Un cadre juridique rajeuni
La feuille de route du transport routier congolais vient de s’éclaircir. En annonçant, à Brazzaville, la limitation uniforme à cinq ans de la validité des agréments, la ministre Ingrid Olga Ghislaine Ebouka-Babackas donne un horizon commun aux transporteurs et professions connexes.
La décision s’appuie sur le décret 2025-399, signé le 19 septembre dernier, qui actualise l’article 22 du texte fondateur de 2011. Ce geste réglementaire confirme la volonté des autorités de consolider les règles d’entrée et d’exercice dans un secteur vital pour la mobilité nationale.
L’agrément de cinq ans se substitue ainsi aux autorisations à durée indéterminée ou trop courte constatées par le passé. Pour les opérateurs, cette harmonisation réduit l’incertitude administrative et ouvre la voie à des plans d’affaires mieux calibrés sur le moyen terme.
Cinq ans pour planifier et investir
Les dirigeants de sociétés de transport public saluent déjà la visibilité nouvelle. « Nous pouvons enfin programmer le renouvellement de nos bus sur cinq ans, sans craindre de changement soudain de statut », relève un gestionnaire brazzavillois, joint par téléphone.
Pour les établissements de formation à la conduite, la durée fixe facilite l’accès au crédit. Les banques exigent souvent un agrément valable au moins autant que la durée du prêt. Désormais, ces écoles pourront présenter un document cohérent avec les échéanciers bancaires.
Les loueurs de véhicules, de leur côté, anticipent une baisse des coûts administratifs. « Refaire un dossier chaque année mobilisait temps et argent. Une échéance quinquennale allège nos charges et nous laisse plus de ressources pour l’entretien de la flotte », confie un entrepreneur de Pointe-Noire.
Des acteurs multiples concernés
Le décret ne se limite pas aux transporteurs de marchandises ou de voyageurs. Il embrasse aussi les sociétés de contrôle technique, indispensables à la sécurité routière, ainsi que les cabinets médicaux habilités à délivrer les certificats d’aptitude physique des conducteurs professionnels.
Les fabricants de plaques d’immatriculation et de signaux routiers vont, eux aussi, devoir déposer un dossier conforme avant le 30 octobre 2025. Le ministère veut ainsi garantir la traçabilité de la production et lutter plus efficacement contre la contrefaçon des plaques.
Du côté des maisons de manutention et d’entreposage, le nouvel agrément quinquennal s’inscrit dans une logique de chaîne logistique intégrée. Le transport routier ne se conçoit plus isolément, mais comme un maillon coordonné avec les ports, les entrepôts et les plateformes multimodales.
Un calendrier clair pour se mettre en règle
Le communiqué du ministère rappelle une échéance ferme : tout détenteur ou candidat doit se présenter auprès des directions départementales avant le 30 octobre 2025. Les services déconcentrés seront chargés de vérifier les dossiers et d’alimenter le répertoire national des professionnels.
Cette base de données, récemment numérisée, permettra aux forces de l’ordre de contrôler plus rapidement la validité d’un agrément lors des opérations routières. Les usagers bénéficieront aussi d’un guichet unique simplifié pour connaître la liste des transporteurs autorisés.
Pour fluidifier le traitement, Brazzaville a prévu des guichets mobiles qui se déplaceront dans les chefs-lieux, à raison d’une semaine par district. Une attention particulière sera portée aux zones enclavées afin d’éviter les déplacements coûteux pour les petites structures.
Vers un service public mieux sécurisé
En encadrant plus strictement l’accès à la profession, le gouvernement entend aussi améliorer la sécurité routière. Un agrément unique à durée définie facilite le retrait rapide en cas d’infraction grave ou de manquement aux normes techniques.
Le ministère rappelle qu’en 2024, près de 40 % des accidents mortels impliquaient des véhicules dont la visite technique avait expiré. La mise à jour des agréments servira à cibler plus vite les exploitants défaillants et à renforcer les contrôles sur le terrain.
Les organisations de consommateurs, associées aux travaux préparatoires, voient dans cette réforme un gage de transparence. « Un opérateur agréé affichera un numéro officiel visible sur son véhicule ; les passagers pourront vérifier la conformité via un QR code », explique un porte-parole.
Certains syndicats redoutent néanmoins la phase de transition. Ils demandent un accompagnement technique pour remplir les formulaires numériques. Le ministère assure qu’un centre d’assistance téléphonique et des tutoriels vidéo seront disponibles dès le mois prochain.
Au-delà de l’administration, la fixation à cinq ans rapproche le Congo des standards de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale. Cette convergence est perçue comme un levier pour faciliter les échanges routiers régionaux et attirer des partenariats privés.
La prochaine étape consistera à publier les arrêtés d’application précisant les pièces exigées et le barème des frais. Selon une source interne, les textes devraient sortir avant la fin du premier trimestre 2026, de quoi laisser aux opérateurs le temps de s’adapter.
En attendant, de nombreux observateurs soulignent le rôle moteur que pourraient jouer les collectivités locales. Celles-ci pourraient, en collaboration avec la direction générale des transports terrestres, lancer des campagnes d’information ciblées dans les marchés, les gares routières et les universités.