Le rire envahit le centre-ville de Brazzaville
Du 23 au 25 octobre, l’Institut français du Congo a résonné de grands éclats de rire. Pour sa 18e édition, le Festival tuSeo a installé son chapiteau culturel au cœur de Brazzaville, attirant curieux, étudiants et familles avides de moments légers après des journées chargées.
Placée sous le slogan « Rire en grand », la manifestation a été officiellement lancée par la promotrice Lauryathe Céphise Bikouta, entourée d’invités et de partenaires publics et privés. « Nous voulons faire vibrer la ville entière autour de l’humour », a-t-elle expliqué en ouverture.
Programmation mêlant stars et révélations
La programmation 2025 a associé figures confirmées et jeunes recrues. Le public a retrouvé Jojo La Légende, Juste Parfait et la pétillante Esther Bass, grande favorite des réseaux sociaux, mais aussi découvert Nenette, venue de Guyane, et Garibou Fama, véritable star montante du stand-up malien.
Le Gabonais Bregeand, dont l’humour pince-sans-rire a séduit le jury du festival en 2023, a complété l’affiche. Chaque artiste a proposé un univers singulier, de la satire sociale au burlesque visuel, permettant au public de voyager sans quitter la salle climatisée de l’I.F.C.
Trois soirées, trois ambiances différentes
La première soirée, le 23 octobre, s’est ouverte sur un clin d’œil aux racines locales avec un sketch bilingue lingala-français, aussitôt relayé sur TikTok. Le lendemain, la scène s’est transformée en battle d’improvisation, avant une clôture orchestrée en formule cabaret, éclairage tamisé et orchestre live.
Selon les organisateurs, plus de 1 500 billets ont été écoulés pour les trois représentations, une fréquentation en hausse de 12 % par rapport à 2024. Nombreuses sont les familles qui ont réservé tôt, profitant des tarifs réduits négociés avec des entreprises partenaires.
Des ateliers pour décomplexer la prise de parole
Au-delà du spectacle, tuSeo a consacré ses matinées à des rendez-vous pédagogiques gratuits. Un atelier d’écriture humoristique, animé par le scénariste camerounais Alain Elvis, a réuni une trentaine de jeunes auteurs, répartis en petits groupes afin de travailler punchlines et chutes.
Parallèlement, la coach de développement personnel Grâce Nkouka a proposé une initiation au « Yoga du rire ». Exercices de respiration et éclats collectifs ont montré, selon elle, que « le rire est une énergie de transformation et de résilience capable de réenchanter nos journées les plus lourdes ».
Un espace précieux pour les humoristes congolais
Pour les humoristes congolais, ce rendez-vous annuel reste un véritable catalyseur. « Ici, nous testons du matériel neuf devant un public attentif et exigeant », confie Juste Parfait en coulisses. La visibilité offerte par le festival favorise aussi les tournées régionales et les collaborations audiovisuelles.
Certains observateurs reprochaient jadis à tuSeo de privilégier les têtes d’affiche étrangères. Lauryathe Céphise Bikouta assume l’équilibre actuel : « Nous ouvrons la scène sans quotas, l’important est la qualité. Les artistes de Brazzaville répondent présents et tirent profit de cette mixité », réaffirme-t-elle.
tuSeo, une aventure qui dépasse les frontières
Créé en 2004, le festival s’est d’abord tenu tous les deux ans avant de devenir annuel. Cette évolution répond, selon les organisateurs, à la demande croissante d’un public jeune connecté aux scènes stand-up de Kinshasa, Abidjan ou Paris qu’il suit sur les plateformes vidéo.
Depuis 2024, tuSeo voyage également en France avec l’escale « rire-la-jolie » lancée à Mantes-la-Jolie puis accueillie à Paris et Rouen. Ce prolongement européen permet de diffuser la créativité congolaise au-delà du continent et d’attirer de nouveaux partenaires institutionnels.
Les retombées touristiques et économiques
Les retombées économiques locales sont réelles : hébergements, restauration rapide et services de transport observent une hausse de clientèle sur la période. Le directeur de l’hôtel Poto-Poto estime « un taux d’occupation de 85 %, contre 70 % habituellement pour la même semaine ».
Partenariats public-privé renforcés
Le ministère de la Culture et des Arts a renouvelé son appui logistique, mettant à disposition des bus pour le transport des étudiants. Du côté privé, une société de téléphonie a offert la retransmission en direct sur sa plateforme, élargissant l’audience aux Congolais établis à l’étranger.
D’autres entreprises locales ont profité de l’occasion pour lancer des campagnes aux couleurs du festival : boissons gazeuses, applications de paiement mobile, marques de vêtements streetwear. Ces opérations marketing, jugées « gagnant-gagnant » par la Chambre de commerce, soutiennent l’économie créative tout en valorisant les marques participantes.
Le rire, facteur de bien-être collectif
Psychologues et sociologues invités à une table ronde affirment que l’humour joue un rôle clé dans la cohésion sociale. « Rire ensemble réduit le stress, adoucit les tensions et renforce le sentiment d’appartenance à la communauté », résume le professeur André Ngakala de l’Université Marien-Ngouabi.
Cap déjà sur la 19e édition
Tandis que les lumières se sont éteintes le 25 octobre, l’équipe prépare déjà l’édition 2026. Des discussions sont en cours pour installer une scène éphémère sur les berges du fleuve Congo et développer un concours de stand-up francophone destiné aux lycéens.
« Nous voulons que tuSeo reste un marqueur culturel de Brazzaville, tout en s’ouvrant à l’Afrique centrale et au monde », insiste la promotrice. Si l’objectif est atteint, la capitale congolaise pourrait consolider sa place de carrefour artistique et touristique dans la sous-région.
