Le MAEP, instrument africain de redevabilité
Conçu au début des années 2000 sous l’égide de l’Union africaine, le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs – plus connu sous l’acronyme MAEP – s’est imposé comme un laboratoire continental de bonnes pratiques en matière de gouvernance. Sa particularité réside dans l’auto-évaluation volontaire que s’imposent les États membres, soucieux de consolider la transparence, la stabilité institutionnelle et la croissance inclusive. Le Congo-Brazzaville, signataire du mécanisme dès mars 2003, réaffirme aujourd’hui cette volonté en renforçant sa Commission nationale chargée de piloter les futures revues internes et externes.
Des fondements rappelés pour une mission clarifiée
Réunis le 18 juillet dans la capitale, les cadres de la Commission nationale d’auto-évaluation ont pris le temps de revisiter les textes constitutifs du MAEP afin d’en décliner les implications concrètes pour le pays. Selon le président de la structure, Alain Akouala, « cette séance de travail devait lever toute ambiguïté sur les prérogatives de chacun, de sorte que la chaîne décisionnelle demeure fluide de la présidence de la République jusqu’aux experts de terrain ».
La démarche s’inscrit dans une logique de responsabilisation collective : chaque membre est appelé à faire converger son expertise vers la rédaction d’un rapport pays rigoureux, base de la revue qui sera menée avec les pairs africains. Pour Edouard Lonongo, premier vice-président, la clarté désormais acquise sur la cartographie des tâches permettra « d’anticiper les défis techniques et de construire un calendrier réaliste ».
Cap sur un protocole d’entente structurant
Au-delà du rappel des fondamentaux, les échanges ont surtout porté sur la signature prochaine du protocole d’entente, document par lequel le Congo s’engagera formellement dans la phase opérationnelle. Cette étape, attendue de longue date par les observateurs, doit sceller la pleine insertion de Brazzaville dans l’architecture d’évaluation continentale. Les négociations menées avec le secrétariat du MAEP à Midrand sont, selon plusieurs sources internes, « bien avancées » et pourraient aboutir d’ici la fin de l’année.
La finalisation du protocole ouvrira la voie à des missions techniques panafricaines dans le pays. Celles-ci examineront, entre autres, la gouvernance économique, l’efficacité des politiques publiques et la participation citoyenne. Pour les autorités congolaises, l’exercice représente autant une vitrine de la stabilité institutionnelle nationale qu’un outil d’amélioration continue.
Le défi logistique d’une commission ambitieuse
Si la dimension politique bénéficie d’un soutien affirmé – le chef de l’État et le Premier ministre étant désignés parrains du processus –, le volet logistique demeure un chantier sensible. Les cadres plaident pour un appui renforcé en ressources humaines spécialisées, l’acquisition d’équipements numériques dédiés à la collecte de données et la mise à disposition d’un siège permanent. D’après un haut fonctionnaire présent à la rencontre, « la crédibilité de l’évaluation dépendra aussi de la robustesse de notre dispositif statistique ».
Le ministère des Finances a déjà prévu une ligne budgétaire spécifique dans la loi de finances rectificative, preuve que l’État souhaite inscrire le MAEP dans la durée. Des partenariats techniques sont par ailleurs envisagés avec la Commission économique pour l’Afrique et la Banque africaine de développement, afin d’optimiser la formation des enquêteurs nationaux.
Vers une intégration économique et politique renforcée
En s’engageant avec détermination dans le MAEP, le Congo-Brazzaville espère consolider son attractivité et accélérer les réformes structurelles compatibles avec la Zone de libre-échange continentale africaine. Le Président Denis Sassou Nguesso, qui a rappelé à plusieurs reprises la « centralité de la gouvernance dans la compétitivité africaine », voit dans cet outil un accélérateur de convergence régionale.
À terme, la Commission nationale ambitionne d’émettre des recommandations susceptibles d’alimenter le Plan national de développement 2022-2026 et de nourrir le dialogue avec les partenaires au développement. Dans un contexte marqué par la quête de diversification économique et par les attentes accrues de la jeunesse urbaine, l’auto-évaluation apparaît ainsi comme un espace de débat structuré, capable de transformer les défis en opportunités partagées. Les mois à venir diront si la mécanique, patiemment huilée à Brazzaville, saura répondre aux standards élevés fixés par le continent.