Un destin aérien interrompu
La nouvelle est tombée comme un couperet, jeudi 23 octobre 2025. Mlle Vichèle Mampouya, 39 ans, s’est éteinte à Brazzaville. Ancienne responsable commerciale d’ECAIR, elle avait, depuis dix ans, tissé des liens solides avec voyageurs, collègues et partenaires.
Née en 1986 dans le quartier Ouenzé, la jeune femme rêvait déjà d’avions en fixant le ciel depuis la cour familiale. Après des études en gestion à l’université Marien-Ngouabi, elle avait poursuivi une formation en logistique aéronautique à Casablanca, avant de rentrer au pays.
Chez ECAIR, elle gravit rapidement les échelons, pilotant le lancement de la ligne Pointe-Noire-Cotonou et accompagnant l’ouverture des services cargo. « Son énergie entraînait toute l’équipe », se souvient un collègue, évoquant une professionnelle « exigeante et chaleureuse, toujours la première à encourager ».
Une famille engagée dans la cité
Fille de Michel Mampouya, ancien ministre et figure politique respectée, Vichèle a grandi dans un environnement où le sens du service public était valorisé. Pourtant, elle avait choisi de tracer sa propre route, loin de l’arène partisane, mais proche du terrain.
Elle participait régulièrement à des campagnes de don de sang, sponsorisait des fournitures scolaires pour l’école de sa rue et accompagnait, chaque Noël, une association de sourires aux enfants hospitalisés. « Elle ne voulait aucune caméra, seulement aider », glisse une amie d’enfance.
Le père, très éprouvé, a salué la mémoire de « sa conseillère spontanée ». Dans un court propos, Michel Mampouya a remercié le personnel soignant pour « le dévouement absolu » et appelé à l’unité familiale. Des voisins décrivent un climat de solidarité immédiate autour du domicile.
En 2020, lors des inondations qui avaient affecté plusieurs arrondissements, Vichèle avait improvisé avec ses amis un centre d’accueil temporaire dans la salle paroissiale. Draps, repas et activités pour enfants avaient été fournis pendant dix jours, laissant un souvenir vif chez les sinistrés hébergés. L’année-là, elle avait promis de recommencer.
La veillée mortuaire à Makélékélé
Depuis vendredi soir, le numéro 991 de la rue Biza ne désemplit pas. Sous le chapiteau blanc dressé pour l’occasion, chants religieux, récitations de psaumes et anecdotes se succèdent, ponctués de silences. Un livre d’or recueille les messages d’anciens passagers touchés.
Les femmes du quartier, organisées en commission cuisine, préparent foufou et poissons fumés pour les visiteurs. Des volontaires gèrent le parking improvisé sur la place voisine afin de ne pas gêner la circulation vers le marché Bourreau déjà dense aux heures de pointe.
Le révérend de la paroisse Saint-Paul de Makélékélé a conduit une prière pour « la servante partie trop tôt ». « Nous demanderons la force d’accepter », a-t-il déclaré, rappelant que la jeune femme avait, en 2022, financé la rénovation d’un vitrail.
Hommages du secteur aérien
À l’aéroport Maya-Maya, un ruban noir barre le logo d’ECAIR sur les guichets d’enregistrement. La direction a diffusé un communiqué saluant « une collaboratrice modèle dont la passion a contribué à moderniser nos services ». Tous les vols ont observé une minute de silence.
Le Syndicat national du personnel navigant a évoqué « une voix pondérée lors des négociations salariales de 2019 ». Les partenaires internationaux, comme Ethiopian Airlines, ont adressé des courriels de condoléances. Des bouquets se forment devant la plaque commémorative dédiée aux pionniers congolais de l’aviation.
Dans un message relayé sur les réseaux sociaux, le ministre des Transports, Honoré Sayi, a souligné que « le parcours de Mlle Mampouya illustre la montée en compétence des ressources humaines nationales dans un secteur stratégique ». Il a assuré la famille du « soutien logistique et moral » de son département.
Des anciens collègues préparent une courte vidéo hommage compilant photos de formation et témoignages de clients. Le montage sera projeté lors du service religieux. « Vichèle aimait que tout soit à l’heure ; nous voulons respecter cette rigueur en peaufinant les moindres transitions », glisse le réalisateur.
Prochaines étapes des obsèques
La famille prévoit d’annoncer la date de l’inhumation après les formalités administratives habituelles. Une commission protocole, conduite par l’oncle maternel, coordonne avec la mairie pour réserver une place au cimetière du centre. Les associations de jeunesse proposeront un cortège silencieux jusqu’au portail.
D’ores et déjà, plusieurs entreprises ont offert des bus afin de transporter les proches de Pointe-Noire et Ouesso. Le service de voirie s’est engagé à reboucher les nids-de-poule de la rue Biza avant le convoi funéraire, afin d’assurer une circulation fluide et respectueuse.
Sur la page dédiée, les condoléances affluent depuis l’étranger. Des anciens passagers basés à Dubaï ou Paris promettent d’allumer une bougie le soir de l’enterrement. « Elle rappelait l’hospitalité congolaise à chaque escale », écrit un chef d’équipage, invitant à partager ce souvenir.
Les médecins de l’hôpital central, où la jeune femme avait été conduite, envisagent d’organiser une collecte posthume pour soutenir la recherche cardiovasculaire. Selon un interne, « transformer le deuil en action préventive serait un hommage utile ». La famille étudie cette proposition avant de se prononcer dès la semaine prochaine.
