La promesse de trois nuits urbaines à Pointe-Noire
Pointe-Noire s’apprête à pulser au rythme des platines du 31 octobre au 2 novembre avec “3 jours de show chez Mwana light”. Imaginé par le collectif Clan One Force, l’événement veut offrir une respiration festive à la jeunesse congolaise après une rentrée chargée.
Dans un entrepôt reconverti du quartier Côte-Matève, les platines seront installées face à un dancefloor de 800 places, couvert mais largement ouvert sur l’extérieur afin de profiter de la brise marine nocturne. Les organisateurs promettent un son haute définition et des jeux de lumière immersifs.
“Nous voulons créer une bulle de liberté où chaque génération se retrouve”, confie Allan Keita, coordinateur artistique du Clan One Force. Il assure que l’entrée restera accessible, avec un billet unique à 2 500 francs CFA par soirée et des réductions pour les étudiants.
Cinq DJs, cinq signatures sonores
La première nuit sera ouverte par DJ Katmay, pionnier de l’underground brazzavillois. Maître des transitions millimétrées, il promet un set qui glissera du hip-hop old school vers l’amapiano sans que le public ne s’en rende compte, “comme un fleuve traversant plusieurs paysages”, sourit-il.
Il passera le relais à DJ Flamme Rouge, connu pour marier la rumba congolaise et les textures électro. Ses mixes inattendus font souvent chanter des classiques de Papa Wemba sur des basses UK garage. Un ADN hybride qui capte aussi bien les puristes que les explorateurs.
Place ensuite à DJ Mick, ambassadeur de l’afrobeat. Il construit ses sets comme des fresques, multipliant breaks et relances pour guider la foule. Son dernier passage, lors du festival Yiri, avait transformé la plage de Loango en piste géante jusqu’à l’aube.
La nuit centrale sera marquée par l’approche provocatrice de DJ Corbillard, qui revendique une musique “garantie sans pause”. Son mix alterne kuduro sec, trap mordante et samples de discours marquants. Une esthétique conçue pour secouer les consciences autant que les corps.
Pour boucler le marathon sonore, le jeune DJ Moussampay livrera dimanche matin un set à progression ascendante. Repéré sur les réseaux avec ses vidéos filmées en une prise, il compte distiller house, coupé-décalé puis techno, jusqu’à atteindre 130 battements par minute à l’apogée.
Une organisation pensée pour tous les publics
Le dispositif de sécurité a été conçu avec la préfecture et la gendarmerie, qui annonceront un plan de circulation provisoire. Des navettes partiront toutes les demi-heures depuis le rond-point Lumumba afin d’encourager les festivaliers à laisser leurs voitures et limiter les embouteillages nocturnes.
Côté santé, deux postes de secours seront tenus par la Croix-Rouge tandis qu’un dispensaire mobile vérifiera gratuitement la tension artérielle et distribuera des bouteilles d’eau. “La fête doit rester un moment de bien-être, pas un risque”, rappelle le docteur Maïsha, volontaire référente.
Les stands de restauration ont, eux, privilégié les produits locaux. Bissap glacé, brochettes de capitaines du Kouilou et beignets de manioc seront proposés à prix contenus. Une manière, pour les producteurs, de toucher un public urbain et de raccourcir la chaîne logistique.
Dynamiser l’économie nocturne de Pointe-Noire
Selon le comité d’organisation, plus de 2 500 visiteurs uniques sont attendus, soit une capacité quasiment complète chaque soir. Les hôteliers du centre-ville notent déjà une hausse des réservations autour du 1er novembre, portée par des touristes venus de Kinshasa et Libreville.
Pour le sociologue Aurélien Goma, spécialiste des pratiques festives, ces nuits constituent “un laboratoire de cohésion”. Il observe que la musique électronique rassemble des cercles sociaux très variés, de l’étudiant à l’ingénieur pétrolier, et crée des ponts rarement visibles dans les espaces publics traditionnels.
Les commerçants voisins rivalisent d’idées: offrir un café matinal aux danseurs, prolonger les horaires d’ouverture ou décorer les devantures aux couleurs du Clan One Force. La mairie, partenaire logistique, espère que cet élan inspirera d’autres initiatives culturelles en fin d’année.
Derniers réglages avant la première note
À moins d’une semaine de l’ouverture, les artistes peaufinent encore leurs sélections. DJ Katmay teste de nouveaux remixes dans un studio de Bacongo, tandis que DJ Moussampay réécoute ses enchaînements au casque pendant ses trajets en bus, “pour rester proche de la rue”, dit-il.
Le test lumière-son est prévu la veille à 22 heures, sous l’œil d’un ingénieur parisien venu prêter main-forte. “Nous voulons une expérience fluide, sans temps morts”, assure le directeur technique Loris Bemba. À l’évidence, le compte à rebours résonne déjà dans toute la ville.
Du premier kick au dernier fade-out, ces 72 heures promettent d’explorer l’âme vibrante du Congo urbain. Entre partage, créativité et mise en valeur des talents locaux, le Clan One Force espère transformer la fête en rendez-vous durable, capable d’inscrire Pointe-Noire sur la carte mondiale du mix.
