
Ce récit d’un succès mesuré s’est voulu inspirant pour le Congo, engagé lui aussi dans un plan de relance post-Covid. Brazzaville mise désormais sur l’industrialisation, la transformation locale des matières premières et les technologies vertes, trois secteurs dans lesquels la Chine affirme vouloir partager expertise et capitaux.
Infrastructures congolaises, vitrine de la coopération
Routes nationales, ponts sur le fleuve Congo, zone économique spéciale d’Oyo-Ouesso : autant de chantiers emblématiques construits ou financés par des consortiums chinois. Pour Jean-Jacques Bouya, ces réalisations « ont réduit les distances intérieures et soutenu la baisse du coût logistique des produits agricoles ».
Les entreprises Sinomach, CRBC ou Huawei emploient aujourd’hui plusieurs milliers de Congolais et forment, selon le ministère du Travail, plus de 700 jeunes par an aux métiers du BTP, de l’électricité et du numérique. Ces transferts de compétences sont souvent cités comme l’un des bénéfices les plus tangibles.
Pour renforcer ce maillage, le futur pont route-rail qui reliera Brazzaville et Kinshasa demeure dans les cartons. L’ambassadeur a confirmé la volonté de Pékin d’accompagner l’étude technique, jugeant l’ouvrage décisif pour l’intégration sous-régionale et l’écoulement des marchandises vers les ports de Pointe-Noire et de Matadi.
Un accord commercial en préparation avancée
Au-delà des chantiers, le commerce constitue l’autre pilier de la relation. Entre janvier et août, les échanges bilatéraux ont atteint 4,22 milliards de dollars, en hausse de 5,8 %. Les exportations congolaises, dominées par le pétrole et le bois, représentent 3,21 milliards, selon les douanes chinoises.
Afin d’accroître encore ces flux, Brazzaville et Pékin négocient un accord de partenariat économique dont les principaux volets sont finalisés. L’ambassadeur a révélé que le texte prévoit un démantèlement progressif des droits de douane sur plusieurs centaines de produits congolais considérés comme prioritaires.
Côté congolais, le ministère du Commerce voit dans cette exonération un moyen de booster les exportations de café, cacao, manioc transformé ou artisanat. « Obtenir un accès à zéro pour cent de droit, c’est un avantage comparatif que peu de pays africains ont conquis », commente un haut fonctionnaire.
Une communauté d’avenir partagé face aux défis
Au cœur des discours plane l’idée d’une communauté d’avenir partagé, concept cher au président chinois. Pour Denis Sassou N’Guesso, qui s’est rendu à Pékin récemment, cette vision s’inscrit dans la défense du multilatéralisme et la recherche de solutions concertées aux défis climatiques et sécuritaires.
L’appui au Forum sur la coopération sino-africaine reste, selon An Qing, « un levier pour assurer à l’Afrique une voix plus forte sur la scène internationale ». Brazzaville entend profiter de la prochaine session ministérielle pour promouvoir ses projets énergétiques à faible empreinte carbone.
Analystes et organismes de Bretton Woods saluent, pour leur part, la stabilité macroéconomique retrouvée du Congo, jugée propice à attirer davantage d’investissements étrangers. La coopération avec la Chine, soutiennent-ils, pourrait accélérer la diversification au-delà des hydrocarbures, condition majeure pour une croissance inclusive et durable.
Des retombées locales attendues
Sur le terrain, commerçants et transporteurs espèrent des retombées rapides. À Talangaï, quartier populaire de Brazzaville, Bénédicte, 34 ans, compte sur la baisse des frais de douane pour importer des panneaux solaires : « Si les prix chutent, on pourra électrifier nos boutiques et prolonger les horaires d’ouverture ».
Ces témoignages confirment que la coopération Congo-Chine, fondée sur l’équilibre des intérêts, vise désormais autant le grand chantier national que la vie quotidienne des citoyens. L’enjeu sera de veiller, au fil des signatures, à ce que chaque projet s’accompagne de formation, d’emplois et de transparence.