Un campus minier au cœur de la Sangha
Le bourdonnement des marteaux-piqueurs a cédé la place au murmure studieux des cahiers. Le 11 novembre, le tout nouveau Centre des métiers des mines de Souanké a ouvert ses salles de classe à cinquante apprenants, première promotion d’une aventure pédagogique tournée vers l’industrie extractive.
Situé dans le département de la Sangha, le centre, encore appelé CEFA, est dédié aux métiers de mineur-foreur et de soudeur. Deux filières courtes mais exigeantes, choisies pour répondre aux besoins immédiats des sociétés minières déjà installées dans la région et celles qui prospectent.
Une filière taillée pour l’employabilité locale
Interdit aux moins de seize ans, l’établissement combine cours théoriques, exercices en atelier et immersion programmée sur des sites d’extraction. L’idée, expliquent les encadrants, est de transformer un savoir empirique souvent acquis sur le tas en compétences certifiées par des diplômes reconnus nationalement.
« Les programmes sont finalisés, les équipements installés, les formateurs présents », assure Christophe Lia, directeur général de l’enseignement professionnel. Selon lui, cette structure permettra aux jeunes de la Sangha de « se qualifier sans quitter leur terroir » et d’accéder rapidement à des postes bien rémunérés.
L’ouverture intervient une semaine avant l’inauguration officielle annoncée pour le 18 novembre par le président Denis Sassou Nguesso. Dans la sous-préfecture de Souanké, l’événement est perçu comme un signe fort d’investissement étatique dans la formation professionnelle et la valorisation des ressources locales.
Préparatifs d’une inauguration très attendue
Depuis plusieurs jours, autorités administratives, chefs traditionnels et responsables religieux multiplient les réunions. Stands, décorations, chorales : chaque détail est discuté pour que la visite présidentielle se déroule sans accroc. « Nous voulons montrer le meilleur visage de notre territoire », insiste le sous-préfet Georges Nzengué.
Sur le campus flambant neuf, les élèves découvrent des salles climatisées, des ateliers équipés de postes de soudure dernier cri et de simulateurs de forage. Pour Rosalie, 19 ans, inscrite en section soudage, « c’est une chance d’apprendre sur du matériel que l’on voyait seulement à la télévision ».
Le choix de Souanké ne doit rien au hasard. La Sangha concentre plusieurs permis miniers, notamment pour le fer et l’or. Les compagnies, souvent confrontées à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, ont plaidé pour la création d’un centre de formation capable d’ancrer les compétences dans la région.
L’effervescence commerciale gagne Souanké
Les cours théoriques portent sur la géologie de base, la sécurité au travail, l’environnement et la maintenance d’équipements lourds. Autant de notions qui « réduiront les accidents et augmenteront la productivité », souligne l’ingénieur-minier Stéphane Ngassiki, appelé comme consultant bénévole pendant les six premiers mois.
Une fois la phase d’atelier validée, chaque étudiant effectuera, grâce à une convention signée avec plusieurs exploitants, deux stages de trois mois en carrière ou sur plateforme. Cette alternance vise à garantir un taux d’insertion proche de cent pour cent, objectif affiché par la direction.
Pour les commerçants de la ville, l’ouverture du CEFA et l’arrivée prochaine du chef de l’État représentent déjà un impact économique tangible. « Depuis l’annonce, je vends deux fois plus de sacs de riz et de provisions », confie Aïssatou, gérante d’une boutique au marché central.
Les hôteliers affichent complet, les transporteurs organisent des navettes supplémentaires et les artisans locaux confectionnent des pagnes à l’effigie du centre. La municipalité espère que ce mouvement se pérennisera, nourri par l’arrivée régulière de formateurs, d’ingénieurs et de familles venues s’installer à proximité.
Des perspectives durables pour la jeunesse congolaise
Au-delà de l’effervescence, les éducateurs insistent sur la rigueur attendue. Les candidats devront suivre un règlement intérieur strict, incluant le port d’équipements de protection, la participation aux séances de sport matinal et l’entretien des dortoirs. « Nous formons des professionnels, pas seulement des étudiants », rappelle la directrice des études, Nadège Okila.
Pour financer son fonctionnement, le CEFA bénéficie d’un budget initial de l’État complété par des contributions des entreprises minières et un fonds de partenariat public-privé. Cette combinaison doit assurer la maintenance du matériel et la mise à jour régulière des curricula, gage de durabilité pédagogique.
Les autorités locales envisagent déjà l’ouverture future de modules complémentaires en mécanique industrielle, en électrotechnique et en environnement. « Nous avancerons pas à pas, en fonction des retours du terrain », explique Christophe Lia, précisant que chaque extension sera précédée d’une étude approfondie des besoins du bassin minier.
À court terme, la priorité reste la réussite de cette première cohorte. Les examens sont programmés en juin, avec une cérémonie de remise de certificats dès juillet. Les entreprises partenaires se sont engagées à proposer des contrats d’embauche ou d’apprentissage aux lauréats classés dans les meilleurs rangs.
Entre impulsion présidentielle, attentes économiques et espoirs individuels, le Centre des métiers des mines cristallise ainsi l’ambition d’une formation de proximité, connectée aux réalités du pays. Pour Souanké, l’aventure ne fait que commencer : le minerai ne sera plus l’unique ressource, le savoir-faire comptera tout autant.
