Un hémicycle concentré sur l’urgence sécuritaire
Dans l’hémicycle du Palais du parlement, mercredi 15 octobre 2025, l’ouverture de la 7ᵉ session budgétaire du Sénat a résonné comme un signal fort. Le président de la chambre haute, Pierre Ngolo, a placé la question de la sécurité au centre de son allocution.
Face aux vénérables, l’élu de la Cuvette a salué les récentes opérations de police dirigées contre les bandes dites bébés noirs et kulunas, tout en demandant « de pérenniser cet élan, en faisant respecter les lois et règlements de la République ».
La montée des violences juvéniles inquiète les quartiers
Depuis quelques mois, les riverains de certains arrondissements de Brazzaville et Pointe-Noire alertent sur des agressions nocturnes au couteau ou à la machette. Des groupes d’adolescents, parfois à peine sortis de l’enfance, imposent leur loi dans des couloirs marchands et des arrêts de bus.
Pour les sénateurs, cette flambée de violence n’est pas qu’un problème d’ordre public. Elle met en évidence un affaiblissement du lien social et des réseaux de prévention, autrefois assurés par les familles, les écoles et les associations de quartier.
Dans l’opinion, la question revient sans cesse : comment éviter qu’une simple opération de police ne soit suivie d’une résurgence du phénomène ? Le Sénat, par la voix de son président, privilégie une approche « globale, ferme mais juste », impliquant la justice, les services sociaux et les collectivités.
Le précédent de 1997 comme repère national
Pierre Ngolo a rappelé à ses collègues le traumatisme de la crise de 1997 et la restauration de la paix qui s’ensuivit sous la houlette du président Denis Sassou Nguesso. « La paix est devenue le crédo du Chef de l’État », a-t-il insisté, saluant « l’investissement permanent du Président pour la sécurité ».
Cette référence historique vise à souligner que la stabilité n’est jamais acquise. Aux yeux du Sénat, l’éradication des bébés noirs doit s’inscrire dans le même esprit de réconciliation nationale, en protégeant la liberté de circuler et le droit des citoyens à vivre sans peur.
Le Sénat interpelle mais soutient l’exécutif
L’assemblée haute n’entend pas se limiter à un rôle de spectateur. Pierre Ngolo a réitéré sa « disponibilité à travailler avec le gouvernement » sur la sécurité, mais aussi sur les dossiers du coût de la vie, de l’accès à l’eau et à l’électricité ou du paiement des pensions.
Dans le même souffle, il a félicité les ministères concernés pour l’élan actuel, reconnaissant que « les forces de sécurité multiplient les patrouilles et restaurent la quiétude des populations ». Il a toutefois prévenu que tout effort dépourvu d’ancrage légal ou budgétaire risque de s’essouffler.
Renforcer la loi et la prévention sur le terrain
Parmi les pistes évoquées figure la réactivation des comités de veille citoyenne, déjà expérimentés après 1997. Ces structures de proximité, associant chefs de quartier, associations et police, avaient permis de désamorcer des tensions avant qu’elles ne dégénèrent.
Le Sénat encourage aussi la mise en place de programmes d’apprentissage et de réinsertion pour les jeunes en rupture scolaire. Le principe, détaillé dans l’hémicycle, est simple : offrir une alternative concrète à la rue par la formation professionnelle, l’artisanat et le sport.
« Protéger les citoyens est le premier devoir de l’État », a martelé Pierre Ngolo, tout en rappelant que la justice doit rester la seule réponse face aux actes criminels. Pas question, selon lui, de céder à la tentation de l’auto-défense ou de la vindicte populaire.
La parole aux quartiers : attentes et espoirs
À Mfilou, Arlette, 52 ans, vendeuse de poisson fumé, confie qu’elle n’ose plus fermer sa boutique tard le soir. L’annonce de nouvelles patrouilles la rassure, mais elle souhaite « voir les actions durer, pas seulement deux semaines ».
Non loin de là, Junior, 18 ans, ancien membre d’un groupe de rue, rêve d’un stage en mécanique. « Si on me tend une chance, je la prendrai », assure-t-il, illustrant les propos du Sénat sur la nécessité d’ouvrir des perspectives aux jeunes.
Les maires d’arrondissement se disent prêts à accompagner la stratégie. Certains proposent déjà d’allouer une partie de leur budget local au financement d’équipements sportifs ou de salles de soutien scolaire, afin de « couper l’herbe sous le pied à la délinquance ».
Un calendrier budgétaire sous surveillance
La session qui s’ouvre examinera le budget 2026. Plusieurs sénateurs prévoient d’y inscrire une ligne spécifiquement dédiée à la sécurisation des quartiers sensibles, incluant l’éclairage public, la vidéo-protection et la rénovation des postes de police.
Sur les travées, on rappelle que l’article 77 de la Constitution confère au Sénat un rôle crucial dans le contrôle de l’action gouvernementale. L’ambition est donc de suivre, trimestre après trimestre, l’exécution des mesures annoncées afin de garantir leur efficacité.
Un message d’unité nationale
En conclusion de son discours, Pierre Ngolo a exhorté l’ensemble des forces vives à « faire bloc autour de la loi ». La lutte contre les bébés noirs, a-t-il déclaré, est aussi un combat pour l’image du Congo, pays d’hospitalité et de paix.
Dans l’hémicycle, l’appel a été ponctué d’applaudissements nourris. Il scelle un consensus : la sécurité est l’affaire de tous, mais l’État conserve le rôle de chef d’orchestre. Reste désormais à transformer l’élan politique en résultats mesurables, pour que les nuits congolaises redeviennent sereines.
