Le son des clairons à Mokondzi-Ngouaka
À dix heures précises, les premières notes de l’hymne aux morts ont empli l’air doux de Makélékélé. Autour des allées sablonneuses, une poignée de familles, d’agents municipaux et d’anciens combattants se sont figés, le regard porté vers la stèle principale du cimetière.
D’un pas mesuré, le ministre de l’Assainissement urbain, du Développement local et de l’Entretien routier, Juste Désiré Mondélé, a rejoint le marbre clair. Dans ses bras, un bouquet immaculé de lys et de roses rouges qui, une fois posé, symbolise la gratitude de la République envers ses enfants défunts.
Un rite devenu rendez-vous citoyen
Chaque 1er novembre, l’exécutif renoue avec ce geste. « La Nation reconnaissante honore la mémoire de ceux qui ont achevé leur pèlerinage sur la terre sacrée du Congo », a rappelé le ministre, accompagné du maire de Makélékélé, Laurent Edgard Bassoukissa.
Pour Juste Désiré Mondélé, la commémoration dépasse le seul cadre religieux. Elle est également républicaine, car elle soude les vivants autour d’un destin commun. Reconnaissance, compassion et solidarité se conjuguent dans un même mouvement, renforçant ce qu’il qualifie de « communauté de destin ».
Solidarité avec les familles endeuillées
Sous le soleil d’une saison encore clémente, plusieurs visiteurs ont salué l’initiative. Paule, venue fleurir la tombe de son frère, confie que « voir un ministre se recueillir ici rappelle que nos proches ne sont pas oubliés ». Un sentiment partagé par les associations d’orphelins présentes.
Le représentant gouvernemental a tenu à échanger avec ces familles, prenant le temps d’écouter leurs récits. « Votre peine est la nôtre », leur a-t-il assuré, évoquant le soutien moral que la puissance publique entend offrir à tous ceux qui portent le deuil.
Entre hommage et préservation du patrimoine
Le 1er novembre tombait cette année un samedi, jour dédié aux opérations de salubrité nationales. L’occasion pour le ministre de rappeler que les cimetières sont des musées à ciel ouvert, abritant anonymes et figures illustres comme l’ancien footballeur Germain Dzabana Jadot.
« Un lieu de mémoire mérite d’être entretenu avec le même respect qu’un monument historique », a-t-il soutenu. Des équipes municipales ont ainsi ratissé les allées, taillé les haies et débarrassé les herbes folles, sous l’œil vigilant des riverains rompus aux gestes écocitoyens.
Le civisme, pivot de la salubrité urbaine
Brazzaville consacre chaque premier samedi du mois à la propreté. En associant la journée des morts à cette mobilisation, le ministère entend sensibiliser sur la nécessité de préserver dignement les espaces funéraires, souvent menacés par la prolifération de déchets plastiques.
Selon Juste Désiré Mondélé, la lutte contre l’insalubrité s’inscrit dans une démarche globale de valorisation de la mémoire collective. « Notre environnement raconte aussi notre histoire », souligne-t-il, estimant que maintenir les tombes propres revient à transmettre un héritage culturel aux jeunes générations.
Des sites qui racontent l’histoire nationale
Mokondzi-Ngouaka, ouvert en 1905, reflète l’évolution sociale de Brazzaville. Les stèles en marbre côtoient de modestes croix de bois, rappelant que la mort égalise toutes les conditions. Le ministre a évoqué « ce miroir silencieux où reposent héros, soldats inconnus et citoyens discrets ».
Les historiens locaux voient dans cet espace un livre ouvert. « Chaque inscription, chaque épitaphe est une page de notre récit commun », explique Clément Ibara, chercheur à l’université Marien-Ngouabi, rencontré sur place pour documenter les tombes d’ancêtres notables.
L’entretien routier au service du recueillement
Responsable des infrastructures, le ministère veille également à la qualité des voies d’accès aux nécropoles. Récemment, la chaussée menant au site a été nivelée pour faciliter le passage des cortèges et des personnes âgées, souvent découragées par les pistes dégradées.
« Venir se souvenir ne doit pas devenir un parcours d’obstacles », insiste un agent du service technique. Les riverains affirment que la fréquentation du cimetière a augmenté depuis la réfection, signe que l’action publique favorise le maintien des liens intergénérationnels.
La mémoire, levier de cohésion nationale
Au-delà du rite religieux, le calendrier républicain fait du 1er novembre un rappel des valeurs de partage. Dans son allocution, Juste Désiré Mondélé a souligné que la solidarité manifestée ce jour-là s’étend à toutes les collectivités, de Pointe-Noire à Ouesso.
« Nous partageons la même terre, donc le même avenir », a-t-il déclaré, reprenant le principe d’unité cher à la Nation. Cette vision s’alimente d’actes concrets, comme le nettoyage collectif ou l’entretien des nécropoles dans chaque arrondissement.
Des voix locales engagées
Laurent Edgard Bassoukissa, maire de Makélékélé, affirme que la mairie continuera d’investir dans les équipements funéraires, citant l’installation récente de points d’eau et la pose de bancs pour les familles. Il voit dans ces aménagements « une invitation au recueillement apaisé ».
Des jeunes volontaires se sont également mobilisés. Pour Grâce, 22 ans, étudiante, « participer au débroussaillage, c’est honorer nos racines ». Elle dit apprécier la présence officielle, car « cela donne du sens à notre engagement citoyen ».
Une action appelée à perdurer
Les autorités envisagent d’étendre la rénovation à d’autres cimetières historiques, notamment Itatolo et Nkombo-Matari. Des partenariats avec les entreprises locales d’horticulture sont à l’étude pour fournir des fleurs adaptées au climat et réduire la flore envahissante.
Le ministre affirme que la politique d’assainissement urbain reste indissociable du devoir de mémoire. « En veillant sur les tombes, nous veillons sur notre identité », résume-t-il, convaincu que l’hommage du 1er novembre n’est pas un aboutissement mais un point de départ.
