Au cœur des ZAP de la Cuvette
Dans la forêt galerie qui entoure Ngoko et Ondzi, deux zones agricoles protégées se sont peu à peu imposées comme des pépinières d’initiatives rurales. Ici, les jeunes apprennent à maîtriser les sols, à organiser la commercialisation et à vivre dignement de l’agriculture.
Le statut de ZAP leur offre un cadre sécurisé, exempt de pression foncière, où le foncier reste disponible pour des exploitations familiales ou coopératives. Des techniciens agricoles y assurent un suivi permanent, favorisant la montée en compétence et la diversification des cultures.
À Ngoko, manioc, maïs et légumes-feuilles voisinent désormais avec des parcelles de cacao, pendant qu’à Ondzi, l’ananas et le poivron suscitent l’intérêt d’acheteurs de Brazzaville. Les deux sites deviennent ainsi des vitrines de ce que peut offrir la Cuvette aux circuits courts.
Forum Horizon Initiative et Créativité
Cette dynamique a été célébrée lors de la sixième édition du Forum Horizon Initiative et Créativité, organisée du 28 au 30 octobre à Owando. Pendant trois jours, les ateliers ont mis en relation porteurs de projets, chercheurs, responsables publics et investisseurs.
Trois des quatre intervenants du premier panel ont insisté sur le rôle central des ZAP comme véritables incubateurs des métiers agricoles, capables d’absorber la main-d’œuvre jeune tout en répondant à la demande alimentaire croissante du pays.
Des figures politiques engagées
Le député Joël Abel Owassa Yaucka, parrain du forum, a salué « la créativité paysanne qui se conjugue avec l’esprit d’entreprise ». Pour lui, la valeur ajoutée viendra d’une structuration plus fine des filières, appuyée sur des pôles territoriaux comme Ngoko et Ondzi.
À ses côtés, les députés Serges Ikiemi et Blaise Ambeto ont rappelé que l’Assemblée nationale a voté plusieurs dispositifs fiscaux incitatifs en faveur des jeunes agripreneurs. « Les zones protégées doivent devenir des laboratoires de ces mesures », a souligné M. Ambeto.
Des témoignages qui motivent
Parmi les voix entendues, celle d’Amanda Bouya a fait mouche. L’entrepreneuse, qui transforme déjà le cacao familial à Makoua en tablettes artisanales, a expliqué comment une simple plantation a pu créer six emplois stables et dynamiser les achats de producteurs voisins.
« La ZAP me garantit un accès sécurisé aux fèves et à un accompagnement technique », a-t-elle expliqué, avant d’annoncer l’installation d’une chocolaterie moderne dans l’année. Le projet devrait quadrupler la production et ouvrir un débouché local aux cacaoculteurs.
Accès au financement: l’espoir du FIGA
Plusieurs intervenants ont plaidé pour que les jeunes formés par l’Ong Dynamique Owando Pluriel accèdent rapidement aux lignes de crédit du Fonds d’impulsion, de garantie et d’accompagnement. Selon eux, le risque est limité par la qualité des encadrements déjà mis en place.
Le directeur général de la formation qualifiante et de l’emploi, Auxence Léonard Okombi, a précisé que des discussions sont engagées pour coupler ces prêts à des formations financières. Objectif : transformer chaque porteur de projet en véritable gestionnaire de micro-entreprise.
Hygiène et agriculture, même combat
Invité d’honneur, le ministre de la Santé et de la Population, Pr Jean Rosaire Ibara, a saisi la tribune pour rappeler qu’une nourriture saine commence par un environnement propre. Il a annoncé la préparation d’un code général d’hygiène destiné à soutenir cet objectif.
Pour le ministre, l’assainissement urbain, la gestion des ordures et la salubrité dans les marchés sont indissociables de l’essor agroalimentaire. « Nous voulons des villes débarrassées des immondices parce qu’elles seront le premier label de qualité de nos produits », a-t-il insisté.
Cap sur une chocolaterie congolaise
La future unité annoncée par Amanda Bouya s’appuiera sur une technologie à faible consommation énergétique, adaptée aux réalités rurales. Des ingénieurs basés à Oyo testent déjà un torréfacteur alimenté par les résidus de cabosses séchées, limitant ainsi les coûts d’exploitation.
Si la chocolaterie voit le jour, elle pourrait traiter jusqu’à 120 tonnes de fèves par an et injecter près de 200 millions de francs CFA dans l’économie locale. Une perspective qui illustre la capacité des ZAP à générer de la valeur au-delà des champs.
Un modèle à essaimer
Les participants ont conclu que Ngoko et Ondzi servent désormais de référence pour d’autres départements. Plusieurs préfets présents ont évoqué la possibilité de lancer des ZAP dans la Sangha ou les Plateaux, en s’inspirant du même triptyque : foncier sécurisé, suivi technique et débouchés identifiés.
Rendez-vous est pris pour la prochaine édition du Forum, afin de mesurer l’impact des mesures annoncées. En attendant, les jeunes agriculteurs de la Cuvette poursuivent leurs semis, confiants dans l’idée qu’innovation et terroir peuvent marcher de front et créer des emplois durables demain.
Services publics en soutien
Le ministère de l’Agriculture prépare parallèlement un guide pratique pour simplifier les procédures de création d’exploitation au sein des ZAP. Le document, bientôt disponible en ligne et dans les mairies, détaillera les démarches foncières, fiscales et sociales à accomplir.
Selon un conseiller technique, l’objectif est de réduire le délai d’immatriculation des parcelles de dix-huit mois à moins de huit semaines. « La rapidité administrative doit épouser la vitesse de la saison agricole », souligne-t-il, convaincu que la réactivité participera au succès du dispositif.
