Rentrée solidaire à Pointe-Noire
À Pointe-Noire, la rentrée scolaire vient parfois avec son lot d’angoisses pour les familles modestes. L’ONG Elan de cœur a choisi, cette semaine, de transformer ces inquiétudes en sourires en distribuant des centaines de kits scolaires aux enfants défavorisés de trois orphelinats.
Le Centre d’accueil des mineurs de Mvoumvou, l’orphelinat Padre-Pino à Ngoyo La Plaine et la Mission du cœur de Ngoyo Puma ont reçu, chacun, des sacs remplis de cahiers, stylos, ardoises et règles, soigneusement adaptés à l’âge et au niveau scolaire des bénéficiaires.
Cette opération, pilotée par la présidente de l’association, Nadine Hounsinou Ngari, s’inscrit dans une campagne annuelle baptisée « Sacs de réussite » qui, depuis 2014, accompagne la rentrée d’environ mille élèves vulnérables dans le département.
« Voir leurs yeux pétiller vaut toutes les récompenses », confie la responsable, émue, avant d’ajouter que chaque don est rendu possible grâce aux cotisations des membres, aux partenariats avec des entreprises locales et à l’appui discret de quelques Congolais de la diaspora.
Une rencontre pleine d’espoir
Dans la grande salle du Centre d’accueil, transformée pour l’occasion, l’ONG a installé des tables couvertes de fournitures multicolores. Les enfants, alignés par classe, sont repartis avec un sac à dos neuf pendant qu’un animateur leur rappelait l’importance de prendre soin de leur matériel.
À côté, quelques parents d’enfants externes, invités pour l’événement, confiaient leur soulagement face à la hausse des prix des cahiers, dont le coût a augmenté de près de 15 % selon plusieurs libraires du marché de La Base.
Des kits pensés sur mesure
Elan de cœur dit avoir collaboré avec des enseignants bénévoles pour composer les fournitures afin qu’un élève de CE1 ne reçoive pas les mêmes outils qu’un collégien. Une fiche personnalisée accompagne chaque sac, indiquant les matières et le calendrier des devoirs majeurs du trimestre.
Selon la formatrice bénévole Gladys Madingou, cette démarche réduit les achats superflus et « pousse l’élève à organiser son cartable dès le premier soir, comme on prépare un match important ». Les éducateurs estiment qu’un kit adapté augmente la confiance en classe et améliore l’assiduité.
Parents et autorités saluent l’initiative
Au micro d’une radio locale, Brigitte, aide-ménagère et mère de trois enfants, a raconté qu’elle aurait dû consacrer la moitié de son salaire mensuel à l’achat de fournitures. « Grâce à ce sac, je peux garder de l’argent pour la cantine », souffle-t-elle.
Le directeur départemental de l’Enseignement primaire, présent lors de la cérémonie, a salué « un complément utile au travail de l’État », rappelant que le gouvernement poursuit la réhabilitation d’écoles et la mise à disposition de manuels, mais que « chaque coup de main citoyen compte pour accélérer le progrès ».
La voix des orphelinats
Au Centre d’accueil des mineurs, le directeur Jean-Pierre Ngangoue souligne que la majorité des pensionnaires arrivent sans effets personnels. « Ces kits gomment la différence entre un orphelin et un camarade de quartier. À l’école, ils se sentent comme les autres, et c’est capital pour leur estime ».
Même satisfaction à Padre-Pino, où sœur Albertina relate une scène marquante : « Une fillette a demandé si elle pouvait dormir avec son sac, de peur de le perdre ». Pour la religieuse, le don dépasse l’objet matériel et inscrit les enfants « dans une chaîne de bienveillance ».
Une décennie d’action éducative
Créée en 2013 par un groupe de jeunes professionnels, l’ONG a d’abord mené de petites collectes dans les marchés de Pointe-Noire pour financer des goûters scolaires. Aujourd’hui, elle affiche un budget annuel avoisinant vingt-cinq millions de francs CFA, entièrement audité par un cabinet externe.
L’association concentre 60 % de ses dépenses sur l’éducation, 25 % sur la santé primaire et 15 % sur des programmes d’environnement, comme les ateliers « Zéro bouteille plastique » menés dans les écoles côtières. Elle prévoit d’ouvrir une antenne à Dolisie l’an prochain.
Un réseau de soutien durable
Pour renforcer l’impact, Elan de cœur ambitionne de créer un fonds communal d’aide aux fournitures, cogéré avec des comités de parents d’élèves. L’idée, actuellement étudiée par la mairie de Pointe-Noire, consisterait à mutualiser les dons et à cibler les quartiers les plus précaires.
Plusieurs chefs de quartiers consultés saluent cette perspective. « Nous connaissons nos familles, nous savons qui a véritablement besoin », résume un responsable de Lumumba. Pour lui, faire participer le voisinage renforcera la transparence et évitera les doublons dans les aides déjà existantes.
En attendant, la distribution de cette semaine rappelle que la réussite scolaire reste un chantier collectif. Chaque crayon remis dessine un futur possible, résume Nadine Hounsinou Ngari, avant de promettre de revenir « dès le second trimestre avec des livres de lecture ».
Sur les réseaux sociaux, la campagne #CartableDuCourage lancée par l’ONG a enregistré plus de quatre mille partages en deux jours. Ce relais numérique a permis de collecter des promesses de dons venues de jeunes actifs vivant à Brazzaville, Paris et Abidjan.