Balais ministériels dans les écoles de Brazzaville
Balais, râteaux et gants de protection ont remplacé dossiers et parapheurs, le premier samedi d’octobre 2025, pour trois membres du gouvernement. À Brazzaville, leurs pas les ont conduits successivement dans quatre établissements publics afin de lancer l’année scolaire sous le signe de la propreté.
Au complexe scolaire Révolution-Gambo Olilou, au lycée technique 5 Février 1979, à l’école primaire 5 Février et au CEG Angola Libre, ministres et volontaires ont ramassé déchets, arraché herbes folles et repeint des murs ternis, rappelant que l’assainissement commence par des gestes simples et réguliers.
Une opération conduite par trois ministères clés
Juste Désiré Mondelé, en charge de l’Assainissement urbain, Jean Luc Mouthou, pilote de l’Enseignement général, et Ghislain Thierry Maguessa Ebomé, ministre de l’Enseignement technique, avaient promis de « prêcher par l’exemple ». Les habitants des quartiers traversés ont salué cette implication directe.
Sur chaque site les délégations ont été rejointes par des associations spécialisées telles que Jeunesse Verte et Congo Clean Cities ainsi que par des syndics de parents d’élèves. Pelles, brouettes et sacs biodégradables ont circulé au rythme des encouragements des élèves étonnés de voir leurs ministres en bleu de travail.
Mikalou, Mpila, Makélékélé : réalités contrastées
Le constat a toutefois révélé des réalités contrastées. Si les cours du lycée de la Révolution respirent la discipline, l’école primaire 5 Février de Mikalou subit la pression de l’érosion : salles fissurées, salles englouties, et un accès coupé à chaque averse, transformant l’avenue voisine en ruisseau boueux.
Derrière les murs décrépis, enseignants et élèves s’adaptent. « Nous sommes habitués à déplacer les pupitres selon les flaques », confie Mme Ntemo, directrice adjointe. Malgré ces défis, la rentrée a démarré à bonne date, grâce, souligne-t-elle, « au soutien constant des autorités ».
Au CEG Angola Libre de Makélékélé, l’intervention ministérielle a permis d’enlever plusieurs camions de gravats et de vieux pupitres. Les riverains y voyaient depuis des mois un « nid à moustiques ». Désormais, la direction envisage de transformer la cour assainie en potager pédagogique.
Au-delà du nettoyage, un message citoyen
La participation politique directe à ces opérations n’est pas nouvelle. Depuis la circulaire du Premier ministre Clément Mouamba instituant la journée nationale de salubrité, chaque premier samedi du mois, administrations, entreprises et particuliers sont appelés à libérer deux heures pour nettoyer leur entourage.
Pour Juste Désiré Mondelé, « il ne s’agit pas d’une corvée ponctuelle mais d’un rituel de responsabilité collective ». Le ministre rappelle que la loi sur l’hygiène publique prévoit des sanctions pour dépôts sauvages, mais qu’« éduquer les consciences reste plus durable que verbaliser ».
L’initiative a aussi une dimension économique. L’entretien préventif évite des coûts lourds de réhabilitation et protège le matériel pédagogique. Selon une note interne du ministère de l’Enseignement général, chaque salle endommagée coûte en moyenne trois millions de francs CFA à reconstruire.
Former, protéger, économiser : les enjeux durables
Les organisations environnementales profitent de ces journées pour sensibiliser aux tris des déchets et au compostage. À Mpila, des élèves de première année ont découvert la fabrication de briquettes écologiques à partir de papiers usagés, une technique déjà testée par l’association Terre Nouvelle dans plusieurs quartiers.
Côté enseignants, le Syndicat national des instituteurs souhaite l’inscription de modules sur la salubrité dans les programmes officiels. Son secrétaire général, M. Bomeka, estime que « l’éducation civique gagne à se vivre en action plutôt qu’en théorie ». Les ministères concernés étudient la faisabilité.
Les parents d’élèves, eux, voient dans cette opération une occasion de rapprocher institution et famille. Mme Tchicaya, membre d’un comité de gestion, affirme que la présence des ministres « donne du poids aux messages que nous passons tous les jours à la maison sur le tri des déchets ».
À l’issue de la tournée, une plaque interdisant tout dépôt d’ordures dans l’enceinte de l’école primaire 5 Février a été scellée. Un geste symbolique, mais accompagné, selon la mairie de Djiri, d’un programme de gardiennage renforcé et de bacs supplémentaires fournis par la Société des déchets solides.
Vers une routine nationale de salubrité
Les prochaines étapes concernent la cartographie des points noirs dans toutes les écoles publiques de Brazzaville. Le comité inter-ministériel entend publier, avant décembre, un tableau de bord consultable en ligne, assorti d’indicateurs mensuels pour suivre la fréquence des opérations d’assainissement et l’évolution de l’état des bâtiments.
Au-delà de la capitale, Pointe-Noire et Dolisie se préparent déjà à décliner la démarche. L’Agence nationale de la salubrité explique qu’un kit standard – pelles, gants, brochures, sacs – sera bientôt acheminé dans chaque chef-lieu, afin d’harmoniser les pratiques du littoral au plateau.
En fin d’après-midi, les trois ministres ont regagné leurs bureaux, laissant derrière eux des cours balayées et des regards convaincus. Le rendez-vous est déjà pris pour le premier samedi de novembre, preuve qu’une routine vertueuse peut s’installer, à condition que chacun y apporte son coup de balai.
Reste enfin la question des déchets collectés : l’usine de valorisation de Mpila prévoit d’en transformer une partie en énergie pour l’éclairage des salles de classe dès janvier prochain.
